Hermes Corp - Alex [Terminée]

Chapitre 13

- - - Alex - - -

Dany est arrivé en ville en fin de matinée. Il m'a à peine adressé la parole quand je lui ai ouvert la porte de l'appartement de Minna. Notre appartement. Il n'a pas plus parlé quand il a déballé ses affaires et s'est installé dans le salon. Maintenant nous restons là, depuis plusieurs heures, à nous jeter des regards en coin, sans parler, assis sur le canapé. Je tends une main vers la télécommande, allumer la télé, faire un peu de bruit... J'ai déjà du mal à garder les idées claires, tant l'attente est insupportable, alors sentir ce silence peser sur ma conscience me rend dingue. A peine ai-je reposé la télécommande que Dany s'en empare, éteint et la balance de l'autre côté du canapé. Il reprend immédiatement sa posture, les coudes sur les genoux, les mains jointes sous le menton, le visage fermé. Je détourne les yeux et fixe le sol.

Je comprends sa réaction, à sa place, je me serais déjà cassé la gueule. J'ai arrêté de trembler, mais je ne suis pas calmé pour autant. Tout un tas d'émotions se succèdent en moi, peur, colère, frustration, culpabilité... Et maintenant, ajouté à ça, j'épie les moindres mouvements, la moindre réaction de Dany. Un de mes meilleurs amis, mon... beau-frère... enfin, pour l'instant. Même si on la retrouve, même si elle va bien, même si, par miracle, elle ne me déteste pas après tout ça, je ne crois pas que notre couple survivra à ça. Depuis qu'il est arrivé, je me fais cette réflexion. Je crois bien ne jamais m'être senti aussi désespéré. Je savais que j'aurais dû la quitter tant qu'il était temps. Au final, on en arrive au même point, elle est moi, c'est impossible. Mais si j'avais pris mes responsabilités avant qu'il ne soit trop tard, ça lui aurait épargné cette... ce... Putain ! Je ne trouve même pas les mots pour décrire ce qu'ils lui font sans doute subir en ce moment même.

Je n'ai pas eu de nouvelles de Jordan depuis qu'il m'a confié l'adresse où Minna est retenue et j'ai dû faire appel aux moindres miettes de mon self control pour ne pas filer la retrouver aussi sec. En y réfléchissant, je n'en serais certainement pas sorti vivant, ou alors j'aurais été entraîné dans cette mission de force, ou pire, j'aurais refusé elle c'est elle qui aurait été tuée. Je serre les dents, à cette idée. L'image de son corps sans vie, bâillonné et ligoté, couvert de plaies sanguinolentes, les yeux ouverts sur un regard vide et sans vie... Elle me hante. Quelques larmes m'échappent, je ne bouge pas pour autant. Dany pousse alors un grand soupir et se tourne vers moi.

Dany – Arrête.

Alex – Arrêter quoi ?

Dany – De pleurer. Ça va pas la ramener et ça va pas l'aider.

Alex – C'est pas comme si je pouvais contrôler.

Dany – Alors pense à autre chose. Elle aura besoin de toi quand elle va rentrer.

Alex – Ton père a pas donné signe de vie, on a aucune nouvelle et ça fait des heures qu'elle est entre leurs mains. Tu continues à croire qu'elle est en vie ?

Dany – J'en doute pas, sinon t'aurais eu des nouvelles d'eux. Et puis, crois-moi, le général l'a bien entraînée.

Alex – C'est-à-dire ?

Nouveau soupir. Ouais, désolé Dany, je te fais chier, je suis curieux, mais si ça peut me donner une raison d'espérer que la femme que j'aime est en vie, je préfère me renseigner.

Dany – C'est-à-dire... Quand il l'a ramenée à la maison, elle était mal, vraiment mal. T'imagines pas. Le moindre bruit, un coup de vent, des éclats de voix, la télé qui s'allume... Elle partait en courant pour se cacher dans ma chambre. La mienne. Elle disait qu'elle se sentait en sécurité qu'avec moi parce que j'avais toujours empêché tout le monde de la toucher. Il faut dire qu'à l'époque les psys et les médecins de l'armée, c'était pas des délicats. Ils prenaient pas de gants, ils la manipulaient dans faire attention si oui ou non elle était d'accord, ils la tournaient dans tous les sens, faisaient des prélèvements sans prendre soin de la cacher aux yeux du monde. Et le psy, ok il était compétent mais il était habitué aux soldats, à ceux qui répondent du tac au tac quand on leur pose une question. Minna elle... C'était trop dur pour elle à ce moment-là, trop frais encore, dans sa mémoire. Alors j'ai insisté pour assister à tout, examens, séances, tout, et quand ça allait trop loin, je m'interposais. Quand le général a compris ce qu'il se passait, et qu'elle ne faisait pas de progrès, qu'elle avait toujours peur, il a pris les choses en main et lui a proposé de l'entraîner pour résister à ce genre de... situations.