Je me retourne.
-Encore vous… Pourquoi n'êtes vous pas parti ?
-Je n'ai pas pu voyez vous. Détestez moi de vous le dire, mais ne m'empêchez pas de vous voir.
-Je ne comprends rien à ce que vous dites. Vous m'ennuyez.
-Mais enfin, je t’aime Diane !
Il descend de cheval, s'approche dangereusement près.
-Rappelez moi quand je vous ai autorisé à me tutoyer François-Xavier ?
- C'est tout ce que vous répondez ?
Le pauvre ! Il a l'air outragé d'un héros romantique drapé dans sa dignité !
-Excusez moi François-Xavier, mais vous êtes la dernière personne dont j'aurais attendu une déclaration. Je ne parle même pas du fait que je sois fiancée !
-Alors vous me repoussez ?
- Mais évidemment mon cher ! A quoi vous attendiez vous ? Néanmoins, si cela apaise votre coeur, j'écouterai avec patience l'exposé de vos sentiments.
Il éclate de rire.
-C'est bien vous Diane ! Vous demandez de l'affection mais vous êtes incapable d'en donner. Et pourtant je vous aime. Depuis plus longtemps que vous ne le pensez.
-Pourquoi ne pas m'avoir demandée en mariage plus tôt ?
-Vous riez devant moi, vous auriez refusé ma demande.
-Qu'en savez vous ?
-Je ne ressemble en rien à Bertrand de Ray.
Encore ce nom ! Quand comprendront ils tous que je ne veux plus l'entendre!
-Personne ne cessera donc jamais de m'en parler ! Est ce un fantôme que je trainerai toute ma vie ? Le spectre de ma jeunesse folle ? Bertrand n'existe plus pour moi. Il est sûrement vivant je ne sais trop où et se passe fort bien de moi.
- Qui vous dit qu'il est vivant ?
-On le saurait s'il était mort.
-Mais on le sait parfaitement ma chère…
Mort. Mort, toi, Bertrand. Mon Bertrand. Toi, mort. Et si c'était vrai ? Mais cela ne m'expliquera pas les raisons de ton départ.
-Que savez vous ? Dites moi.
Je descends de cheval. Le visage de François-Xavier est à quelques centimètres du mien. Stupides larmes qui montent à mes yeux !
-Asseyez vous Diane. Tenez, là, sur cette souche. Mettez-vous sur mon gilet.
Je souris. Le fameux gilet moutarde !
Il s'assied près de moi. Trop près peut être mais ça n'est pas grave. Il commence. Sa voix est hésitante. Je sens qu'il ne veut pas me faire de mal, qu'il regrette d'avoir parlé de cela. Ses intonations se dont très douces tout d'un coup.
Il parle d'une découverte. Il y a un mois. Dans une maison de Montmartre, pendant une opération coup de filet pour demanteler un trafic douteux, la police a retrouvé un cadavre habillé simplement, grand et très maigre, mal nourri, brun, à moitié grignoté par les rats, poignardé dans le dos. La police a relevé une dizaine de coups. Le médecin légiste a décrété que la victime avait été détenue durant plusieurs années, son corps était couvert de bleus, ses jambes paralysées suite à une chute.-Le cadavre présentait les mêmes signes particulier que Bertrand. Vous les connaissiez mieux que moi: ses grains de beauté sur les mains, son oreille droite un peu plus décollée. Ses parents l'ont formellement identifié. Ils ont pu récupérer le corps et l'enterrer dans l'intimité.
J'essaie en vain de m'arrêter de pleurer...
-Êtes vous en train de me dire que, sciemment, personne ne m'a mise au courant ?
-Peu de personnes étaient au courant. Personne n'a voulu vous faire du mal. Vous paraissez l'avoir oublié pour Raphaël.
-Laissez moi maintenant.
-Je ne peux pas vous laisser dans cet état, vous tremblez et vous pleurez.
-Laissez moi ! Allez vous en !
Il essaie de prendre ma main, caresse ma joue, murmure doucement. Je n'ai plus la force de l'en empêcher...
-Calmez vous, Diane, ma Diane… Je suis là.
Je sens qu'il embrasse lentement mes cheveux. Ses lèvres se rapprochent et, avant que j'ai pu faire quoi que ce soit, se posent sur les miennes. Un instant j'imagine Bertrand.
Il est mort Diane ! Qu'est ce que je fais à embrasser ainsi François-Xavier ?-Vous vous égarez Monsieur je crois. Partez.
-Vous n'avez pas apprécié ?
-Pardon ? Vous croyez vraiment que c'est une bonne question ?
Je monte sur Esmeralda, m'éloigne au pas.
-Diane attendez ! Attendez moi !
-Je vous déteste ! Vous dites m'aimez et vous m'avez déchiré le coeur…
-Vous m'avez arraché la vérité, je vous ai volé un baiser. Nous sommes quites.
-Je vous ai “arraché la vérité” ? Je ne voulais plus entendre parler de Bertrand de toute ma vie !!!
Je veux faire partir ma jument au galop, François Xavier saisit sa bride. Esmeralda se cabre.
Je tombe...A suivre...
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Le Silence qui nous entoure
Tarihi KurguDans le Paris de 1850, elle est la reine des bals et des coeurs. Elle. Diane de Bauséant. Mais sous le masque du charme, de la réussite et du superficiel, se cache une autre Diane, modelée par les larmes et le deuil. Dans sa recherche désespérée d...