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— Lula, vous pouvez nous expliquer ça ?

Un silence de mort s'était abattu dans la salle. Tous les regards convergeaient vers l'apprentie inspectrice, dans l'attente de son explication.

— Je... Non, je ne comprends pas.

— C'est peut-être juste une méprise. Vous êtes sûre de votre coup ?

Elle consulta divers menus avec vélocité pour contrôler les paramètres.

— Absolument sûre. Le code d'authentification présent sur la micro-puce est celui de mon ordinateur.

— Comment est-ce possible ?

— Je l'ignore.

— Hum... J'espérais obtenir des réponses et nous voilà avec un nouveau mystère. Que faire ?

Miller prit la parole.

— Je vais vous le dire. Si c'était le nom d'un agent lambda qui était sorti, comment auriez-vous agi ?

— Je l'aurais arrêté pour l'interroger.

— Eh bien voilà.

— Hein ? s'insurgea Lula. Vous n'allez pas m'arrêter quand même ?

— Votre ordinateur semble avoir été utilisé dans la préparation d'un attentat, cela fait de vous une suspecte.

— Je n'ai rien à voir avec ces attaques !

— Je veux bien vous offrir le bénéfice du doute, mais, en attendant d'en savoir plus, je suis obligé de vous conduire en cellule. C'est la procédure, n'est-ce pas inspecteur ?

Il se tourna vers Denoël dont le regard passait alternativement du commissaire à son élève. Cette dernière implora son professeur :

— Axel, je vous en prie, ne le laissez pas faire.

Il baissa les yeux.

— Lula, je suis désolé, il a raison.

— Non ! gémit-elle.

— Ce ne sera pas long. Juste le temps d'éclaircir cette histoire.

Elle observa à nouveau les fenêtres holographiques à la recherche d'un élément susceptible de la disculper. Elle ne trouva rien. En l'occurrence, tout l'accusait.

Là, je suis dans la merde jusqu'au cou, pensa-t-elle.

Le chef de la police sortit ses menottes et s'approcha d'elle. Par reflexe, elle recula d'un pas et mit ses mains dans le dos.

— Mademoiselle Dos Santos, s'il vous plaît, veuillez n'opposer aucune résistance.

Il allait se saisir d'elle quand il stoppa son geste, prit d'une idée soudaine.

— J'y pense, dit-il, il s'agit d'une enquête d'Astropol. C'est à un de vos agents de procéder à l'arrestation.

Il tendit les menottes à Denoël.

— Commissaire, je ne vais pas...

— Vous ne voudriez pas qu'un pan de l'enquête soit invalidé par la justice pour vice de procédure, n'est-ce pas ? Pour cela, nous devons suivre les règles.

L'inspecteur ne répondit pas et se contenta de prendre les menottes des mains du flic.

— Axel... murmura Lula avec des sanglots.

— Je dois le faire, c'est la procédure.

— Je suis innocente. Vous le savez, hein ?

Il ne pouvait répondre oui, ç'eut été la preuve d'un manque flagrant d'objectivité. Il se contenta de conclure :

— Je vais régler ça.

Puis, il passa les menottes aux poignets de la jeune femme.

— Voilà commissaire, elle est à vous.

— Désolé, vous devez également la conduire en cellule.

— Commissaire...

— La procédure, inspecteur. La procédure...

Les deux hommes s'observèrent quelques secondes avant que Denoël soit obligé de s'avouer vaincu.

— Très bien. Où va-t-on ?

— Les cellules sont au dernier étage. Suivez-moi.

Il partit devant, Denoël le suivit en poussant Lula, qui ne résista pas. Ils passèrent le couloir avant de déboucher dans le vaste open-space au bout duquel se trouvaient les ascenseurs. En le traversant, l'inspecteur pouvait sentir sur eux le poids du regard plein de stupeur des policiers. Certains tapaient leurs collègues du coude pour qu'ils lèvent le nez de leur travail et contemple la scène.

Denoël marchait tête basse, honteux d'offrir le spectacle lamentable d'un agent d'Astropol contraint d'arrêter sa propre assistante. Sa crédibilité ne s'en remettrait pas.

Plus loin, Miller affichait un sourire satisfait, trop content de tenir enfin sa vengeance pour les humiliations subies.

L'ascenseur s'ouvrait sur un vestibule fermé de l'autre côté par une grille protégeant une porte. Derrière cette sécurité se profilait un large couloir où se trouvaient les cellules, cinq de chaque côté, toutes vides.

Miller utilisa son pass magnétique personnel pour pénétrer le quartier pénitentiaire et ouvrir la geôle qu'il destinait à Lula. Denoël la poussa à l'intérieur et le commissaire fit claquer la porte derrière elle.

À travers les barreaux, l'inspecteur observa son assistante. L'incompréhension se lisait sur son visage. Il aurait voulu lui offrir une réponse mais il n'en avait pas.

— À demain, mademoiselle Dos Santos, dit Miller en tournant les talons.

— Axel... gémit la jeune femme à destination de son patron.

Ne sachant que répondre, ce dernier se contenta de murmurer :

— Tenez bon.

Et il quitta l'endroit à son tour.

SÉRÉNA - WATTY AWARD 2019 WINNEROù les histoires vivent. Découvrez maintenant