Jungkook dormait encore. J'avais pensé le réveiller. Peut-être devait-il se rendre au travail. Mais j'avais préféré le laisser se reposer. Il en avait certainement besoin, en prime de tous les soucis qu'il se faisait ces temps-ci.
Je m'étais donc levé pour préparer le petit déjeuner. C'est alors que je le vis détaler à l'entrée avec toutes ses affaires qu'il tenait à bout de bras. Malheureusement pour lui, la porte était fermée à clé. J'avais prévu le coup.
— Tu comptais encore une fois partir comme un voleur ?
Ma voix l'avait surpris. Il s'était montré trop imprudent. Et c'était peu fier qu'il se tournât vers moi. Je venais de quitter la cuisine. J'avais les bras croisés sur ma poitrine. Sa surprise fut d'autant plus grande lorsque je brandis devant ses yeux les clés de mon appartement.
— Ne crois pas pouvoir t'en aller avant de m'avoir donné des explications.
Jungkook eut un soupir. Il n'avait pas cherché à me contredire. Il savait probablement déjà que c'était peine perdue. Ainsi, je l'invitai à venir s'asseoir sur le canapé-lit qui était resté intacte depuis que je l'avais préparé la veille au soir.
— Je suis désolé, me devança-t-il.
— Désolé de quoi ? Tu ne sais même pas de quoi je veux te parler.
— Je ne suis pas idiot. Je sais très bien de quoi tu veux parler. Je ne cherche pas la facilité en m'excusant auprès de toi. Mon comportement était inacceptable, je le reconnais. J'ai abusé de la bouteille et j'ai bien failli abuser de toi si tu ne m'avais pas arrêté.
Son aveu m'en boucha un coin. J'avais bien cru devoir lui faire voir le mal qu'il avait causé, mais finalement, ses paroles m'avaient fait relativiser.
— Ça t'arrive souvent ?
— Non et heureusement. Je suis navré que tu aies dû subir ça. Je... J'ai l'alcool mauvais. Je me répète à chaque fois que je ferais mieux de ne pas recommencer, mais avec ce que je vis en ce moment, c'est encore la seule chose qui me permet d'oublier un peu. Les effets secondaires, en revanche, je m'en passerais bien. Il est rare que je puisse me contrôler. Je deviens violant et ça me désole parce que j'aimerais pouvoir y remédier.
— Tu es violant et tu ressens également une envie irrépressible de coucher avec quelqu'un.
Jungkook prit ma remarque très à cœur. Il fallait dire que je me demandais pour quelle raison il était venu me voir finalement : était-ce vraiment car sa femme ne voulait plus de lui, ou était-ce parce qu'il était conscient d'avoir sa place sous mes draps ?
— Je ne suis pas venu pour ça, Yoongi.
— Pourtant, il s'est passé ce qui s'est passé. Tu ne pourras pas tout mettre sur la faute de l'alcool, ou alors je t'accuserais de me mentir et de profiter de ma bienveillance.
— Je ne sais pas quoi te dire.
Jungkook s'était avachi, les coudes posés sur ses cuisses nues. Il portait l'un de mes calçons. Son ventre était tout plat. Son visage s'enfonçait dans le creux de ses mains.
— J'ai peur, m'avoua-t-il à mi-voix.
— Tu as peur de quoi ?
— J'ai peur de ce que je vais devenir.
Tout à coup, il se ressaisit. Un peu plus et il fondait en larmes. Il préféra les retenir et se gratta la tête d'un geste nerveux.
— Je viens de détruire ce que j'ai mis tant de temps à consolider. Une famille. Mes parents vont me tuer, c'est sûr. Ils ne se sentiront sûrement jamais en mesure de me pardonner, et c'est sans parler de ma fille. J'ai beaucoup de regrets, mais malgré ça, je n'en ressens aucun quant au fait que ma femme soit au courant de mes tromperies. Pour une fois dans ma vie, j'ai assumé un choix que j'ai fait pour moi et pour moi seul. Seulement maintenant, je ne suis plus si sûr de pouvoir endosser mes responsabilités. Les conséquences sont bien trop lourdes. Et je crains d'être dans l'incapacité d'avancer.
— Tu tires des conclusions peut-être un peu précipitées, l'interrompis-je. Rien n'est encore fait. Tu n'as même pas eu l'occasion d'en discuter avec ta femme. Vous vous êtes disputés. C'était prévisible, mais tu ne sais même pas ce qu'elle en pense véritablement. Si ça se trouve, vous trouverez un terrain d'entente. Quoi qu'il en soit, cela ne devrait pas remettre en cause tes valeurs. Je suis persuadé que tu es quelqu'un de bien. Du moins, quand tu n'as pas un verre à la main.
Jungkook pouffa.
— Plus sérieusement, je suis certain que tu finiras par trouver ce que tu cherches.
— Tu crois ?
— J'en suis persuadé.
Un sourire précéda mes paroles. Il me le rendit, bien qu'il s'agît là d'un acte fait à contrecœur. Jungkook n'allait pas bien. Il cherchait à retenir les pierres d'un château qui s'écroulait par les secousses de ses erreurs passées.
— Je crois que je suis prêt à me séparer de ma femme, déclara-t-il. Le problème c'est que...
— Oui ?
— C'est que je n'ai nulle part où aller. Il n'est pas question que j'habite sous le même toit que ma femme. Elle ne me le permettra pas. Et jamais je ne lui demanderais de s'en aller. C'est moi qui décide de partir.
— J'imagine qu'il sera hors de question pour tes parents que tu retournes vivre avec eux.
— Je ne préfère même pas y penser !
— Et tu n'as pas un ami qui pourrait t'héberger ?
— Non.
— Je vois, soufflai-je. Je pourrais te proposer de rester vivre ici au moins pour quelque temps, mais je ne sais pas si tu accepterais mon offre.
— Tu ferais ça ?
Bien humblement, je haussai les épaules et hochai la tête.
— Je ne plaisantais pas quand je t'ai soumis la possibilité de rester ici.
— C'est vraiment très généreux de ta part, mais je ne voudrais pas...
— Je sais ce que tu vas dire, le coupai-je, mais tu ne m'ennuies pas. Entre ton travail et le mien, ce sera à peine si l'on se croisera. Alors, que tu dormes ici ou pas, je ne verrai quasiment pas la différence.
— C'est vrai, ricana-t-il. Mais je ne voudrais pas interrompre quoi que ce soit si tu venais à rentrer avec...
— Je ne te cache pas que ça risque d'arriver. Il y a des bouchons d'oreilles dans un des tiroirs de la salle de bain.
Dans un rire, Jungkook me fit une petite tape contre le genou.
— Si tu insistes, se reprit-il, il faudra que l'on convienne d'un loyer.
— On en discutera plus tard. Va d'abord voir ta femme. Ensuite on sera peut-être amené à parler loyer.
— Bien reçu.
Une étincelle de défi dans ses prunelles me poussa à lui rendre un coup de coude pour effacer ce sourire taquin de son visage. Enfin, je me décidai à me lever.
— Du café ?
— C'est gentil, déclina-t-il, mais je ferais mieux de m'en aller tout de suite si je ne veux pas me faire enguirlander par le patron.
— Aucun problème. Je te raccompagne ?
— Tu es le seul détenteur des clés.
— Suis-je bête !
Jungkook se leva à son tour. Il rassembla ses affaires tandis que je me rendis à l'entrée où j'y déverrouillai la serrure de la porte.
— N'oublie pas d'enfiler un pantalon, lui fis-je remarquer.
Ahuri, Jungkook jeta un œil à ses jambes toujours nues. Il enfila ses vêtements et me rejoignit à l'entrée.
— Bon, eh bien, à ce soir, me salua-t-il.
— Oui, à ce soir.
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𝐥𝐨𝐬𝐭 𝑠𝑢𝑘𝑜𝑜𝑘
Fanfiction« Donc, si je résume la situation, à seulement vingt-sept ans, tu vis avec la femme avec qui tu as eu une fille, tu es bientôt le directeur d'une grande entreprise, et malgré tout, tu ne penses pas avoir mieux à faire que de te laisser entraîner dan...