The Devil's Tears MC - Nix (sous contrat d'édition)

Prologue

Non. Non. Non !

En une fraction de seconde, un serpent glacé avait élu domicile en plein milieu de mes entrailles. Il se frayait un passage dans mon corps, à pleine vitesse, laissant derrière lui une traînée de feu, de douleur. De vide. À tâtons, ce putain de reptile semblait chercher quelque chose. Qu'est-ce qu'il voulait, merde ?

Je lui aurais volontiers indiqué le chemin droit vers mon cœur, à grand renfort de flèches lumineuses, si c'était ce qu'il voulait. Qu'il y injecte son venin, je n'en avais rien à foutre. Ressentir tant de souffrance sans aucune blessure physique n'était pas humain.

Faites que ça s'arrête !

J'implorai un dieu auquel je ne croyais plus. J'étais pathétique.

Les cicatrices, je connaissais, j'en avais plein. Mais comment pouvait-on faire cicatriser une blessure interne, invisible, nulle ?

Comme hors de mon corps au supplice, je me demandai de quelle manière une plaie imperceptible pouvait être monstrueusement plus difficile à vivre qu'un vulgaire membre arraché. Il faudrait que je pose la question à Stark, il s'y connaissait en amputation. Enfin, je le ferais si je sortais en vie de ce calvaire.

J'étais debout, physiquement sur mes pieds, ne montrant rien du tourment qui me ravageait. Les lumières braquées dans ma direction ne montraient que ce que je laissais paraître. La foule devant laquelle je me trouvais ne voyait rien de plus que ce que je montrais habituellement.

Rien.

Si je n'allais pas si mal, je crois que j'aurais ri. Comment pouvaient-ils être si aveugle ?

Un cataclysme me ravageait de l'intérieur. Personne ne le voyait, ne se doutait de quelque chose ? Apparemment non, ils étaient simplement là, assis ou appuyés contre les murs, à boire, fumer, faire ce qu'ils faisaient habituellement dans cette pièce.

Une voix que je ne reconnus pas sortit du fin fond de ma gorge. Elle était froide, trop calme, râpée. Menaçante.

— Répète ce que tu viens de dire.

Drink, le visage mouillé de larmes, secoua la tête comme une forcenée.

— Je... peux pas. (Ses jambes la lâchèrent soudain, et la jeune femme se retrouva à genoux au sol. Elle sanglota bruyamment, et ses ongles se plantèrent dans mes chevilles quand elle s'accrocha à moi comme à un pilier.) C'est...

Je n'écoutais plus. Une vague monumentale de colère sembla prendre racine en moi. Cette rage, si violente en comparaison de tout ce que j'avais pu expérimenter auparavant, n'était pas naturelle. Les galeries que le serpent avait creusées en moi se remplirent de cette émotion bouillonnante, ne laissant aucune cavité vide. Le peu de bonté que j'avais en moi disparut, laissant place aux ténèbres.

La fureur envahit mon organisme, mon corps enragé. Dévasté, mais pourtant si stoïque.

Inconsciemment, j'avais toujours su que ce moment arriverait. Celui où je perdrai complètement la tête, bordel.

J'avais l'impression d'être un cadavre.

Un cadavre vivant.

Un cadavre qui ressentait sa douleur, qui en était témoin, mais pieds et poings liés. Impuissant devant une telle ampleur.

— Il est où ? demandai-je de nouveau avec cette voix méconnue, trop râpeuse, trop instable.

Drink, entièrement plongée dans sa douleur, secoua simplement la tête. Pour la première fois de ma vie, j'eus envie de la frapper. Je n'étais pas une personne violente avec elle, mais je me fis cette réflexion. Pourquoi avait-elle le droit d'exprimer physiquement sa peine, jusqu'à en être invalide, alors que j'en étais incapable ? Pourquoi est-ce que c'était à moi qu'il incombait de gérer ça, toute cette merde ?