Chapitre 4 (3/3)

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Pearl 


Là. Le canon de son pistolet était , devant moi. Droit sur moi. À cinquante centimètres, tout au plus.

L'instant qui suivit dura une demi-seconde comme il dura des heures. Comme soudain libérée d'une entrave invisible, je réussis à faire bouger mes pieds ; je reculais comme une empotée. Mon coude se cogna contre quelque chose. Je clignai des yeux comme une démente, produisant probablement des sons inintelligibles, le regard braqué à cette arme qui pourrait m'arracher la vie en une fraction de seconde.

Je continuai mon calvaire jusqu'à ce que mon dos se plaque contre un mur étonnamment chaud, qui bloqua net ma maigre progression. Prise au piège, ma respiration s'emballa et je crus commencer à présenter les symptômes typiques d'une crise de panique.

Avec appréhension, je détachai les yeux de l'arme braquée sur moi pour chercher de l'aide dans le regard de quelqu'un. Mais comme si cette situation était totalement normale pour eux, les Tears présents semblaient simplement curieux. Abandonnant l'espoir d'une quelconque aide venant de leur part, je cherchais un visage familier parmi la masse qui semblait petit à petit se refermer autour de moi. Alarmée, je respirai aussi bruyamment qu'une locomotive à vapeur.

Clic.

J'inspirai brusquement devant la vision d'horreur qui me faisait face, les yeux écarquillés.

Le type venait de charger son arme.

Le cœur au bord de l'implosion, la vision flouée par les larmes de peur, de douleur et de panique, je ne parvins pas à déglutir. Le simple fait de respirer devint alors quelque chose de laborieux.

— Pearl !

Était-on en train de m'étrangler ? Pourquoi n'arrivais-je plus à respirer ? Je me forçai à prendre de grandes bouffées d'air, mais la sensation d'étouffement ne disparut pourtant pas, et mon champ de vision devint soudain sombre sur les côtés.

— Pearl !

Portant les mains à ma gorge, je défis à tâtons le foulard qui y était noué, avec l'impression grandissante que j'allais m'évanouir d'un instant à l'autre. Combien de temps pouvait-on rester conscient sans respirer ?

— Nom d'une pipe en bois, Pearl ! s'exclama une voix que je connaissais très bien.

Mais celle-ci paraissait... lointaine. En même temps, Drink était toujours coincée derrière le bar par Dead, la dernière fois que je l'avais vu. Donc tout était normal, non ? Respire !

Soudain, des bras puissants se refermèrent sur mes épaules, et une voix rauque chuchota à mon oreille.

— Pearl.

Je frissonnai.

— Merde, calme-toi, reprit la voix. Et Scar, baisse ta putain d'arme ! (Il y eut le frôlement doux d'une lèvre contre mon oreille, puis celui plus râpeux d'une barbe, tandis que l'homme à mes côtés ouvrait la bouche.) Respire, Pearl.

Je ne sus pas si Scar réussit à obéir à son ordre, mais je crois que j'eus du mal à obéir au mien. La gorge aussi serrée que si quelqu'un y avait enfoncé un bouchon, l'air ne parvenait pas à charger mes poumons en oxygène.

Ma tête tourna alors atrocement – à moins que ce ne soit parce que je tournais réellement –, mais, quoi qu'il en soit, je me trouvai soudain devant une paire d'yeux d'un noir profond, parsemés d'éclats dorés.

Un parfum hypnotisant m'entoura complètement. Les bruits autour de moi s'amenuisèrent jusqu'à finalement disparaître. Je vis les lèvres de Nix bouger, mais je ne compris pas ce qu'il essaya de dire. Comment était-il arrivé là ? Tanguant à gauche, puis à droite, une impression étrange traversa mon corps. Je me sentais atrocement molle. Mes jambes se firent tout à coup lourdes.

Je clignais des yeux. Une impression de faire ce geste au ralenti me parvint ensuite. J'étais à côté de mes pompes. Les lèvres au pli dur de Nix s'ouvrirent de nouveau, plus sèchement cette fois. Encore ici, je ne compris pas ce qu'il raconta. Ses sourcils se froncèrent, et il dit encore quelque chose. Qu'est-ce qu'il était beau ! Je regardai son bras se lever, pour finalement arracher mon foulard d'un mouvement qui me parut affreusement brusque. Oh, non ! Il ne fallait pas l'enlever, pas totalement. Le détacher, oui, mais le retirer en entier, non. Il devait rester autour de mon cou. C'était obligé !

J'essayai de tendre la main pour le récupérer, mais le geste fut trop rapide, ou trop lent. Quoiqu'il fût, un vertige accompagné d'une nausée me prit.

Puis ce fut le noir. Et je ne sentis plus rien du tout.

The Devil's Tears MC - Nix (sous contrat d'édition)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant