Qui de nous six?

Prologue

L'air étouffant de la voiture me donne mal à la tête. Les écouteurs aux oreilles et la musique à fond, j'essaie comme je peux d'atténuer le son de la radio, que personne n'écoute d'ailleurs.
Il fait chaud. C'est l'été le plus caniculaire que j'ai connu. En même temps, habitant sur Paris, je n'ai pas l'habitude des températures vraiment extraordinaires, en plus de l'air pollué qui devient vite étouffant. L'air des vacances va donc me faire du bien.

Comme tous les ans, mes parents organisent des vacances en famille, et comme chaque année c'est au même endroit, et attention ça fait rêver... la Bretagne ! Bon j'avoue c'est ironique, ce n'est pas la destination idéale.
Cependant, cette région offre beaucoup de choses que personne ne soupçonne et les étés ne sont pas si mal au final. Ce qu'il faut, c'est choisir le bon endroit. Il n'y a pas que des terres inhabitées ou une météo douteuse, il y a aussi des jolis bords de mer et des paysages incroyables.

Il ne reste plus tellement de kilomètres avant d'arriver à notre location. Il faut savoir que pour accéder à la presqu'île, il n'y a qu'une seule route et, au lieu de la faire en trente minutes l'hiver, on la fait en une heure et demie l'été, entourés de tous les vacanciers ou surfeurs qui vont vers le même petit paradis que moi.

Depuis que je suis toute petite, je vais au même endroit. J'ai tellement de bons souvenirs là-bas. Pourtant depuis quelques années, ça devient ennuyant. Grandir c'est ne plus savoir s'amuser avec un rien, alors forcément à mon âge, il est de plus en plus difficile de s'occuper.

Certes je me repose et respire l'air frais, mais ça n'empêche pas que je passe trois semaines sans internet. Sérieusement, je ne rigole pas, y'a pas de wifi ! Autant vous dire qu'à notre époque, ne pas avoir de connexion c'est insupportable, voire difficilement vivable quand on est accro comme moi. Être coupé du monde, c'est bénéfique de temps en temps, mais lorsqu'on revient à la réalité, et qu'on voit qu'on a loupé autant d'informations, on a l'impression d'avoir été absent pendant des années.

Du coup je me réfugie dans les livres. J'adore ça : lire sous le soleil brûlant de la plage ou sur les falaises face aux vagues. Ça fait rêver avouez.

En venant tous les ans pendant 16 ans, j'ai découvert chaque recoin de cette ville, sans même me trouver un seul ami que je pourrais revoir l'année d'après.

Vous l'avez compris, je suis plutôt timide et solitaire. Et pourtant j'aimerai pendant trois semaines que le temps s'arrête, que mon quotidien bascule. Je veux sortir de cet ennui et, pour une fois, découvrir le monde sous un œil nouveau, un regard que je ne connais pas.

Enfin ! J'ouvre la portière histoire de respirer un peu d'air frais et pour me dégourdir les jambes.

Le soleil tape, il est 15 heures. La même maison que d'habitude est face à nous ; elle n'a pas changé. L'herbe est sèche et le petit transat est toujours là. Je prends mon sac et ouvre la maison.

Ça sent le propre, elle a été nettoyée il n'y a pas longtemps. Les propriétaires ont dû passer.
J'aide à débarrasser la voiture et monte mes valises à l'étage, dans la chambre que j'utilise chaque année.

La pièce est sobre : un lit double, tout ce qu'il y a de plus simple, une armoire et un canapé.
Mes parents vont faire les courses et je décide de répartir les sacs dans les différentes pièces pour les avancer. Je monte ensuite dans ma chambre, défais mon sac et mets les vêtements dans l'armoire. Je range ensuite le seul livre que j'ai pris ainsi que d'autres bricoles.

Je n'ai pas conduit du voyage et pourtant, je suis crevée. Allongée sur le lit, je ferme doucement les yeux. Je respire alors cet air si pur qui m'avait tant manqué. Ici pas de building, ni des bruits de klaxon, ou de bus ou encore d'autres transports en commun blindés. Juste un environnement tranquille et une nuit calme. Un endroit qui me permet de rêvasser.
J'imagine un été différent des autres. Un été qui bousculera cette petite vie tranquille que j'ai toujours mené.