𝙲𝚑𝚊𝚙𝚒𝚝𝚛𝚎 1

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Voilà maintenant deux semaines qu'Eren avait été vendu et emmené au palais du prince pour lui servir de larbin. Malgré le peu de temps qu'il avait passé là-bas, il avait déjà été insulté, violenté, on lui avait craché dessus et on ne le nourrissait que deux à trois fois tous les trois jours. Les forces lui manquaient, mais malgré ce manque d'énergie il continuait à faire ses tâches comme l'on le lui demandait. Après tout, ce n'est pas lui qui allait contester quoi que ce soit.

Concernant sa relation avec son maître il n'y avait rien de spécial à dire. Il lui donnait des tâches plutôt simple comme tout bon maître donne à son serviteur — même si là on pouvait plus parler d'esclave — et contrairement aux autres membre du palais, ne l'insultait pas ni le battait.

Eren se trouvait dans les cuisines afin d'y préparer le repas du prince quand le père de celui-ci, le roi, le fit appeler dans son bureau. Le garçon s'y dirigea, bien que reticent à l'idée de se retrouver face à cet homme, et entra dans la pièce. Là se trouvait l'homme en question. Il était dos à la porte et regardait par la fenêtre qui se situait derrière son grand bureau. Quand il entendit la porte il se tourna vers Eren et l'invita à s'asseoir. Jusqu'alors, il ne l'avait jamais rencontré.

— Oh vous voilà. C'est donc vous que mon fils a réquisitionné de cette vente aux enchères ? Eh bien, ce que l'on dit sur vous est vrai, vous êtes affreux. Il s'approcha d'Eren et le scruta attentivement. J'ignore pourquoi Levi a choisi de vous acheter, mais ce qui est sûr c'est qu'il a dû tomber sur la tête. Avec cette tête-là vous allez faire peur à tous nos domestiques sans parler de nos invités.

Il marqua une pause.

— Peu importe. De toute façon, ce n'est pas pour ça que je vous ai fait venir mais pour vous demander un service. Dans quelques jours arrivera une famille d'aristocrates anglais. Ces derniers se rendent en Allemagne afin d'y investir leur fortune. Pour leur arrivée, j'aimerai que vous nettoyez le château de fond en comble afin que leur séjour ici soit agréable. Bien sur, vous ne devrez pas vous montrer à eux, je n'ai en aucun cas envie qu'ils fassent un arrêt cardiaque.

Bien que la tâche qui lui était confiée était plus que pénible, vu la taille et le nombre de pièces que comptaient le château, et que l'homme en face de lui n'avait cessé de l'insulter, Eren ne put qu'accepter. Il lui fit un léger signe de tête, se prosterna et partit reprendre sa tâche initiale. C'est à dire : préparer et apporter son repas au prince. Ce qu'il fit.

Il monta jusqu'aux appartements du prince, rentra dans sa chambre — après avoir frappé — et déposa son plateau sur une table se trouvant dans celle-ci.

Alors qu'Eren allait partir, Levi le vit et lui fit signe de rester.

— Merci, lui dit-il.

Eren, ne sachant que répondre, resta sur place en attendant d'autres paroles de son maître.

— Alors comme ça tu ne peux réellement pas parler, dit-il en se levant et en s'approchant du garçon. J'ai remarqué que tu avais de bonnes manières ainsi que du savoir vivre. Il y aurait-il un moyen pour que je puisse communiquer avec toi sans avoir recours à la parole ?

Cette question surprit Eren. Lui, un prince, cherchait à communiquer avec lui alors que tout le monde le rejetait à cause de sa laideur ? Il en fut touché. Il fouilla la pièce du regard avant de tomber sur un carnet et un crayon. Il arracha une page du carnet et prit le crayon en main et y inscrit quelques mots.

Je m'appelle Eren Jaeger et j'ai dix sept ans.

Levi s'avança vers la note et la lut à voix haute. Il semblait surpris que le garçon sache écrire. En général seuls les nobles et les bourgeois avaient accès à ces apprentissages.

— Eren. C'est un très joli prénom. Je suis heureux que l'on puisse communiquer par écrit, mais n'y aurait-il pas un moyen plus simple ? Comme... il réfléchit, le langage des signes ? Tu es muet non ? Donc tu devrais savoir communiquer par ce moyen.

Le visage d'Eren s'illumina. Effectivement, il connaissait le langage des signes. Sa grand-mère étant muette, il avait été forcé d'apprendre cette langue pour pouvoir la comprendre. Il répondit donc à son maître ainsi.

— *Oui je sais parler avec la langue des signes. J'ignore pourquoi un homme tel que vous s'intéresse à quelqu'un comme moi mais sachez que j'en suis touché.*

Levi lui répondit de la même façon.

— *Sache que c'est normal que je m'intéresse à toi. J'ai vu la façon dont certaines personnes te traitent et c'est inacceptable. Je ne tolérerai pas ça plus longtemps. Si tu as le moindre problème, si on te fait la moindre réflexion sur ton physique ou sur ton handicap, alors viens me voir et parle en moi. Je m'occuperai de les punir.*

Eren sentit que les larmes lui montaient. Il détourna la tête pour que Levi ne le voit pas ainsi, mais c'était peine perdue. Le jeune prince avait vu ses larmes couler. Il s'approcha lentement de lui et le prit dans ses bras. Une main dans le dos d'Eren, et l'autre dans ses cheveux, il lui murmurait des mots doux afin de l'apaiser.

— Chut, chut, répéta-t-il doucement. Il ne t'arrivera rien ici. Je serai là pour te protéger.

Il releva doucement la tête d'Eren.

— Arrête de pleurer veux-tu ? Ça te donne mauvaise mine.

Il essuya les quelques larmes qui avaient coulé sur les joues rougies du garçon, et l'embrassa sur le front.

— Merci pour ce repas. Il a l'air succulent. Ce soir quand les domestiques seront dans leur chambre et quand mon père sera dans ses appartements, je te demanderai de venir ici.

Eren, surpris, lui demanda pourquoi.

— Tu verras ça ce soir. Maintenant retire-toi et retourne travailler, dit-il toujours avec une voix douce.

Eren se retira donc, et retourna à son labeur, le sourire aux lèvres.

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𝚁𝚒𝚛𝚎𝚗 - 𝙻𝚎 𝚙𝚛𝚒𝚗𝚌𝚎 𝚎𝚝 𝚕𝚎 𝚕𝚊𝚒𝚍𝚎𝚛𝚘𝚗 Où les histoires vivent. Découvrez maintenant