VI

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Le paysage est sans vie, j'ai l'impression que ça fait des décennies que je n'ai croisé personne, le voyage commence à se faire long et j'ai de plus en plus faim. Mon lecteur de musique n'a plus de batterie depuis un bon moment et j'ai eu le temps de faire trois fois le tour de ma playlist.

Il ne me reste plus que le bruit lourd du vent qui frappe mon visage, qui me pique et me dessèche les yeux, ma courroie qui claque sans arrêt et le roulement de mes roues sur le goudron.

J'entends loin derrière le son d'une voiture arriver et sans vraiment comprendre pourquoi, sûrement car les voitures se font rares ici, je me tourne le temps d'une demi-seconde. C'est aussi pendant cette même demi-seconde qu'un craquement se fait sur mon vélo, le bloquant de tous ses mouvements, et ainsi, en pilant me projette sur l'avant. En un cri sourd, je passe par-dessus le vélo et tombe droit sur l'épaule, stoppant le vélo à mes pieds.

Sur le coup, ça fait mal et je ne peux plus bouger, tant ma respiration s'est coupée en chutant. J'entends un crissement de roues derrière moi. Le soleil m'éblouie, mes oreilles sifflent. Une ombre me sort de l'aveuglement et une silhouette se dessine.

— Petit, tout va bien ? Il me tend une main que j'attrape pour me relever, non douloureusement. Je t'ai vu tomber, c'était pas beau à voir. J'ai l'impression que la courroie de ton vélo a lâché, c'est sur qu'il n'est pas tout jeune celui-là.

J'essaye de bouger tout mon corps. C'est bon, rien de cassé, mais on ne peut pas en dire autant de mon pull et mon jean, tous les deux tachés de sang. Tant pis pour mon pull fétiche... Je touche mon épaule et retiens un cri de douleur.

— Tu es blessé, j'ai une trousse de secours dans le coffre, laisse-moi t'aider.

De toute façon, mon vélo est cassé et je ne peux pas marcher correctement, à quoi bon...

la falaise de la libertéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant