13. Mort à Azur

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Thomas et moi regardâmes Antonio entrer dans le temple, les mains dans les poches et l'air serein.

- J'espère qu'il ne va rien profaner, ou un truc du genre... » me glisse Thomas. Hier soir, en rentrant avec Jacob à qui nous avions préféré ne rien raconter, nous nous étions précipités tout dire à Antonio, qui avait écarquillé les yeux et exigé que nous retournions le lendemain même dans la ville. Il voulait contempler de ses propres yeux l'Oracle d'Azur.

- Viens, on va l'attendre dans le restaurant. » Nous étions venus bien plus tard, pour pouvoir faire visiter à Antonio, dîner et repartir. De la neige commença à tomber, et nous enfouîmes nos têtes dans nos capuches, puis commençâmes à marcher en direction du restaurant où nous avait emmenés Jacob hier soir.

- L'Oracle d'Azur... » Je me retournai en même temps que Thomas vers le couple qui venait de passer à côté de nous. Tous les passants que nous croisions ne faisaient que parler de l'Oracle, alors qu'hier ce n'était pas le cas. Nous poursuivîmes notre chemin.

Le couple qui tenait le restaurant avait lui-même été à Azur, et leur restaurant était très connu mondialement parlant. Il s'étendait sur trois étages, avec des terrasses qui, par ce froid, étaient chauffées abondamment avec des systèmes inventés par des Mages : les chaises étaient fabriquées en bois magique, imprégné de feu, et les nappes épaisses des tables pouvaient être utilisées comme couvertures chauffantes.

- Ah, vous voilà de nouveau ! » s'exclama la patronne, en nous voyant entrer. Comme hier soir, le restaurant était bourré de monde, et apparemment c'était pire en fin de soirée. Elle portait dans son plateau un plateau avec des tapas et avait une voix très rocailleuse « Vous pouvez monter au premier étage ; la terrasse, je suppose ? » s'enquit-elle malicieusement.

- Exactement ! » approuvai-je. Elle agita une de ses mains aux ongles vernis en rouge en direction du comptoir, pour ordonner quelque chose, puis nous fit signe de monter.

Nous nous installâmes à la même table qu'hier soir, sur la terrasse, et nous empressâmes de nous asseoir sur les chaises de feu, puis de nous couvrir avec la nappe chauffante. Nous étions protégés de la neige par un paravent, et le vent qui soufflait sur nos visages, au lieu de nous frigorifier, nous apportait une sensation agréable. La ville s'étendait en-dessous de nous, descendait le long de la rampe de pierres, et les bruits de pas des passants bourdonnaient derrière les voix des clients attablés autour de nous.

- Le voilà ! » m'exclamai-je en voyant Antonio sortir du temple, perplexe. Il nous chercha du regard, et nous dûmes l'interpeller à plusieurs reprises pour qu'il lève la tête et nous aperçoive. Il marcha jusqu'au restaurant, puis s'arrêta en-dessous de nous, la tête levée :

- Vous êtes devenus insensibles au froid ou quoi ? » demanda-t-il, lui-même emmitouflé dans son épaisse doudoune. Il monta quand même nous rejoindre, pour découvrir avec émerveillement les mécanismes magiques qui nous permettaient de nous réchauffer, et il accepta même d'enlever son manteau, après s'être assuré qu'il ne mourrait pas congelé.

- Alors ? Ton avis sur l'Oracle ? » lui demandai-je. Il regarda autour de nous, puis se pencha en avant :

- Je veux bien te croire, maintenant : la prophétie qu'il t'a dite était bien là. » Je jetais un coup d'œil inquiet à Thomas : mais de quoi est-ce qu'il me parlait ?

- Quoi ? » Il secoua la tête :

- T'es même pas au courant !

- Mais de quoi tu parles ? » m'impatientai-je.

Les Gardiens- A New WorldOù les histoires vivent. Découvrez maintenant