10 trèfles

27 3 0
                                    

« Ne m'appelle pas Victoire. Arrête de m'appeler Victoire ! Arrête de m'appeler tout cours ! » Elle cri, bafouille et reprends : « Arrête de me sourire ! Arrête de me regarder ! Arrête tout ! » Elle cri encore et encore.

Je vais buter ce connard s'il laisse son bras une seconde de plus. « Pourquoi tu ne veux pas que je t'appelle Victoire ? Tu sais que j'aime ton prénom. Ne m'enlève pas ça. Serieux, je ne vois pas où est le problème ? » Il lui dit et j'ai envie de lui en foutre une avec ses répliques à deux balles et puis, j'ai envie de lui en foutre une pour ce qu'il lui dit, tout cours, mais si quelqu'un l'apprend... et puis, elle est grande, elle peut se défendre seule. Et puis, il s'approche encore plus, et puis, elle le pousse mais il revient et puis, je ne sais plus vraiment parce que quand je sais de nouveau, on me tient à terre en me criant d'arrêter. « Nahel ! Nahel merde ! » Erwan me tient les bras et je le repousse en me relevant.

« C'est bon, ferme là. » Je lui crache presque dessus, le regard noir et la bouche sèche. Heureusement qu'il m'a éloigné de l'autre con parce qu'il aurait carrément fini inconscient, là. Enfin, il bouge un peu mais faiblement. Je ne devrais pas être content d'avoir des excès de violence tel qu'eux mais là, putain, je m'en réjouis. Je passe mes mains sur mon visage en pestant et je vois Stacy parler à ma petite brune dans le coin de la pièce. Ma. Depuis quand je dis ça ? Je vais aller prendre l'air, c'est mieux. Je raconte de la merde, je pense de la merde, je fais de la merde.

Je tremble et tout s'est passé trop vite. Je crois que je réfléchis trop vite. Je l'ai frappé. Putain de merde. Je passe mes mains sur mon visage et frotte les yeux. J'ai besoin de me calmer, juste... d'oublier. Alors pendant que tout le monde est en train d'aider ce con à se relever, je m'éclipse et sors du campus. Je me retrouve dans la rue, sans veste. En t-shirt en pleins hiver alors qu'il fait -encore, et j'ai l'impression que cela ne changera donc jamais- une putain de température négative. Je frotte mes bras et glisse ma main dans la poche arrière de mon pantalon, je n'ai plus rien.

« Tu peux me dépanner ? » Je demande. Il a l'air embarrassé, et il secoue la tête.

« Mec, tu m'en dois beaucoup trop. Je t'aime bien, petit, tu sais. Mais je te dépanne beaucoup trop souvent. Surtout en ce moment. » Il grimace en me tapant l'épaule.

« S'te plait. » Je répète, encore. « C'est la dernière fois. Je te jure. » C'est vraiment pathétique de devoir supplier quelqu'un pour avoir sa dose. Pathétique de trembler parce qu'on a absolument besoin de prendre de l'héroïne.

« La dernière fois. » Il dit et je me redresse directement. « C'est la dernière fois, après tu te démerdes.

- Merci mec. » Je lâche en me frottant les mains contre mon jean noir. « Seringue. » Je lâche avant même qu'il ne me demande et je le vois fouiller dans son sac comme s'il détenait toutes les drogues du monde. Il me lance le bordel et secoue la tête.

« Garde mon sac, deux minutes. » Je le vois s'éloigner et je me mets à réfléchir comme jamais je ne l'ai fait au paravent. Il m'a laissé son sac. Alors que je le vois en train de pisser, dos à moi, je me penche près de son sac et attrape quelques sachets. Il est dealer alors il en a beaucoup mais je ne pense pas que ce soit trop prudent de prendre une telle quantité dans son sac quand les flics rodent dans la ville. Je referme le sac directement après et glisse les paquets dans mon pantalon.

« Nous deux, on se connait pas. On ne s'est jamais connu. » Il lâche en revenant et il tire son sac sur son dos. Le regard qu'il me lance me glace presque sur place et j'hoche simplement la tête avant de partir de mon côté. Je continu à marcher, me rapprochant un peu plus du campus et je me laisse glisser contre un mur, dans une ruelle assez sombre. Il n'y a pas beaucoup de passant dans la rue. Il fait déjà nuit alors qu'il doit être aux alentours des dix-neuf heures. Je me gèle. Il ne remarquera que demain qu'il lui manquera quelques sachets, et je ne serais plus là. Tant mieux.

YOUNGOù les histoires vivent. Découvrez maintenant