Amanda Lee [tomes 1&2]

(5) Hacking

    — Agent Lee, vous êtes en retard.

La bibliothécaire du Campus me jauge d'un air sévère.

— C'est bien de vous proposer volontairement pour occuper ce poste, sermonne-t-elle. Encore faut-il respecter votre engagement en arrivant à l'heure.

Elle a déjà rangé ses affaires, visiblement pressée de profiter de la pause que mon remplacement lui offre. J'agrippe la lanière de mon sac à bandoulière tout en prenant soin d'afficher une mine penaude.

— Veuillez m'excuser.

Elle n'écoute même pas mes excuses, s'empressant de tapoter une pile de livre.

— Voici les ouvrages non-répertoriés que vous avez à classer, m'indique-t-elle.

Alors qu'elle s'éloigne déjà, je l'apostrophe.

— Madame ! Et quand j'aurais terminé ?

Ses talons cessent de claquer et elle se retourne vers moi.

— Eh bien vous partez, que voulez-vous d'autre ?

— Vu l'heure, ce sera le moment de la fermeture. Voulez-vous que je me charge de verrouiller la bibliothèque ?

Elle me fixe longuement.

— Ah moins que vous ne préféreriez revenir ce soir pour tout verrouiller, il n'y a aucun problème...  nuancé-je innocemment.

J'ai l'impression de discerner les rouages de son cerveau s'activer. Entre revenir sur place à dix-neuf heures seulement pour fermer quelques portes, et ainsi faire un trajet d'une vingtaine de minute entre son domicile situé dans la ville voisine et le Campus et rester chez soi... le choix est vite fait.

Elle se met à farfouiller fébrilement dans son petit sac à main pour en ressortir un trousseau de clefs. Elle le plaque sur la table dans un bruit métallique de clefs s'entrechoquant.

— Je veux qu'elles soient déposées au secrétariat directement après la fermeture. C'est bien clair ?

— Limpide, susurré-je en l'observant s'éloigner.

Une fois la porte du centre de documentation claquée, je consulte l'heure sur ma montre. Il me reste une heure. Sans un regard pour la pile de livres, j'attrape le trousseau d'un geste habile pour entreprendre un repérage. Pendant ma ronde nonchalante entre les ouvrages et les tables de travail, je dresse le constat suivant : au total, seuls cinq élèves sont présents dans la bibliothèque dont la majorité se situe dans l'aile ouest. Parfait.

Je reviens à mon point de départ, soit le bureau à la pile de livre et après un bref coup d'œil en arrière, j'ouvre fermement une porte discrète ignorée de tous au quotidien. Sans calculer l'indication « accès strictement interdit aux élèves », je pénètre dans un couloir immaculé, dont les néons fixés au plafond font réfléchir la blancheur du carrelage et des murs.