Amanda Lee [tomes 1&2]

(23) Rechigner à trahir

Deux jours plus tard
Un endroit secret, près de Londres
La Fourmilière

COMMENT EST-CE QUE J'AURAIS réagi, si on m'avait annoncée, dans une mansarde décrépie, après avoir été tenue en joue par un inconnu, que l'agence pour laquelle je travaillais était en fait une agence criminelle, que la fille que je croyais morte, existait toujours - en double d'ailleurs - et que je risquais de me faire torturer par un barge de directeur parce que j'ai failli découvrir son petit secret ?

Impossible comme question, n'est-ce pas ? Complètement délirant avec le recul.

Si je me la pose, c'est que c'est Laurie qui me l'a posée dernièrement - ou plutôt craché à la face, toujours sous le choc. Vu que je n'ai pas su répondre, je me la tourne en boucle, utilisant exactement ses termes, et j'en viens toujours à la même conclusion :

Je ne les aurais pas crû. Aussi simple que ça.

Évidemment, ils ont essayé de se réfugier dans leur refus d'y croire, en premier lieu, mais la vérité les a vite rattrapés, notamment lorsqu'ils ont découverts la Fourmilière. Ils ont bien été obligés de se rendre entièrement à l'évidence lorsqu'ils ont vu Dean, affaiblit. Et l'atmosphère grave et lourde de la salle du Conseil a sûrement achevé de les convaincre.

Lorsque je rentre dans la Cafétéria, je m'avance vers une table reculée, où Lana, Peter, Alma, Aspen et Laurie semblent être en pleine discussion. Cette dernière a l'air d'aller mieux. Hier encore, elle ressemblait à un fantôme égaré. Je pose mon plateau, et, avant même de me saluer, Aspen lorgne déjà sur mes rations militaires.

      — Tu as faim aujourd'hui ? demande-t-il.

Je le fixe un instant. Il m'a manqué.

      — Je te retourne la question, répliqué-je.

Je lui glisse mon assiette tout en m'asseyant.

       — Vous avez l'air d'aller mieux, souris-je.

Laurie me répond en un grognement. Je comprends qu'elle n'est, en fait, pas totalement rétablie. Ainsi rassemblés, j'ai l'impression de revenir des mois en arrière, à l'époque de nos réunions au lycée.

      — Et toi, comment tu vas Amanda ? demande Aspen.

La sincérité de sa question me laisse silencieuse un instant. Il n'y a que lui pour s'inquiéter de moi en un moment pareil. Je lui souris, espérant le rassurer.

      — Ça va.

     — Doreen veut nous voir tout à l'heure, déclare Lana.

     — Qui ça « nous » ?

      — Tous les nouveaux qui sont arrivés récemment à cause de cette histoire.

J'acquiese.