And then, it goes on

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La journée s'achève sous le signe de la bonne humeur. Malgré les préoccupations concernant la santé de Clémentine, on choisit toujours de voir le bon côté des choses. On élabore une stratégie pour que Clémentine ne dorme pas chez elle ce soir. Elle veut quitter son mari, mais je pense qu'il va être très virulent si elle apprend qu'elle le quitte pour quelqu'un. C'est le genre de mec qui ne supporte pas d'être blessé dans sa fierté d'homme. Alors qu'il vienne me voir à moi, je m'en fou, je vais le recevoir, mais j'ai surtout peur qu'il s'en prenne à Clémentine. Surtout ce que je ne comprends pas, c'est comment après des mois où Clémentine disparait subitement, ne le touche plus, ne l'embrasse plus. Comment un homme ne peut pas sentir que sa femme ne l'aime plus? Comment un homme ne peut pas se rendre compte que sa femme ne le regarde plus? Ne le désire plus? Il ne porte aucun intérêt à Clémentine, depuis des mois que je la connais, pas une fois il ne s'est posé la question du sourire de sa femme, de ses escapades nocturnes, pas une fois il ne lui a fait un cadeau, une surprise, pas une fois il a tenté de lui faire plaisir. Alors je comprends la crainte de Clémentine, celle qu'elle ne dit pas, mais qu'elle pense si fort que je l'entends. La crainte de devoir combattre un cancer avec un homme aussi égoïste comme compagnon, avec un homme qui n'est déjà pas capable de s'occuper d'elle quand elle va bien alors comment pourrait-il être à la hauteur de ses espérances et ses besoins quand elle va mal? Plus je la regarde, plus je l'admire. Rester avec un homme tant centré sur lui même seulement pour le confort de ses enfants. Elle est vraiment altruiste. Mais aujourd'hui, j'ai envi qu'elle se redécouvre en tant que femme. Qu'elle se rende compte qu'elle aussi a le droit au bonheur, et que pour rendre ses enfants heureux, elle ne doit pas forcément être malheureuse. Pour ses enfants aussi, elle se doit d'être heureuse. De leur montrer l'amour qu'il doit rechercher et mériter et non pas seulement celui duquel ils doivent se contenter. Olivier aime Clémentine, mais de son comportement il montre surtout qu'il n'aime personne plus qu'il ne s'aime lui même. Aujourd'hui, j'ai la chance que Clémentine se soit retourner lorsqu'elle m'a revu, j'ai la chance d'avoir développé avec elle une si belle relation d'amour, mais aussi une relation de confiance. Je me dis chaque fois que je la regarde, à quel point j'ai de la chance. De la chance de ressentir quelque chose d'aussi fort, quelque chose d'aussi spécial. Je vois tous ces gens qui prétendent s'aimer et je me dis qu'au final ce qui est beau avec notre relation, c'est que chaque journée qui passe nous rapproche, alors que les autres ça les éloigne. J'ai ce soucis permanent de faire de Clémentine une femme comblée. Alors je sais qu'elle est mariée, qu'elle est maman, et voilà qu'aujourd'hui elle est malade, mais au fond de moi je sais, que cet amour, c'est un amour qui ne meurt jamais. Je serai toujours là pour elle. 

Je ne vais pas mentir, c'est difficile de se projeter avec une femme qui a le double de mon âge. Je me suis toujours dit que je voulais des enfants, or je sais que Clémentine ne pourra plus en avoir, et je ne me sens pas prêt à vouloir être père dès aujourd'hui. Et puis tout est différent, le regard des gens, le jugement. Mais je m'en fou. Les gens pensent ce qu'ils veulent, qu'on est ensemble, qu'on est pas ensemble. Je m'en moque. Tout ce qui m'importe c'est elle. Son sourire, son rire. Sa fossette sur la joue quand elle se retient de sourire. Je sais que le jour où je vais l'annoncer à ma mère, elle va être très dure dans ses propos, envers moi comme envers elle, car elle va voir le côté légal de la chose, une prof qui couche avec son ancien élève. Comme si c'était que ça. Des fois, j'ai envi de garder toute cette histoire au fond de moi, car j'ai peur que ça finisse par abîmer ce que l'on vit. J'ai peur de la perdre, peur que le jugement des autres soit trop lourd, peur que ce cancer soit trop violent. Peur que la femme de ma vie me file entre les doigts. Parce que oui, c'est l'amour de ma vie. Et si je perds l'amour de ma vie je fais comment? 

Sans que je m'en rende compte, alors que je suis perdu depuis plusieurs minutes dans mes pensées, une larme roule sur ma joue. Clémentine me voit et me sert dans ses bras. Elle n'a pas besoin de me demander ce qui ne va pas, elle sait ce qui ne va pas. Elle sait que j'ai peur, même si je fais le fier, et le mec sur de moi. Mais j'ai honte, honte de pleurer devant elle, de montrer ma faiblesse alors qu'elle est forte, tellement forte. C'est elle qui a un cancer et c'est moi qui pleure. Je ne peux juste pas imaginer la perdre, je l'aime plus que tout au monde. 

Soudainement, alors que je l'embrasse en pleine fête foraine, un visage connu nous observe. Je reconnais la silhouette, la couleur de cheveux... OH PUTAIN. C'est Marie, la nièce de Clémentine. 

J'émets un mouvement de recul. Clémentine ne comprend, et au vu de mon air paniqué et crispé s'inquiète. Elle suit mon regard, et tombe nez à nez avec sa nièce qui nous dévisage sans comprendre. 

Les douceurs de la vieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant