la troisième fois fut la bonne

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Les pas foulent avec une tentative de délicatesse le tapis de branches et de feuille. Le souffle tremblant s'échappe des lèvres. Il n'est pas rassuré Glenn. Les bras sont tendus en avant. Les doigts serrés autour de l'arme. Le tous tremble légèrement à cause de la tension qui habite tous son corps. Depuis un certain temps le petit groupe de ravitaillement a dû se séparer. Une horde leur était tombée dessus. Trop nombreux. Trop dangereux. Rapidement T-Dog et lui se sont retrouvés séparés. Puis d'autres rôdeurs, une course éperdue et le voilà seul. Heureusement il sait où se trouve la prison, mais y arrivera t-il ? Il n'en a aucune idée. Chaque craquement de branche, chaque bruit étranger le fait sursauter. Le palpitant s'agite, cogne contre ses côtes. Puis il y a un cri. Bien humain. Plein de colère, de rage. Et quelque chose qui s'écroule dans les fourrés un peu plus loin. La curiosité le pousse en avant, alors que la peur l'incite à reculer. Quelques pas suffisent pour qu'il puisse voir la scène se déroulant un peu plus loin. Quelqu'un se tient vacillant sur ses jambes, une hache entre les mains. Les rôdeurs l'encerclent, bien déterminés à la dévorer. Mais qui que ce soit, il se défend malgré la fatigue qui pèse sur ses épaules. L'asiatique remarque quelques détails, qui lui semblent familiers. Une maigreur et une saleté impressionnante, bien qu'ils vivent une époque sombre. La hache, la lame affûtée captant un éclat de lumière. Puis la voix, qui murmure, grogne, insulte copieusement les cadavres ambulants. C'est la fille. Celle qui leur a permis de sortir de la cage il y a quelques mois de ça. Époque lointaine où le petit groupe courrait encore sur les routes. Époque qui semble révolu. Il aurait pu faire demi tour, s'assurant ainsi de tenir les morts vivants occupés. Mais Glenn se doute que ce ne sont pas les seuls des bois, et la prison est encore loin. Il se souvient le brun de quoi elle était capable. Légèrement cinglée sur les bords, mais pas une hésitation à tuer les deux hommes il y a quelques mois de ça. Qui se baladerait avec une hache pareille si ce n'est pas pour savoir s'en servir ? Et puis se le pardonnerait-il vraiment de la laisser seule ainsi ? Non, il le sait bien. Trop humain Glenn pour ce monde de merde.

Les poings se serrent brièvement sur l'arme, avant qu'il s'avance le plus silencieusement possible. Pas assez quand quelques zombies se tournent vers lui, et commencent à s'avancer en grognant. La fille l'a vu aussi. Elle ne baisse pas les bras pour autant, il semblerait presque qu'un regain d'énergie la traverse. Les coups sont distribués, chacun de leur côté. Les corps tombent. Puis le dernier. Pas le temps de discuter, que le jeune homme entend la jeune femme s'écrouler au sol, à genoux. Et s'il ne l'avait pas retenu, c'est le nez dans les feuilles qu'elle aurait fini. Les yeux clairs, gris-bleus, se posent sur sa main sur l'épaule décharnée, puis sur lui. Colère inexplicable. Si froide. Puis le dégoût. Pas envie qu'il la touche. Mais ils le savent tous les deux. S'il ne l'aide pas, elle restera là. Et cela signifie la mort. Le jeune homme tente de ne pas prêter attention à la saleté qui recouvre l'étrangère. Bras qu'il passe par-dessus son épaule, puis il se redresse entraînant le corps dans le mouvement. Les premiers pas sont quelque peu difficile, puis il s'habitue. Elle l'aide comme elle, traînant plus des pieds que de véritables pas. Pas la force de faire plus de tous de façon. Pas un mot échangé. Du moins ce n'est pas pour lui. Les lèvres abîmées de la jeune femme remuent dans un murmure dont il ne comprend pas bien le sens. Puis tous cesse. Brutalement. Silence pendant tout le trajet. Calme des bois, quelques cadavres ambulants. Et l'odeur. Celle de la jeune femme. Sang séché. Chairs putréfiées. Corps transpirant. Odeur douceâtre d'une chair infectée. Odeur de survie. Odeur d'apocalypse.


Alice au merveilleux pays apocalyptiqueOù les histoires vivent. Découvrez maintenant