Présent
Mes pas sont lents et particulièrement lourd. J'éprouve une sensation de déséquilibre, un peu comme si je ne savais plus réellement marcher ou si du moins je réapprenais. Mon impression première est d'avoir à porter le poids du monde sur mes épaules, pire encore je pourrais croire que je supporte l'attraction terrestre sans sa globalité avec mon petit corps affaibli et meurtri.
Peut-être que je n'ai pas besoin de réapprendre à me déplacer avec mes membres, mais plutôt que je suis dans la nécessité de redécouvrir ce qu'est une vie normale parmi les autres. Ce n'est pas facile à gérer comme situation. Un exemple tout aussi fou, demandez à n'importe quel adulte de réapprendre à conjuguer en espagnol après cinq années sans pratique et il vous dira que c'est n'importe quoi, et qu'il n'en a pas envie. Je suis un peu dans ce cas de figure. Je devrais pouvoir être en mesure de dire que je n'ai pas besoin de revoir comment est la vie en société, comment il est possible d'échanger librement et sans craindre avec autrui. Mais je ne suis pas comme tous le monde. J'ai envie de découvrir, mais pas réellement de temps pour... Si je veux me faire une place, même toute petite soit-elle et bien mon temps est compté. J'ignore combien de temps il me faudra mais je sais avec douleur que malgré toute ma volonté que ce sera long et voir périlleux pour moi. Cependant je dois m'accrocher, et surtout ne pas lâcher.
Mes yeux rivés sur mon GPS me confortent dans l'idée que j'ai de ma propre place au sein de cette société ; et ne pas regarder ce qui se passe autour de moi m'aide à me sentir comme dans ma bulle et m'éloigner des regards douloureux que les gens sont capable de m'accorder, du moins lorsqu'ils se rendent compte que j'existe. À cause d'eux je me sens douloureusement insultée, car ils semblent parvenir à agir avec naturel et simplicité, tandis qu'à l'inverse j'en viens à me poser je ne sais combien de questions juste pour acheter une simple baguette de pain. Voilà pourquoi je préfère accorder mon attention sur un fichu écran de téléphone, car il m'est impossible d'observer le monde et de m'en dépérir.
Mais lorsque je me rend compte que je suis arrivée à destination, mon cocon explose, et je me sens noyer sous toute cette anxiété que je gardais le plus à distance de moi.
Je tombe face à Anton plus vite que je ne le croyais. Il est vêtu d'un pull à capuche bordeaux, et il patiente le dos appuyé contre le mur, de ce que je comprend être le café. Son allure simple et élégante me frappe d'autant plus maintenant que je ne suis plus saoule et qu'il est éclairé par la lumière du jour.
Je m'approche toujours emplie de cette sensation d'instabilité, quand soudain ses grands yeux sombres se posent sur moi, munis d'un sourire à en faire perdre la tête plus d'une. —j'imagine—.
-Pas trop mal à la tête ce matin ? Me dit-il tout en riant.
-Non ça va. Dis-je avec un sourire timide sur les lèvres.
Oh si tu savais... C'est tout un orchestre qui tambourine et qui fait valser mes neurones.
Il m'invite à entrer dans le café avec galanterie, et nous guide vers une table non loin de la baie vitrée. Il me demande si la place me convient et puis nous nous installons face à face. Je suis rassurée d'avoir accès visuellement à l'extérieur, je n'ai pas le sentiment d'étouffer ni de suffoquer. Cette image me donne presque l'illusion d'avoir à ma porté une certaine échappatoire.
L'idée que l'on dirait presque un rendez-vous me traverse l'esprit, mais je me ravise... Comment puis-je croire une chose pareil possible ? Ce garçon beau comme un dieu, doit plaire à bon nombre de filles, et de loin des plus jolies que moi. Je sais que l'on ne choisit pas qu'il on aime, mais le physique agit beaucoup sur la capacité des gens à accepter de possible sentiment. Voilà pourquoi je n'ai attiré qu'un homme —fou— dans mes filets...
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Sous les néons (Tome 1)
Teen FictionL'adolescence, c'est le combat de chacun d'entre-nous. Cora, jeune femme ayant terminé ses années lycée l'an passé, a bien failli y laisser sa vie. Des pensées noires, du harcèlement et un ex petit ami bien trop malsain et pesant... Cora en a termin...