SUR LE PAS DE LA PORTE

3 0 0
                                    

[TW violence conjugale]


Quand il ouvre la porte de sa chambre, son ombre se projette sur le carrelage blanc du couloir qui traverse la maison. Il sort dans le couloir sombre, frissonnant au contact de ses pieds nus au sol froid. Mais il préfère rester pieds nus, ça glisse moins quand il courre.

Il baille, et frotte ses yeux soulignés de cernes prononcés. Ce mouvement rouvre la petite plaie sur sa pommette droite, et une goutte de sang coule le long de sa joue. Il a bien dormi pour une fois, même s'il ne s'est endormi que tôt ce matin, quand elle est partie pour le travail.

Il ne sait d'ailleurs pas quelle heure il est, probablement tard dans l'après-midi, basé sur le soleil tout près de l'horizon. Il ne connaît jamais l'heure précise ni la date, il n'y a pas d'horloge ou de calendrier qu'il pourrait consulter dans la maison. Ses seuls repères sont le soleil et les moments de départ et d'arrivée de Jeanne.


Le téléphone fixé au mur sonne. Il ne se pose même pas la question de qui c'est. Il sait exactement qui c'est. Il n'y a qu'un seul numéro qui peut appeler ce téléphone, et qu'un seul numéro que ce téléphone peut appeler.

« Bonjour mon amour, je vais faire les courses en rentrant du boulot, tu veux quelque chose ? De quoi faire un gâteau ?

- Oui s'il te plait...

- D'accord. Je rentre dans une petite heure. Je t'aime »


Il raccroche le téléphone hâtivement, et se précipite paniqué à la baie vitrée semi-transparente, et essaye de l'ouvrir désespérément. Mais c'était inutile, elle avait emmené les clefs. Idem pour les fenêtres.

Il tourne dans toute la maison, la peur au ventre, cherchant désespérément une issue.

Il entend les clés dans la serrure de la porte d'entrée. L'heure tourne plus vite quand on a peur.

« Tant pis... Au moins je n'ai pas besoin de cacher mes coups et bleus, vu que je sors jamais » Les années d'enfermement ont fait de lui un fou qui parle seul.

Il voit la silhouette noire de la femme qu'il a marié sur le pas de la porte. Elle l'a vu à la baie vitrée, et elle est furieuse.

Bricoles et ConfettisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant