3h - Penser que

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- J'aimerais qu'on parte sans prévenir personne. Vois pas ça comme une fugue, ce ne serait qu'une journée ou deux. Et on dirait à nos parents que l'un dort chez l'autre ou quelque chose comme ça. Dit Adam.

- On peut pas. Moi aussi j'aimerais échapper à toutes ces merdes mais on peut pas.

- Pourquoi? Parce qu'on nous l'a dit? Parce qu'on le sait? N'importe quoi.

Adam s'emportait.

- Vraiment n'importe quoi!

Il se redressa.

- J'en ai marre d'être étouffé comme ça. Je me noie Annie.

Et comme pour appuyer ses dires, quelques larmes coulèrent de ses yeux.

- Je me noie...

Cela ressemblait étrangement à un appel à l'aide, Annie le savait, mais n'y fit pas attention.

- J'ai besoin qu'on me sert fort Annie. J'ai besoin qu'on m'aime sincèrement.

- C'est pas moi qui suis sensée me dire ça?

Adam l'ignora.

- J'ai besoin qu'on me sert fort...

Adam pleurait.

- Mais pas parce que je le demande, j'ai besoin que quelqu'un vienne et me fasse un câlin parce qu'il en a envie, et j'ai besoin qu'on me montre que j'existe.

- Tu existes Adam. Je t'aime sincèrement.

- Je sais Annie. Je sais... C'est juste que...

Adam soupira, il cherchait ses mots.

- C'est compliqué.

- Tu n'oses pas le dire?

- C'est ça...

- Tu peux garder pour toi si tu veux. Mais je te connais, à un moment t'auras besoin de parler.

Adam remercia silencieusement Annie et se rallongea, sa vue était troublée par les larmes mais les étoiles ne lui parurent que plus lumineuse et la lune plus bavarde. Il allait en parler quand Annie le devança :

- J'aime la nuit. Les étoiles et la lune. J'aime les mythes derrière tout ça. J'aime l'ambiance qui règne. J'suis amoureuse de la nuit.
J'aime aussi le diable, les anges déchus. J'aime les couronnements. J'aime les petites attentions, j'aime les petits gestes. Tu sais Adam, même si je suis triste, il en faut peu pour me rendre heureuse.

- Annie.

Elle le coupa, et chaque fois qu'elle le coupait elle ignorait ses appels à l'aide. Au fond d'elle, elle le savait mais pensait ne rien pouvoir faire.

- Adam. Je peux pas pleurer. J'aimerais.

- Tu sais Annie, pleurer n'est pas marrant.

- C'est justement pour ça que je le veux. T'imagine pas à quel point je me sens lourde. J'ai besoin que tout ça sorte, peu importe si ce n'est pas marrant.

- Annie, je me sens mal. C'est horrible. Je pensais être sortie de cette passe mais l'impasse est des deux côtés.

Annie décida de le laisser parler.

- Je me sens piégé dans ma vie. J'ai plus l'impression de survivre, mais tu sais quoi? Au fond de moi, je me dis que c'est pas grave. Je me dis qu'il y a pire, je me dis que je vais bien.

Adam pouffa.

- Je me dis ça mais, regarde nous. Nous ne sommes pas mieux l'un que l'autre. Les amis dépressifs. Je t'admire Anus.

- On avait dit quoi pour ce surnom?

Adam sourit.

- J'étouffe Annie. J'ai besoin d'aide, j'ai besoin d'un câlin, un sincère. Celui avec beaucoup de sentiments. Les gens comprennent pas qui je suis, ils savent rien de moi au fond. Ils savent pas comment j'suis. Ils ont pas la même vision de moi que moi. C'est triste mais normal. Mais de ce fait, ils pensent me comprendre alors qu'ils ne font que se tromper. Ils pensent savoir qui je suis et donc pouvoir me laisser. Les gars j'ai besoin d'amour. J'ai pas forcément besoin qu'on me dise les mots, les attentions c'est parfait. Tu sais Annie, y'a des moments j'me déteste quand j'y pense.

- Pourquoi?

- Parce que je pense tellement que personne ne m'aime que quand quelqu'un me montre qu'il m'aime je comprends pas et ça me passe au dessus, mais après j'y repense. Et je me dis que j'aurais dû comprendre.

- On est pas tous parfait.

- On l'est tous à notre manière.

- Au moins tu fais pas partie des personnes qui comprennent pas le sens de « on a qu'une vie »

- Comment ça?

- Y'en a qui le prenne du mauvais côté, pour eux, "on a qu'une vie" veut dire : Autant ne pas faire d'efforts, si j'ai un problème alors autant le fuir. En plus, sans donner de raison, ils partent. Ce genre de personne faut les raisonner, mais généralement c'est aussi le genre à avoir des valises remplit de fierté. Ils feront jamais le premier pas, surtout pas si c'est eux qui ont merdé. 

- C'est franchement con d'avoir de la fierté, si tu tiens à la personne t'essayes de la retenir. J'aurai jamais de fierté pour les gens que j'aime. Parce que je les respecte, parce que j'ai peur de les perdre, parce que je ne veux pas qu'ils se sentent comme je me sens.

- Adam ta cigarette.

- Quoi ma cigarette? Aie, putain!

Sa cigarette avait était consumé par la nuit, par le vent, par la mer, par le temps, par la vie. La mort n'a pas pu tirer une dernière taffe, trop occupée à discuter de ses problèmes, de ses envies de mourir.

Aucune putain d'idéeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant