20 - Behind The Wall

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Comme à son habitude, Claire n'a acheté que des graines et des produits bio. Je farfouille dans les placards à la recherche de féculents, en vain.

 - Will ? T'as mis où les pâtes ?

 Le frère ne m'entend pas, trop occupé à récurer la salle de bain.

 Je grogne en réalisant que je n'ai plus rien de correct à manger. Plus de ramens. Plus de nouilles. Plus de riz...

 - Will !

 - Quoi ?

 - T'as acheté quoi la dernière fois que t'es allé faire les courses ?

 Agacé, il apparaît miraculeusement au bout du couloir :

 - Il reste des carottes. Et si tu n'es pas content, tu n'as qu'à les faire toi-même.

 Mister Grognon. J'avais oublié que Claire l'avait contrarié. Je crois que je le préfère encore quand il joue à être gentil avec tout le monde. Mais cela ne règle pas mon problème...

 J'hésite à retourner me coucher. Puis me souviens que je dois bosser Bach, ce qui m'amène irrémédiablement à songer à Corentin. Je l'imagine au piano, concentré sur sa partition. Les doigts parcourant les touches au rythme de la pédale qui se soulève.

 Je me secoue brusquement les neurones.

 Non, surtout ne pas penser à lui, ne pas penser à lui...

 C'est peine perdu, plus j'essaie de me changer les idées, moins mon cerveau semble enclin à obéir.

 Je décide finalement de prendre William au mot et sors faire des courses.

 Le supermarché le plus proche se trouve a dix minutes a pied. Sur le chemin, des étudiants de la même résidence que moi me saluent. Je fais profile bas, tente de ne pas me faire remarquer après la soirée plutôt bruyante de la veille. Puis réalise que j'aurais mieux fait de prendre un cachet : ce foutu mal de crâne ne semble pas vouloir me lâcher. Probablement le manque de sommeil.

C'est bien la dernière fois que je suis William dans ses plans foireux...

 Oui, Professeur Griffin, j'aime la musique, mais pas au point de finir la tête dans un étau. D'autant que je devrais être en train de me choisir un Bach, plutôt que de refaire mes stocks de bouffe. Est-ce que c'est ça que vous appelez vivre ? Parce que franchement, Robert est autrement plus passionnant qu'un rayon de croquettes... et que je n'ai pas envie de penser à des nouilles la prochaine fois que je devrai exprimer la grandeur de Dieu au clavier.

Même si Dieu a probablement inventé les ramen pour sauver les étudiants en déperdition...

 Je jette les ramen dans le panier. Récupère quelques boites de conserve. Du coca, histoire d'assurer ma survie. Ainsi que quelques légumes pour me donner bonne conscience. Je soupire en pensant à William qui n'a pas touché à son violon depuis son retour alors qu'il y a trois ans, il n'aurait pas passé une journée sans tirer l'archet.

 Je décide finalement de prendre une salade supplémentaire et des carottes, parce qu'il faut bien que quelqu'un le soutienne... Ainsi que des bières car je pense qu'il en a grand besoin. Je retourne dans le rayon, hésite quant à la marque à choisir : je ne me souviens plus de celle qu'il a achetée la veille. Apres cinq minutes de doutes, une personne me tend gentiment deux canettes.

 - Merci, marmonné-je en relevant les yeux.

 Corentin se trouve devant moi. Il acquiesce sans rien dire. Je le dévisage. Je ne sais pas pourquoi je me fige. Ni pourquoi il me scrute.

Genius Love [BxB]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant