CHAPITRE 15: Le test

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CAPTAIN MILLER

Il est une heure moins dix lorsque je me dirige vers la cellule d'Emma. J'attends cet événement depuis le début de la mission : dans 10 minutes, les chercheurs vont à nouveau tester le sérum. Emma ne sera pas la première à le recevoir, 5 autres individus ont eu la chance de tester le miracle crée par nos scientifiques ! Mais malheureusement, ils n'étaient pas assez forts, pas assez dignes pour survivre. Je place beaucoup d'espoir dans cette nouvelle tentative : les chercheurs ont fait beaucoup de progrès, aussi bien sur le sérum en lui-même mais également sur la préparation des sujets.

Christian, si l'expérience fonctionne aujourd'hui, tu pourras remarcher.

Je marche dans les couloirs du bâtiment d'un pas décidé et rapide : plus vite j'amène Emma au laboratoire, plus vite Christian récupèrera l'usage de ses membres inférieurs.

Lorsque j'arrive enfin au niveau des cellules des rebelles, je sens que l'atmosphère est plus lourde que d'habitude. J'écoute un moment et je remarque que le silence est assourdissant ; pourtant, la porte de la cellule d'Emma est ouverte, preuve que Lorenzo est là... D'habitude, je l'entends parler à voix basse ; mais aujourd'hui, quand je me place dans l'ouverture de la porte, j'assiste à une scène que je pensais inimaginable : Lorenzo pleure dans les bras d'Emma.

« - Lorenzo, ressaisis-toi s'il te plait. j'ordonne fermement

À cet instant, deux paires deux se lèvent sur moi et je perçois deux émotions différentes : Lorenzo me supplie du regard tandis qu'Emma est en proie à une panique la plus totale.

- Capitaine Miller, s'il vous plait ! Vous savez comme moi que le traitement pourrait la tuer, j'ai vu leurs cadavres ! J'ai vu leurs cadavres ! crie Lorenzo

En l'entendant crier ainsi, je flanche. Pour la première fois depuis le début de ma carrière je doute. Que se passera-t-il si Emma ne survit pas ? Est-ce que je suis prêt à sacrifier encore et encore jusqu'à que le sérum fonctionne ? Va-t-il fonctionner un jour ?

- Elle n'est pas l'une des leurs, je vous le promets ! S'il vous plait, elle est innocente ! Prenez-en un dans les cellules d'à côté ! continue Lorenzo

Innocente ? Je ne la crois pas, elle nous observait cacher derrière les arbres ! Mais au fond de moi, entendre un si bon soldat le dire à voix haute me fait la sensation d'une douche froide.

- Lorenzo... je suis désolé mais je ne peux pas. Ce sont les ordres. Ne rends pas les choses plus difficiles qu'elles ne le sont déjà ». Je murmure

Contre toute attente, c'est désormais à contre cœur que j'entre dans la cellule dans le but de saisir Emma par le bras et de la conduire jusqu'au laboratoire. Lorenzo, qui s'est relevé en un clin d'œil, tente de se mettre entre moi et sa protégée mais un regard mauvais suffit à l'écarter. J'évite volontairement son regard ; la situation est assez difficile comme ça, je ne supporterais pas de voir ses supplications, je ne supporterais pas de voir ses yeux emplis de haine et de dégout lorsque je fermerai les miens le soir. Je ne veux pas me souvenir d'elle comme ça.

Je m'avance encore un peu et la saisit d'abord doucement par le bras. L'espace d'un dixième de seconde, j'ai oublié à qui j'avais à faire : Emma se dégage brusquement de mon étreinte et se met à courir. Merde !

Je pousse Lorenzo et me lance à sa poursuite. Il ne me faut pas longtemps pour l'attraper à nouveau, et cette fois, je la tiens fermement. Emma se débat tel un lion enragé. Elle n'avait jamais été aussi violente. J'imagine que tout le monde donne son maximum lorsqu'on se retrouve face à une mort quasi certaine. J'encaisse sans broncher les coups, les ruades, les griffures et même les morsures ; c'est ma manière à moi de lui montrer que je me sens coupable.  Le trajet jusqu'aux portes du laboratoire ne m'a jamais semblé aussi long. Je n'entends pas les insultes que crie Emma, tout est flou. Je sais qu'elle me déteste et qu'elle me voit comme un monstre, un meurtrier peut-être même ! J'espère qu'elle sait que je suis profondément désolé. Je n'aurais jamais imaginé qu'elle subirait autant de souffrances, je l'aurais laissée libre sinon! J'avance devant la porte en poussant Emma devant moi. À peine nous sommes entrés dans la salle que 5 scientifiques s'emparent d'Emma et l'entravent, empêchant la jeune femme de se défendre. Elle me regarde avec un regard assassin et je sens ses insultes internes transpercer ma peau.

Dans la salle, qui est en fait un bloc opératoire, tout s'enchaine très vite : l'un des scientifiques prépare tout le matériel nécessaire alors qu'un autre enlève rapidement les vêtements d'Emma afin de lui enfiler une chemise d'hôpital. Emma est violemment attrapée par les scientifiques et installée sur la table d'opération. 4 des scientifiques la maintiennent tant bien que mal immobile tandis que le cinquième lui injecte le produit qui va l'endormir.

L'opération en tant que telle est très simple : les chercheurs vont sectionner manuellement la moelle épinière d'Emma au niveau des vertèbres lombaires. Ensuite, ils vont attendre qu'elle se réveille complètement de son anesthésie pour lui administrer le sérum ; il ne doit y avoir aucun résidu de l'injection anesthésiante dans son organisme pour ne pas troubler l'effet du traitement régénérant. Enfin, ils vont lui donner une pilule jaune qui l'endormira instantanément et qui lui fera oublier une partie des évènements proches. Je suis la personne en charge de la porter jusqu'au lit de sa cellule après cela.

Emma me regarde l'air de vouloir me dire quelque chose et comme subjugué par son regard, je m'approche d'elle doucement. Juste avant de s'endormir, j'entends ses mots auxquels j'ai toujours refusé de croire et qui vont me mener tout droit en enfer :

« - Je voulais seulement traverser la frontière. »

À cet instant, toutes mes certitudes telles que le bien et le mal, le bon et le mauvais, se sont évanouies, disparues à jamais. Soudainement, tout fait sens et je suis envahi par la culpabilité et la honte. Écœuré et en colère contre moi-même, je pousse la porte de toutes mes forces et fuis en courant. Je reviendrai ici bien assez tôt. 

How I survived: Partie 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant