De la neige en juillet

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Peut-on écrire un poème à partir de rien ?

Parce que c'est tout ce que j'ai ; du rien.

Du rien qui me serre la poitrine, qui m'étouffe, qui me fait monter les larmes aux yeux.

 Du rien qui avale tout, mon corps, ma pensée ;

Je ne suis que néant ;

Une ombre grise anthracite, un courant d'air glacé,

 C'est pire que d'être triste ou heureux.

Je n'ai pas de mot pour le définir.

C'est douloureux.

C'est pire que tout, c'est rien.

C'est pesant, ça m'empêche de parler, de voir, de sentir.

Je n'aperçois plus l'extérieur.

Je suis perdue à des milliers de pieds sous terre.

Je ne vois que des images du passé qui vont et qui viennent, 

Comme les vagues sur la mer.

Je n'entends plus que mon cœur

Qui bat tout doucement,

Comme quand on dort, quand on se meurt.

Je ne sens pas les larmes sur mes joues 

Qui coulent comme les gouttes de pluie d'un jour terne.

Tout est flou, tout est gris.

Il n'y a plus de Laurine, elle est partie.

D'elle il ne reste qu'un peu de bruit ;

C'est son souffle fatigué qui résonne dans la nuit ;

Ce sont des petits pas de souris qu'elle effectue machinalement, 

Tourmentée par son esprit.

Mais ce n'est rien, que des gestes mécaniques, vides de sens.

 Je ne la reconnais plus quand je la vois.

Je ne reconnais plus rien.

Tout est fade, pale, froid.

Je suis piégée.

Je ne peux plus sortir.

Je ne peux plus bouger.

J'ai mal sans rien ressentir.

La douleur lancinante traverse ce corps qui n'est plus le mien,

Elle creuse, coupe, détruit,

Dépose des taches lapis-lazuli 

Sur ma peau blanche, et malgré ça, je ne sens rien.

Je suis seule, seule dans le silence assourdissant,

Perdue à vingt mille lieues sous la mer. 

Je me noie lentement, dans ce supplice grandissant ;

Sans qu'on ne puisse rien y faire.

La petite voix qui appelait à l'aide 

Au fond de moi à elle aussi fini par se noyer, 

Elle était trop faible, sans intérêt ;

Ça ne sert à rien d'essayer.

Il n'y a plus d'espoir.

Je crois que je veux m'éteindre.

Un soir, sous les étoiles de juin, 

Arrêter de refléter tout ce vide qui refroidi l'été ;

Comme de la neige en juillet.

Car Je suis le rien.

Et je le resterai à tout jamais.

Adieux à l'Univers : À la dériveOù les histoires vivent. Découvrez maintenant