Is this the end ?

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De toute façon il n'y a plus que ça à faire.

Je n'en peux plus.

C'est beaucoup trop pour une seule personne.

On ne peut pas supporter tout ça, c'est impossible.

Des cauchemars, des souvenirs, des sensations, des images, de la violence, des gens, des coups, des reproches, de la culpabilité, du vide, des cris, de la solitude, de la douleur, du silence...

Du silence, tout le temps.

Je passe mes journées sans rien dire ; pas un mot, jamais.

Et pourtant Dieu sait que mon crâne est plein à craquer.

Mais mon cœur est vide, il aspire tout, les émotions et les mots au passage.

Je suis prise au piège.

Dans un corps qui m'étouffe, tout abîmé, tout rongé par la douleur, marqué de haut en bas, un corps qui ne semble pas être le mien.

Il est foutu, je le déteste de toute façon, je devrais peut-être le faire brûler plutôt que de le foutre en l'air, juste pour être sûre que plus personne ne s'amuse avec.

Mais j'ai pas le temps.

Je peux plus attendre, j'étouffe, j'étouffe et si je reste un peu plus, je vais finir par perdre la tête pour de bon.

J'ai fait traîner les choses suffisamment longtemps ; et ça m'obsède, c'est là tous les jours, tous les jours j'y pense, tous les jours je saute.

Et tous les jours je me dis que c'est la seule chose à faire.

C'est le bon moment, je suis seule, on verra rien.

Les gens ne me voient pas, ça ne changera même pas un centième de leur vie.

Je ne fais pas de bruit et je ne sors jamais, ça ne dérangera personne.

Moi-même, je m'en ficherais.

J'ai pas de famille et aucun ami, on verra rien.

Rien du tout.

Et si après dix-huit ans d'existence, le seul constat que je puisse faire c'est "rien", je sais de quoi je parle.

Il n'y a pas grand-chose à dire finalement.

Dix-huit ans de rien, de "pas grand-chose", ça fait long.

Et pourtant c'est tout ce qui me vient.

Rien.

C'est tout ce que j'ai.

Le silence.

Dans lequel je nage en permanence, le silence qui dégouline le long des murs.

Rien de plus.

Après tout, que suis-je ?

Je ne peux pas être réelle, c'est impossible.

Au mieux je ne suis rien,

Au pire je suis un objet.

Et, dix-huit ans à faire le porte manteau, ça, c'est long.

Je pense que j'en ai suffisamment sur les épaules maintenant.

Je suis épuisée.

Ça dure depuis beaucoup trop longtemps.

C'est insupportable.

Et c'est tout ce que je mérite.

Tout est de ma faute.

C'était de ma faute.

Je suis coupable et je m'en vais avec ma culpabilité.

Je ne pourrai jamais effacer toutes les marques que j'ai de partout, c'est impossible.

Je ne peux plus supporter de me regarder.

Je ne peux plus supporter mon corps, ma peau sale.

Je me dégoûte.

Je suis fatiguée.

Je suis fatiguée.

Ce sera un soulagement pour tout le monde, pour moi aussi.


Quand j'y pense,

Mettre fin à dix-huit ans de rien en plongeant dans le vide, c'est sacrément ironique.




Adieux à l'Univers : À la dériveOù les histoires vivent. Découvrez maintenant