Un Autre Monde

Chapitre 3 : L'impasse du chamboulement

- Ah bon ? Vous m'attendiez ?

Depuis quand des terroristes psychopathes attendent une simple adolescente qui n'aime en aucun point les Terriens ?

- Viens te joindre à nous.

Soit c'était une secte, soit c'était vraiment une réunion d'alcooliques anonymes !
J'allai donc m'asseoir sur une des chaises installées, telle une souris entourée de chats prétendant être végétariens. Un homme d'environ 44 000 ans, soit environ 40 ans, à la mâchoire carrée, qui semblait mener la réunion, planta son regard glaçant dans le mien et me dit d'un ton sec:

- Maintenant que vous êtes ici, vous êtes engagée et sous nos ordres. Pour l'instant, nous n'attaquerons pas les Terriens, nous nous ferons passer pour de simples civils et essaierons la manière douce, quelques petites manifestations (invention des Terrestres), essayer de convaincre le gouvernement d'arrêter tout ça. Mais nous essaierons de faire oublier les Ash, de tasser la tension qu'il y a. Et, ne vous inquiétez pas, si vous faites partie d'une des familles qui accueillent les Terriens, nous ne vous en tiendrons pas rigueur, vous n'avez pas réellement eu le choix. Notre objectif premier n'est pas de tuer les Terrestres, seulement qu'ils repartent sur leur planète, ou même si possible, qu'ils n'arrivent jamais. Alors avant tout, nous tenterons de pirater l'ordinateur de bord de la navette spatiale qui emmènera les Terriens sur Anone. Si ça ne fonctionne pas, nous ferons tout ce qui est en notre pouvoir pour les faire repartir, et bien évidemment, si ça ne fonctionne toujours pas, nous... enfin vous verrez.

Pourquoi est-ce qu'un simple « vous verrez » me faisait si peur ?
Je me mis à déglutir. Je réalisai tout à coup que ce dans quoi je m'étais emportée était bien plus grave que ce que je pensais. J'avais été totalement inconsciente de faire cela. Mon cœur battait la chamade et ma mâchoire était plus crispée que jamais. Et le pire était la façon dont me fixait l'homme au regard glaçant.

Je tiens à rappeler que mon plan était de m'infiltrer dans leur petit groupe afin de connaître leurs attaques et leurs plans, les dénoncer aux Ancés, tout cela dans le but de protéger le Terrien, que je ne connaissais même pas. Mais je n'avais pas pensé à l'alternative qui était que les Ancés nous grillent tous autant que nous sommes et m'arrêtent moi, aussi coupable qu'eux à leurs yeux. Et c'était inconcevable pour moi. En tous les cas, il fallait que j'en parle à mon frère, car malgré son jeune âge, il savait souvent me conseiller.
J'aurais pu en parler à Ave et Sem mais, pour ce genre de choses, je ne savais pas pourquoi mais je préférais me confier à Bemy. Même si je savais aussi que je raconterai tout cela à Ave et Sem à un moment ou à un autre.

J'avais pris soin de me concentrer sur ce que je pensais pour ne pas laisser qui que ce soit entendre mes pensées, et encore moins l'homme au regard glaçant.
Avant de nous laisser tous repartir, ce fameux homme nous prit tous à part un par un. Quand mon tour arriva, je me retrouvai seule dans une pièce fermée, sans fenêtre, juste de la lumière artificielle, une table et deux chaises. J'essayai de me calmer. Il s'approcha dangereusement de moi, et à ce moment-là, je ne pus empêcher mon coeur de s'emballer à nouveau. Mes mains se mirent à trembler. Il sortit tout à coup une lame, je dirais même une épée, immense, et qui semblait très aiguisée.

- Tu sais ce que c'est ?

Je fis « non » de la tête.

- Ça, c'est l'une des épées qui permet de nous tuer, nous les Anoniens. Et tu sais à quel endroit il faut la planter ?

Je fis à nouveau un signe négatif de la tête.
Il posa son doigt au dessus de ma poitrine et ma respiration devint plus rapide, beaucoup plus.

- Ici. Imagine-la te transpercer la peau, transpercer ton cœur et ta colonne vertébrale. Imagine-la ôter la vie à ton cher frère, Bemy. À ta génitrice, elle qui est si impatiente de recevoir le Terrien. Mais qu'est-ce que ça veut dire ? Qu'elle est pour l'Entente ? Penses-tu qu'on peut tolérer ça ? Contrairement à ton géniteur, qui lui, tout comme ton frère et toi, n'est pas du tout heureux de recevoir ce microbe.