Chapitre 4 : Toute une organisation

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- Le sentiment n'est pas partagé, lançai-je d'un ton sec.

Il maintint son sourire, malgré une étincelle qui s'éteignit dans ses yeux. Sa main resta tendue, attendant la mienne afin de la serrer. Quelques longues secondes s'écoulèrent avant que je ne cède et lui serre enfin la main. À son contact, un électrochoc parcourut tout mon être, je n'aimais pas ce sentiment, ou tout du moins, je ne l'avais jamais ressenti avant. Ma génitrice nous interrompit et me pris à part.

- T'es sérieuse là ? Je t'interdis de le laisser te vouvoyer et pire de t'appeler « Miss O » ! Qu'est-ce que ça voudrait dire ? Que tu es supérieure à lui ? Je ne crois pas !

(Bien-sûr que si.)

- Et puis ce serrement de main, là ! Si froid... Je refuse qu'il se sente mal accueilli ! Tu aurais pu y aller sur Terre, toi ! Tu aurais aimé que la famille qui t'accueille te fasse sentir que tu n'es pas la bienvenue ? Non ! Et il est le bienvenu ! Alors tu vas arrêter ça tout de suite et tu vas remplir ton rôle !

- Et c'est quoi mon rôle, au juste ?

- Tu le sais parfaitement ! L'accueillir comme il se doit ! Et n'essaye même pas de faire semblant lorsque je suis là et de le jeter comme un moins que rien lorsque vous n'êtes que tous les deux, ou avec Bemy, ou avec ton géniteur !

Je ne relevai pas. Je me contentai de me taire, mais je ne comptais pas pour autant laisser tomber à l'eau notre plan diabolique, à Bemy et moi. Nous retournâmes avec mon géniteur, mon frère, et... Cole-le-Terrien. Ma mère retrouva son sourire initial, rempli de joie. Tandis que moi, je retrouvai mon regard noir, et mon humeur maussade.

- Alors, Cole, tu viens avec nous ? demanda ma génitrice.

Il acquiesça et nous dûmes quitter cet endroit - où nous aurions potentiellement pu le laisser, au lieu de se le coltiner, mais malheureusement c'était la règle, c'était tombé sur nous et nous avions préféré accueillir un Terrien plutôt que de partir sur Terre. Une fois dehors, ma mère commença sa panoplie de questions.

- Alors tu viens d'où, sur Terre ?

Je me retins de lui rappeler qu'elle ne savait rien à propos de la Terre, et que même s'il lui citait un pays, elle n'aurait aucune idée de ce que cela représentait. C'est à ce moment que je me sentis fière car, contrairement à elle, je savais désormais ce qu'était un pays.

- Du Népal.

Ma génitrice ne comprit évidemment pas. Alors je m'aventurai sur un terrain qu'elle ne maîtrisait pas.

- C'est où ?

- Euh... hésita-t-il. Entre l'Inde et la Chine.

Je me remémorai le planisphère terrestre et j'eus un déclic.

- Oh je vois !

Un surplus d'euphorie s'était emparé de moi et je me rendis compte que l'humeur que je faisais paraître sur mon visage avait totalement disparu, alors j'affichai à nouveau ce masque maussade. Ils me dévisagèrent tous. Pourquoi avait-il l'air Afro-américain s'il venait du Népal, un pays asiatique ? Ce n'était tout de même pas pareil. Ma génitrice reprit:

- Et qu'est-ce que vous mangez, au Népal ?

Le Terrien hésita à répondre, encore une fois.

- Tu sais quoi ? On va directement aller au supermarché, j'espère que tu pourras trouver de quoi cuisiner les repas que tu as l'habitude de manger.

Il n'était pas très bavard, la plus longue phrase qu'il avait prononcé depuis que nous l'avions rencontré, était celle qu'il m'avait adressée. Alors mon frère et moi dûmes nous traîner jusqu'à cet endroit 100% terrestre, malheureusement. Nous parcourûmes les rayons du supermarché, et honnêtement, nous nous forcions tous, je dis bien tous, à faire des efforts pour ma génitrice. Dire qu'elle croyait faire plaisir au Terrien...

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