CHAPITRE 8 : Dame Blanche, déesse de la Nuit

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    La lueur d'un feu vacille dans les ténèbres de la forêt. Les soldats de Kork et leurs loups rassasiés y sont regroupés en cercle. A l'écart de la chaleur et des rires, les quatre prisonniers sont ligotés autour du tronc d'un saule, près des chevaux. Sa blessure au ventre le faisant souffrir, Titus peine à respirer :

- Mais qu'est-ce qui t'a pris ! Pourquoi as-tu emporté ce maudit casque avec nous ? tonne son grand frère.

- Je ne pouvais pas deviner qu'il attirerait l'ennemi jusqu'à nous, gémit Titus.

- Estime-toi heureux que tu sois encore en vie !

- Pour l'instant, murmure Hélène. Nos arcs et nos flèches sont avec les chevaliers et personne d'autre ne sait où nous nous trouvons actuellement.

- Je vous en prie, souffle Iphigénie, ne soyez pas défaitistes. Nous sommes ensemble ! On trouve solution à tout, non ?

- Oui. Sauf qu'on n'a pas affaire à une bête enragée cette fois-ci, remarque Ajax. Lilith de Kork est un ennemi redoutable...

- J'ai cru comprendre que tu lui plaisais, glousse son frère.

Sur ces mots, les deux filles prennent part dans la plaisanterie :

- Redoutable ? C'est le cas de le dire ! ricane Hélène.

Ajax jette un regard noir à Titus :

- T'as de la chance que je sois ligoté. Après tout, tu es déjà bien amoché, ironise-t-il.

*

La nuit est tombée depuis longtemps. La lune, presque pleine, éclaire de sa lumière blanche les Griffes Argentées. Des lucioles se faufilent à travers les arbres. Des grillons chantent sous les fougères. Un vent léger fait danser les flammes du brasier. Envoûtée par tant d'harmonie, à demi-assoupie, Iphigénie se remémore la chimère Azkar. Son pelage, ses yeux, ses crocs. Combien d'autres chimères hantent le pays ?
Le hululement lointain d'une chouette chevêche attire son attention. Un autre cri résonne dans les bois :

- C'est beau, murmure-t-elle.

Le bruit d'un battement d'ailes l'extirpe de sa rêverie. Iphigénie lève la tête et c'est avec surprise qu'elle aperçoit une chouette-effraie, posée sur la branche fragile d'un liquidambar. Des yeux, noirs et luisants sur une face blanche en forme de cœur, la fixent avec étonnement. L'oiseau penche sa tête d'un côté, comme s'il dévisageait la jeune princesse.
Soudain, il pousse un cri strident et rauque, imitant le murmure d'un spectre ! Effrayée, la jeune fille réveille Ajax :

- On dirait qu'elle va m'attaquer, s'inquiète-t-elle.

- Mais non ! C'est le cri habituel des chouettes-effraies. N'aie crainte, celle-ci se demande juste à quelle sorte d'oiseau elle a affaire.

- On dirait plutôt qu'elle se demande si je suis comestible, plaisante la princesse.

- Peut-être qu'elle a remarqué un mulot ou un campagnol dans les parages...

Un nouveau murmure sinistre réveille Hélène et Titus. Deux autres chouettes-effraies se sont posées sur un autre arbre à proximité. Les chevaux commencent à s'agiter. Un soldat vient aussitôt les calmer. Le feu continue de briller.
Ses yeux embués par la fatigue, Hélène distingue un trio de ces volatiles, en face d'elle :

- Il n'empêche que ces oiseaux se comportent de manière suspecte, souffle-t-elle. Y-a-t-il des nids dans le saule ?

- Je n'en vois pas, répond Titus.

Prince AtamoctéWhere stories live. Discover now