Le journal de Mathieu (10)

Jour 113

Je n'ai pas écrit dans mon journal depuis plusieurs jours. Je n'ai pas la tête à ça. Je trouve tout ce que je raconte tellement futile, au regard des événements. La situation est grave et je voudrais pouvoir faire quelque chose. Mais je me sens totalement impuissant, je ne sais pas de quelle manière je pourrais apporter ma contribution pour améliorer les choses.

— On y va ?

Aujourd'hui, c'est le premier jour des vacances de Noël. Et Sébastien veut que nous allions dans un centre commercial pour faire nos achats.

— Je t'accompagne, mais moi j'ai commandé la plupart des cadeaux sur Amazon.

— Pas de souci.

Je n'ai pas envie de sortir et de me retrouver dans la foule. Surtout que là, il va y avoir du monde. Mais Sébastien m'a souvent accompagné dans des endroits où il ne voulait pas aller, je ne peux donc pas lui refuser ma compagnie.

Après trois heures à courir dans les magasins, Sébastien a presque tout. Moi je me contente de porter les différents paquets.

— Et toi, Mathieu, qu'est-ce que tu veux ?

— Comment ça ?

— Bah, je préfère te demander. Je ne veux pas t'offrir un truc dont tu t'en fous.

— On se fait des cadeaux ?

Je suis très mauvais comédien. Ça fait un moment que j'ai commandé le cadeau de Sébastien, toujours sur Amazon. Je trouve ça presque vexant qu'il me demande ce que je veux. J'estime qu'on se connaît assez bien pour savoir ce qui ferait plaisir à l'autre.

— Je ne sais pas, je n'y ai pas réfléchi.

— Dis-moi ce qui te passe par la tête. Des fringues ? Un jeu pour ta console ?

— Fais-moi la surprise.

C'est évidemment la réponse qu'il ne voulait surtout pas entendre. De toute façon, peu importe ce qu'il m'offrira, ça me fera plaisir. Comme tout ce qui vient de mon meilleur ami !

Il faut que j'attende le vingt-trois décembre au soir pour découvrir mon cadeau. Je sais bien que je ne suis plus un enfant, malgré tout je suis excité à l'idée de recevoir plein de choses ! En fait, ce soir, nous ne serons que Sébastien et moi. Aux autres, nous n'offrons rien. Non pas parce qu'on ne les apprécie pas. Simplement, on a imposé cette règle pour ne pas se ruiner mutuellement. On garde notre argent pour organiser une super fête de réveillon du Nouvel An.

— Allez, je commence. Voilà pour toi.

Sébastien fait durer le suspense. Il regarde le paquet sous toutes les coutures. Il le secoue légèrement. Je pense qu'il sait ce que je vais lui offrir avant de déballer le truc.

— Une GoPro ! T'es complètement malade, ça coûte une fortune.

Ce n'est pas très classe de souligner ça. Il faut accepter les cadeaux que l'on se fait. Et puis, comme je n'ai pas de petit copain en ce moment, je me concentre sur mon meilleur ami. Lui au moins, il est toujours présent et il ne risque pas de me faire souffrir.

— Tu avais deviné.

— Ouais, je savais que tu allais choisir ça. Enfin, j'espérais.

Il me parle de cette caméra depuis des mois, donc il n'était pas super difficile de savoir comment lui faire plaisir !

— Et en fait, moi je t'ai pris ça, tu vas comprendre.

C'est emballé, mais ça ressemble à une enveloppe. La taille, le poids, pas de doute. Je ne comprends vraiment pas ce qu'il a en tête.