70~ Mourning in love (PDV KEN)

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-Sacha et moi nous nous sommes rencontrés à côtés d'un manège, mais la vérité c'est que je la voyais presque tous les soirs dans le bus,  elle ne m'avait jamais vraiment remarqué. Et d'un seul coup, je ne sais pas pourquoi mais on a appris à se connaître et nous sommes devenus amis. Avec le temps on a fini par être ensemble en secret et je dois avouer que ça m'a fait du bien.

Psychiatre: Votre adolescence vous a était comme volé par la mort de Malia, vous n'avez donc pas connue les joies de l'amour adolescent, le fait de se cacher, de s'aimer en secret. C'est peut-être à ça que vous pensez quand vous prenez du recul sur votre relation, vous avez vécue avec elle l'adolescence que vous n'aviez jamais eue.

-J'étais bien avec elle et c'est tous ce que je sais. Tout est allé très vite entre nous. Mes amis l'ont tout de suite apprécié et adopté, pour certains elle était la petite sœur qu'ils n'avaient jamais eu, pour d'autre la confidente que le succès avait toujours éloignée et pour moi c'était la fille qui me faisait me sentir vivant, celle qui me faisait garder les pieds sur terre. Maintenant qu'elle n'est plus là j'ai l'impression d'être perdu, j'me demande si j'existe vraiment.

Psychiatre: Le sentiment d'abandon entraine souvent une remise en question de sa personne et de son existence, vous vivez à l'évidence sa mort comme un abandon.

-Je le sais. Elle était celle qui m'accompagnait durant mes sorties nocturnes, celle  avec qui j'apprenais de nouveau à aimer. Lorsque j'ai appris qu'elle était malade je n'ai pas reculé, je voulais être avec elle, de toute façons c'était trop tard je l'aimais déjà. Quelques mois plus tard nous n'étions plus ensembles, nous nous sommes détesté avant de redevenir amis. Et c'est à ce moment qu'elle est partie pendant plusieurs mois. Nous nous sommes remis ensemble un moment après son retour, comme quoi l'amour triomphe toujours, au début tout allé bien, ça devait être la fin des traitements, la fin de la peur constante de mourir, la fin de tout ce merdier médical, mais au final ça a était le contraire la maladie c'était répandu et du jour au lendemain on est passé d'un amour éternelle à un amour éphémère.

Psychiatre: C'est bien de mettre des mots là-dessus, vous m'avez dit qu'elle était partie. Comment avez-vous vécu ce moment?

-J'ai ressenti de l'abandon, de la peur et de la haine. Personne n'avait de nouvelles, personnes ne savait où elle pouvait être. Lorsqu'elle est revenue nous sommes tous retombé brutalement sur terre, j'avais une nouvelle copine que je n'aimais pas, qui ne me correspondait pas. Je voulais qu'elle remplace le vide que Sacha avait laissé en moi, mais elle n'y est jamais parvenue. C'est seulement quelques mois plus tard que j'ai compris pourquoi elle avait agi ainsi.

Psychiatre: Pourquoi?

- Nous pensions que nous pourrions rester amis, mais c'était impossible, on s'aimait trop pour ça. Elle est partie pour cette raison mais aussi parce qu'elle ne voulait pas me faire revivre ce que j'avais vécu avec Malia.

Psychiatre: Pour vous sa mort a était plus ou moins douloureuse que celle de Malia?

-Plus, je l'aimais comme...

Psychiatre: ...comme un adolescent.

Je la regarde d'un air interrogateur en attendant qu'elle développe sa pensée:

Psychiatre: Vous aimiez Malia, mais vous saviez déjà qu'elle était condamnée alors vous avez pris toutes ces charges sur vos épaules, vous avez affronté cette situation comme un adulte. Avec Sacha vous êtes partis du principe qu'elle irait mieux alors vous vous êtes autorisé à l'aimer comme l'ado qui avait disparu en vous depuis Malia.

-Maintenant cet ado est mort, je vue la femme que j'aime agoniser dans un lit, je l'ai vu devenir un squelette avec un cœur qui battait à peine et se détériorer chaque minutes un peu plus.

Psychiatre: Je suis contente que vous abordiez ce sujet par vous-même, c'est bon signe. Expliquez-moi, comment est-elle morte?

-Dans son sommeil, cela faisait 5 jours qu'elle ne quittait plus son lit, je dormais sur un matelas dans sa chambre pour rester avec elle, sauf cette nuit-là. Elle n'arrivait pas à trouver le sommeil alors nous avons parlé une bonne partie de la nuit.

Psychiatre: parler de quoi?

-Je ne sais plus.

Je le savais et ça la psy l'avait compris, je me souviens de chaque mots que nous avions échangé ce soir-là, cette discussion est tatouée en moi. Nous avions parlé de mon avenir sans elle.

-Je n'ai pas envie d'en parler.

Psychiatre: D'accord, alors je vous en prie continuez.

-Je me souviens que son odeur me chatouillait les narines, que sa tête était posée contre mon cœur et qu'elle comptait les battements de celui-ci à haute voix jusqu'à s'endormir. Le matin je me suis réveillée, mais pas elle.

Psychiatre: Qu'est-ce que vous avez ressenti?

Quand j'ai vue qu'elle ne bougeait pas j'ai pleuré en demandant à dieu pourquoi il me faisait ça à moi. J'ai pris mon téléphone sur la table de nuit, j'avais oublié le numéro des pompiers, ma vision était floue et mon cœur battait à cent à l'heure pendant qu'il se brisait en mille morceaux. Un vide douloureux et immense naissait dans mon ventre. Dans le camion sa peau était encore tiède, elle n'était pas morte depuis longtemps. Je m'en suis voulue de ne pas mettre réveillé plus tôt pour pouvoir l'embrasser une dernière fois...A l'hôpital ils m'avaient annoncé que c'était trop tard, qu'il n'avait rien pu faire alors je me consolé en me disant qu'elle était la fille la plus courageuses que je connaisse, elle avait accepté son sort, sa mort. J'ai appelé tout le monde. Adèle est arrivée et la première chose qu'elle a fait c'est de pleurer en courant dans les bras de Doums, me rappelant une fois de plus que Sacha n'était plus là. Ce soir-là ses parents nous ont rejoint, Adèle a demandé à sa mère si elle pouvait appeler sa fille Sacha en hommage, les larmes de la mère  ont redoublées d'intensité. Comme les miennes d'ailleurs, j'ai ressenti un vide douloureux dans mon ventre, une flamme dans mon crane. A ce moment je savais que cette fois je ne m'en remettrais pas, je n'arrivais pas à me dire qu'elle était morte, que je ne la reverrais jamais avec sa peau rosée par la vie.

Je voulais expliquer tous ce que je ressentais, ce que j'avais ressenti, mais j'ai simplement dit:

-Je crois que ce sera tout pour aujourd'hui.

Le manège de ma vieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant