La peur

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La journée passe à une vitesse incroyable, qui me convient tout à fait. J'attends le soir avec impatience et sourit dans le vide, contente qu'en plus, ma douleur soit totalement passée. Séréna n'arrête pas de me dire de bien penser à toutes mes affaires avant qu'elle ne vienne.

Je ne lui ai pas encore dit que ma sœur peut savoir à chaque minute où je me trouve. J'avoue que ça m'inquiète un peu. Mais heureusement, les vampires n'ont pas la capacité de se téléporter, alors j'ai le temps avant qu'ils ne viennent me chercher. S'ils viennent me chercher. Je n'en suis même pas sûre.

La dernière sonnerie. Enfin. Je fourre mes papiers dans ma pochette, je n'en ai plus rien à faire au final, je vais changer d'établissement. Je sors un des croissants de ce matin. Ils sont un peu secs mais je m'en moque. La bonne nouvelle m'a ouvert l'appétit.

Je salue Séréna avant de partir vers l'arrêt de bus.

- Ben attend!

Je me retourne. Séréna me sourit et me fait la bise avec une facilité qui me cloue sur place. C'est la première fois que je fais la bise à quelqu'un.

- À ce soir! fait-elle toute joyeuse.

- À ce soir.

Et je repars. Est-ce que je me suis fait... une amie?

Séréna est-elle ma première amie? C'est bien trop tôt pour le dire. Mais je serais ravie de l'avoir comme amie.

Je termine deux croissants et patiente à l'arrêt, musique dans les oreilles, en train de m'imaginer toute sorte de scénario possible. Je suis une sorcière. Je n'arrive pas à le croire.

Moi qui pensais que j'étais humaine! Ils le pensent tous d'ailleurs! En revanche, je ne comprends pas pourquoi je ne suis pas un vampire moi aussi. Si le gêne est totalement génétique, j'ai de quoi me poser de sacrées questions.

Mais j'ai vu les tests de mes yeux. Mes parents sont bel et bien les miens. Je ne comprends vraiment pas.

Enfin bref. De toute façon, ce n'est pas en me torturant l'esprit que je vais avoir des réponses.

Le bus arrive. Je passe ma carte et m'assois au fond du bus 3, plongée dans mes pensées, à côté d'un homme.

Je souris comme une idiote. Je suis vraiment satisfaite de cette journée! La bonne nouvelle! Je vais enfin pouvoir me barrer de chez moi! Avec Séréna!

- Ai-je le droit de savoir ce qui vous met dans cet état?

Je sursaute violemment en tournant la tête à gauche.

- Monsieur??!

Le prof d'italien. Shit.

- Vous prenez ce bus?

- Si j'y suis installé, ironise-t-il en écartant les bras.

Je détourne le regard. Le brouillard autour de lui s'est intensifié, je le vois avec plus d'intensité. J'hésite à lui demander si c'est un vampire. Mais j'ai trop peur de passer pour une folle. Déjà qu'il ne m'aime pas. Et que c'est réciproque.

- Vous avez de cicatrices sur le poignet, remarque-t-il.

Je retourne vivement mon bras pour cacher les cicatrices de ma première (et j'espère dernière) morsure de vampire.

- Oui.

- Un chat énervé?

- Oui.

Qu'est-ce que ça peut lui faire, à ce vieux schnock?

On ne dit plus rien de tout le trajet. Au bout d'une demi-heure, j'appuie sur le bouton stop et me lève pour me préparer à sortir.

Monsieur Capeoni me retient vivement par le bras. Mon cœur se serre et commence à battre à toute allure. Ses yeux perçants, verts, plongent dans les miens. Il sourit d'un air mauvais.

HumaineOù les histoires vivent. Découvrez maintenant