Chapitre 4

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(même pas relu, sorry, j'ai pas eu le temps...)

Le trajet avait été long. Très long. Pour moi qui n'étais jamais parti hors de ma région, pas plus loin qu'une journée qu'une journée de marche, huit mois en bateau s'étaient avérés éreintants. Rien ne m'avait jamais paru plus insurmontable.

Les premières semaines s'étaient bien passées, j'avais découvert peu à peu mes camarades, au moins ceux qui étaient sur le même navire que moi. Je m'étais lié d'amitié avec quelques-uns. Tous avaient été arrêtés pour des vols, des dettes ou d'autres petits délits. J'avais eu peur de devoir partager mon dortoir avec un meurtrier, j'avais rapidement été rassuré. Je n'avais cependant pas pensé devoir le partager avec des cochons et des poules. Pour survivre aussi longtemps en mer, il nous avait fallu des provisions très importantes. Provisions qui dormaient, mangeaient et vivaient avec nous. Et faisaient leurs besoins dans la même pièce.

La maladie était apparue au bout du deuxième mois de voyage. Elle avait commencé à se déclarer sur des cas très isolés, avant de se propager plus rapidement. Une cinquantaine d'hommes étaient morts avant de voir les côtes de la nouvelle terre que l'on nous avait promise. Leurs dépouilles avaient été balancées par-dessus bord, pour éviter la contagion. Dans le dernier mois, ce sont vingt hommes qui sont tombés malades. J'étais plutôt proche de certains d'entre eux, pas suffisamment pour compenser le dégoût et la peur de ce qu'il leur arrivait. Qu'aurais-je pu faire pour eux ? Rien, je le savais. Peut-être aider leurs esprits en peine à s'apaiser un peu avant d'entamer une autre traversée. Mais je ne l'ai pas fait. L'un d'entre eux, un tailleur qui avait arnaqué beaucoup de ses clients, m'avait appelé une fois. Je devais traverser la cabine infirmerie. Il m'avait vu au loin et m'avait hélé, de sa voix mourante pour me proposer de jouer aux cartes. Il voulait un dernier jeu, avant de partir. Après tout, on jouait nos vies au hasard sur ce bateau. Ce qui allait arriver en Nouvelle-Galles du Sud était aussi incertain que la carte que l'on allait recevoir.

Je repensais tous les jours à ce que j'avais abandonné sur le vieux continent. Pas grand-chose à vrai dire. Pas de famille, pas d'amis, sauf peut-être Irving. Pas d'argent non plus. Je commençais à me demander si je n'aurais pas mieux fait de faire mes quelques années de prison avant de reprendre ma vie ordinaire. Je réalisai que j'en aurais pour bien plus de temps sur cette nouvelle terre. Qu'allaient-ils nous faire faire ? On racontait qu'ils voulaient faire de nous des fermiers. Je n'avais jamais travaillé la terre de mes mains. D'autres disaient que c'était un piège pour nous laisser mourir sur cette île déserte, pour libérer notre Albion des malfaiteurs. Je n'avais jamais été un homme parfait, mais je n'avais pas commis de crime suffisamment cruel pour que l'on souhaite me tuer. Et pourtant... Je sentais quelque chose pousser en moi. Je tentais de le contenir, de ne pas le montrer. Petit à petit il grapillait des centimètres, caché tout au fond de mon être. C'était de plus en plus dur d'y faire face. Au fur et à mesure des mois il avait pris de l'importance.

- Terre !

A ce simple mot, je m'étais laissé envahir par la plus grande, la plus puissante et la plus orageuse des peurs de toute ma vie.


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