Partie 7

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Cette soirée avec Khadija fut belle. J'ai surtout retenu en elle, l'image d'une femme douce et attentionnée, qui aime la vie, qui aime rire et qui a une personnalité imposante. Khadija est d'une beauté rare, d'une grande sensibilité. Elle était très à l'aise avec moi. Je l'avais accompagné jusqu'à sa porte puis s'en suivi un "au revoir" bien timide. Un petit bisou sur une joue bien douce, son parfum était envoûtant, j'étais bien tenté, mais l'image de Samia mon premier et unique amour s'interposait toujours. Je la voyais à chaque fois que je fermais les yeux. C'est avec le cœur plein de souvenir et de nostalgie que j'étais retourné. J'avais l'impression d'être surveillé par Samia, j'avais l'impression de fauter à chaque fois que je faisais un compliment à Khadija.
Le lendemain, je peinais à quitter le lit, j'avais rêvé de Samia. On marchait ensemble à la plage. Un lieu si symbolique pour nous. J'avais juste envie de continuer ce rêve mais tout fut interrompu par mes camarades de chambre. Abdou est de ce genre de personnes qui peinent à parler à voix basse, je ne lui en veux pas c'est sa nature. Il est surtout la seule personne capable de soulager mon stress, de me retirer de mon isolement, de mon silence mortuaire. Il voulait surtout que je lui raconte ma soirée avec Khadija, il considérait cette sortie comme un rencard, moi non, un simple moment de détente amicale.
À la première occasion j'avais cherché à retrouver Samia sur les réseaux sociaux, mes recherches n'avaient rien donné. Toute cette situation m'a permis de comprendre à quel point ça fait du bien de pleurer, de laisser couler une pluie de larmes pour noyer son chagrin. Un visage maquillé de chagrin sans larme est un triste tableau. On reste figé dans son coin, mine endeuillée à penser comme un fou. Le vide laissé par une personne qui compte est dure à supporter. La distance qui nous sépare de ceux que l'on aime est comme une punition. On aurait aimé gardé tout prêt de nous ceux qui donnent un sens à notre existence. Samia à laissé en moi un vide que rien ne peut combler. J'ai l'impression d'avoir cessé de vivre, je n'arrive pas à donner un but à mes actions quotidiennes. J'aurai aimé partager tout ce que je fais avec elle, chaque belle parole que j'entends, toute musique qui me plais, chaque endroit où je vais, à quoi bon sourire si elle n'est pas là pour répliquer. Quand je pense à elle je sens l'air si lourd à chaque inspiration, une épine me pique le cœur sans que je ne puisse la retirer. Est ce la vie qui est injuste, j'ai tellement prié Dieu qu'Il me permette de la revoir, ne serait qu'une seconde mais je me dis qu'Il est occupé à régler des problèmes plus important. Je suis sans doute fait pour souffrir toute ma vie. Je n'arrive pas à faire le deuil de cette relation brisée d'une manière injuste. Je me sens si léger, je suis comme une plume qui vacille au moindre coup de vent... J'ai perdu mon équilibre.
Des jours passaient. La routine recommençait et c'était ainsi jusqu'à la fin de l'année scolaire que j'avais conclus avec une si brillante réussite qu'une structure francophone m'offrit une bourse entière et une prise en charge totale de mes études en France. Mon départ était prévu pour le mois de Septembre. Ma première réaction fut d'aller rendre visite à Abass en prison afin de lui apporter la bonne nouvelle.
Une fois à la Maison d'arrêt et de correction, les mines ont changé quand j'ai demandé à le voir. "Abass est décédé la semaine dernière, il souffrait de fièvre jaune, son corps est encore à la morgue " Il paraît que sa famille refuse de faire le déplacement. Elle lui en voulait pour son passé obscure. J'étais comme paralysé, l'image de notre belle complicité défilait dans mes pensées sans que je ne puisse avancer un mot. Son enterrement était prévu dans l'après-midi. Comme s'il m'attendait je suis entré pour le voir une dernière fois. C'était la première fois que j'étais si prêt d'un mort. Allongé, le visage pâle, des yeux entre-ouverts tout propre dans un linceul blanc qui lui enveloppait le corps. Il avait l'air plus jeune. Si seulement on pouvait choisir, le plus triste dans cette vie, c'est le fait qu'on a pas le choix de notre destinée, on devient. Il n'était pas fier de son passé, de ses actes qui l'on mené en prison, il avait une vie de remords, moi j'étais fier de l'homme qu'il était devenu. Le plus important dans la vie, c'est
De reconnaître ses torts, changer, se donner une seconde chance, non pas pour être parfait, mais pour exprimer le meilleur de nous même. Le meilleur d'entre nous est imparfait, nous apprenons de nos erreurs.

Mon sang fit un tour quand l'imam recouvrait son corps de terre. J'étais sa famille, j'ai surtout compris que je n'étais pas présent par hasard. C'était un signe, il ne m'avait jamais abandonné, j'ai surtout regretté de n'être pas venu plutôt. Les prisonniers n'ont pas de visite médicale régulière et souvent dans leur pire souffrance les gardes disent qu'ils simulent, ils sont souvent conduit trop tard à l'hôpital. Et malheureusement c'était le cas pour lui.
J'étais rentré à Dakar meurtri, plein de désarroi. Parfois on en veut à la vie d'être si singulière, on vit avec des personnes qu'on peut perdre à tout moment. Personne n'a le contrôle malheureusement. Exprimez votre attachement aux personnes qui comptent pour vous avant qu'elles ne partent à jamais. Dieu nous sépare sans nous prévenir, Il est le seul à avoir ce droit légitime. Il est le sage, le Puissant, celui qui comprend notre passé, notre présent et notre futur.

Hommage à SERIGNE MAKHTAR NDIAYE dit Elliote un ami d'enfance parti des suites d'une fièvre jaune.

La magie du Premier amourOù les histoires vivent. Découvrez maintenant