Le soir de l'apéritif géant organisé par mes parents, je stressais grave. Mais genre, quand je dis "grave", c'est, genre, "grave grave grave"! Limite, je portais des assiettes, je tremblais tellement qu'elles pouvaient tomber par terre et se fracasser, si bien que mes parents m'interdisent de faire quoi que ce soit pour les aider. Je suis donc allé voir Alphonso, histoire de patienter que les invités arrivent. Mais surprise! lorsque j'arrivai à l'épicerie, Blondinet était là. Boum, nouveau coup de foudre. Mes jambes tremblèrent et mes mains devinrent moites. En entrant dans le magasin, je dis à l'intention de Jonas, ironique :
- Ouah! Tes parents t'ont laissé sortir seul! Je n'y crois pas! Alphonso, pince-moi, pour voir si je ne rêve pas.
Jonas me jeta un regard noir qui me pétrifia. Il ne répondit néanmoins rien et continua de plonger ses mains dans les barils de graines de café. Ne sachant que faire, je restai planté au beau milieu de l'épicerie, les bras ballants, sous le regard moqueur et attendri du vieux Al. Je murmurait alors en me tournant vers la sortie :
- Bon bah moi je vais partir hein bisou.
- Attends! objecta Jonas -ce qui me fit sursauter en m'affublant d'une crampe au ventre.
Je me retournai vers lui et Blondinet me fixa dans les yeux. Il avait ses cheveux blonds en pétard, c'était la première fois, et j'ai tout de suite aimé ça.
- Je viens avec toi.
Arrivés à la ferme, les parents de Jonas arrivèrent en courant vers nous et prirent violemment leur fils dans leurs bras en criant en allemand :"On a eut tellement peur! Ne disparais pas comme ça petit voyou!". Jonas regardait le vide d'un air exaspéré et moi, je riais, cette situation saugrenue était vraiment drôle, le pauvre.
Ses parents étaient vraiment collants, ils l'étouffaient et ne le laissaient pas en paix, suivaient ses mouvement à la loupe et ont même engagé quelqu'un pour s'en occuper et le promener -comme un chien! Jonas ne pouvait pas aller et venir comme il voulait, je pense que c'est pour cela qu'il resta tout le long de l'apéritif avec moi pour mon plus grand bonheur, je suis bien obligé de l'avouer. À un moment donné, il resta fixé sur des figues pelées. Il me regarda d'un air dégoûté et demanda ce que c'était."Des figues."
Il haussa les épaules. "J'en ai jamais mangé. Ça n'a pas l'air bon."
- C'est pourtant délicieux ! dis-je. Je les préfère quand je les cueille tout juste de l'arbre.
- Tu m'y emmènes?
Je sursautai : c'était la première fois que Jonas voulait aller quelque part avec moi, seulement moi, sans que ses parents l'y obligent. Nous nous fixâmes dans les yeux.
- C'est loin. annonçais-je.
- Pas grave. contrecarra Blondinet. J'ai vraiment envie de partir d'ici, j'en ai marre des vieux.
J'éclatai de rire.
- Très bien. On va prendre ma Vespa.
Sur la route, il s'accrochait à moi de toutes ses forces avec ses petits bras frêles, enfonçant sa tête casquée dans mon dos. Sentir ses bras autour de mes côtes me rendait heureux ; cela me donnais l'impression que Jonas me protégeait.
Arrivés au pied du figuier, je m'élançai dans l'arbre d'un bond afin d'aller cueillir les meilleures figues pour Jonas. Lorsque que je redescendis du tronc, Blondinet pouffa.- Quoi? Qu'est-ce qu'il y a ?
- Tu es plein de feuilles! répondit-il en m'époussetant les cheveux de sa petite main blanche, que j'eu envie tout d'un coup de l'attraper et de l'embrasser.
Je me mis à sourire. Je pelai la figue et la lui enfonça dans la bouche. Jonas émit un petit gargouillis et l'avala. Ses yeux s'écarquillèrent :
- C'est trop bon Scheiße!
J'éclatai de rire et lui enfonçai son casque sur la tête. Il tutiba, surpris, mignon, et je l'entraînai sur ma Vespa.
Je l'ai emmené sur la plage afin de profiter du coucher de soleil. Romantique et niais.
Nos pieds foulèrent le sable chaud et fin, je courus dans l'eau tout habillé sous les cris de stupeur de Jonas. Je l'invitai à me rejoindre.- Tu es fou! répondit-il. Je vais être tout mouillé.
Il bougonna. Je me relevai d'un coup et marchai jusqu'au rivage. Arrivé à la hauteur de Blondinet, je l'attrapai comme un sac à patate -comme mon père faisait quand j'étais petit- et le jetai à l'eau. Jonas émergea de la surface en crachotant et en me maudissant en allemand. Il essaya de me couler en vain et nous remontâmes sur la plage trempés, fatigués mais heureux. Nous nous allongeâmes côte-à-côte sur le sable. Puis, Jonas fit un truc qui me surpris totalement : gelé malgré l'air chaud qui soufflait sur nous, il se blottit contre moi.
VOUS LISEZ
Juste le temps d'un été
RandomComme tous les étés, Silvio, dix-sept ans, passe deux mois en Italie dans la ferme de sa famille. À l'ombre des mouches et des vaches, il va faire la rencontre improbable d'un Jonas. Juste le temps d'un été.