Chapitre 9

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Je n'avais donc pas eut le choix : Jonas avait déjà enjambé la fenêtre et descendu le long du tronc du chêne qui jouxtait ma chambre. Je le rejoignai à contre-coeur et nous partîmes dans la nuit noire. Jonas me guidait, il semblait savoir où il allait. On ne voyait rien dans l'obscurité, mais Jonas me souriait et son sourire faisait office de réverbère. Je tremblais, Jonas me serrait contre lui, il me faisait autant d'effet qu'une grosse polaire en temps de canicule.
Arrivés au centre-ville, nous nous extasiâmes devant la fête qui battait son plein : des jeunes! La piste de danse était remplie de jeunes! Mon blondinet s'y précipita, me forçant à danser. Mais mon niveau de danse étant comparable à un pingouin qui marche, je n'avais pas envie de me ridiculiser devant Jonas. Il me saisit les mains et me fit tournoyer.

- Allez, danse Silvio, danse!

J'eu un petit sourire gêné en voyant les gens nous regarder : certains plissaient les lèvres pour ne pas rigoler, d'autres nous jetaient des regards dégoûtés tandis que le reste s'extasiaient devant notre couple.
Un groupe de garçons nous reluquaient, un verre à la main. J'étais très mal à l'aise mais Jonas semblait ne pas s'en apercevoir, tellement il était plongé dans sa danse. Je lui pris les poignets et l'écarta de la piste de danse.

- Qu'est-ce que tu fais ? me demanda-t-il violement.

- Je suis mal à l'aise Jonas. lui avouais-je.

Il me fusilla du regard : il n'y avait aucune trace de compassion dans ses yeux. Il croisa les bras sur sa poitrine, tapa du pied et cria :

- Tu as honte d'être avec moi!

- Non non pas du tout! lui assurais-je.

- Tu as honte d'être avec un garçon ! cria-t-il encore une fois. Tu as honte de danser avec un garçon ! Tu ne m'aimes pas!

Il me tourna le dos comme un enfant qui ferait un caprice. Je lui entourai les épaules et lui murmurai :

- Jamais. Jamais tu ne penses ça de moi, ok? Je t'aime et puis c'est tout. J'ai pas honte, je suis juste... pas prêt.

Jonas se retourna et me fixa dans mes yeux. Malgré la nuit, je pouvais voir ses prunelles grises briller.

- Mais moi, moi je suis prêt. J'ai pas envie de cacher d'être avec toi.

Je fondis et le serai fort dans mes bras. Il me demanda si on pouvait y retourner, j'acceptai et il me pris fortement la main, comme s'il croyait que j'allais m'échapper.
En entendant les premières mesures de "Vivo per lei", Jonas empoigna mon bras en disant nerveusement, genre, l'air hyperactif :

- Viens viens viens une chanson douce je veux danser avec toi dessuuuuus !

J'éclatai de rire et, sous les regards des autres danseurs, j'enroulai mes bras autour des hanches de mon blondinet tandis que lui s'accrocha à mon cou. Je me mis alors à chanter avec le chanteur en changeant les "lei" par "lui", j'espérais que Jonas comprendrait le message, mais plaqua alors sa main contre mes lèvres et ordonna :

- Arrête de chanter. Tu gâches tout.

J'éclatai de rire : Jonas disait toujours ce qu'il pensait, sans filtre. Des fois, cela pouvait faire mal, mais j'étais aveuglé par mon amour pour lui.
À la fin de la chanson, il annonça qu'il avait faim. Il me prit la main et nous nous dirigions vers un kiosque rempli de nourriture. Après être rassasié, Blondinet décida qu'on devait se balader dans les rues de Recanati.
Il enlaça ses doigts avec les miens. Un silence s'installa alors entre nous, ainsi qu'une tension. J'avais une boule dans ma gorge qui se formait, je savais que Jonas essayait de me dire quelque chose.

- Je vais bientôt retourner en Allemagne. annonça-t-il enfin.

Je me tournai vivement vers lui.

- Dans combien de temps exactement ? voulus-je savoir.

Jonas haussa les épaules et murmura :"J'ai pas envie d'y penser."
Je le forçai à me regarder.

- Jonas. dis-je. On va s'écrire, ou s'appeler. Rester en contact. Ne t'en fais pas.

Il hocha la tête, l'air vaguement convaincu. Il me sourit alors et récita en français :

- T'as de beaux yeux, tu sais?

Je ris et répliquai :

- Embrassez-moi.

Ce qu'il fit avec fougue. Cela me surpris, mais je me laissais faire. Ses mains froides parcourèrent mon dos, l'affublant de frissons. Jonas embrassa mon cou et je pus sentir l'odeur de ses cheveux blonds, une odeur dont je me souviens encore. Un parfum d'Italie sur un petit Allemand. Ce dernier commença à sangloter dans mon torse, et tout ce que je trouvai à faire fût de lui tapoter le dos. Jonas s'accrocha sauvagement à ma chemise, la mouillant de larmes au passage. J'essayais de le réconforter, mais rien n'y faisait. Quand il se décolla de moi, j'étais trempé. Mon Blondinet s'essuya les yeux et me demanda d'une petite voix si on pouvait rentrer à la maison.

Oui, bien sûr.

Arrivés devant son gîte, Jonas hésita : les lumières du salon étaient allumées, ses parents étaient sûrement encore éveillés, à attendre leur petit fils chéri. Le blondinet me demanda :

- On peut aller chez toi?

- Non, répondis-je, tes parents sont déjà assez inquiêts comme...

- On va chez toi! ordonna-t-il.

Je n'osai pas désobéir. Nous entrâmes dans ma chambre par la fenêtre (c'est pratique d'avoir un arbre en face de la chambre en fait), la maison était plongée dans la pénombre, silencieuse. Des craquements pouvaient se faire entendre, et je faisais semblant d'avoir peur pour amuser Jonas. Je me mis en caleçon et m'allongeai sur mon lit, le corps tout en sueur à cause de la chaleur. Jonas s'installa à côté de moi et couvrit mon torse de baisers, que je rendais à mon tour. Soudain, notre étreinte devint de plus en plus frénétique et Blondinet monta à califourchon sur moi.

Au petit matin, je fus réveillé par un rayon de Soleil qui léchait mon visage. J'étendis le bras à côté de moi, mais tout ce que je sentis fût les draps froids et fripés qui avaient gardé les traces du corps de mon blondinet. Je me frottais les yeux afin d'effacer l'image de Jonas tatouée sur ma rétine. Je m'apprêtais à me lever, quand je vis le corps volumineux de mon père assis sur ma chaise de bureau. Je poussai un cri :

- Putain papa ! T'es fou tu m'as fait peur!

Il me fixa méchamment.

- Silvio. Il faut qu'on parle.

Juste le temps d'un été Où les histoires vivent. Découvrez maintenant