12. Derrière toi!

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Alex! Que s'était-il passé? Pourquoi avait-il crié? Ça ne lui ressemblait tellement pas.

Je restai pétrifiée au fond de mon carton, ne sachant pas quoi faire. Devais-je aller l'aider en prenant le risque de me faire étrangler par les mannequins? Ou rester cachée ici, mais laissant mon frère entre leur mains?

Je ne pouvais pas céder à la panique maintenant. Je devais me calmer, réfléchir, peser les pour et les contre et... Soudain, j'entendis à nouveau ce cri déchirant, qui ne pouvait venir que de mon frère.

Je n'avais pas de temps à perdre. Alors, je bondis de ce carton en prenant appui sur les corps gelés et m'élançai en direction des cris, sans véritablement mesurer le danger que j'encourais.

À peine la porte franchie, je remarquai que le magasin était en partie éclairé - ce qui me surprit, étant donné que je n'étais restée que quelques minutes dans la chambre froide. Mais l'éclairage n'était pas  d'une incroyable utilité; il n'y avait qu'un spot sur cinq qui diffusait une lumière pâle.

C'est alors que je compris; les mannequins avaient tout le contrôle du centre commercial. Je frissonnai, car ils étaient absolument capables de tout. De nous laisser mourir de froid comme de chaud, ou de nous éblouir jusqu'à ce qu'on en devienne aveugles. Et je savais qu'ils ne tarderaient pas à en profiter, si ce n'était pas déjà fait.

Mais ce n'était pas le moment de penser à cela. Je me faufilai donc à travers les rayons, en essayant de situer où étaient les mannequins.

Ils n'étaient pas très rapides, car après quelques secondes, je les aperçus. Ils ne devaient être qu'à une dizaine de mètres d'eux.

J'eus tout à coup peur qu'ils m'aient entendue. Alors je me plaquai contre le rayon, en retenant mon souffle. Discrètement, je commençai à les fixer, mais ils ne semblèrent pas m'avoir remarquée. Je pus donc continuer à les observer du coin de l'oeil. Et après un instant, je remarquai que leur problème n'était pas leur vitesse mais plutôt leur sens de l'orientation. Ils ne savaient pas où aller, ils étaient perdus.

Ils tentaient tous de négocier pour aller dans des directions différentes mais les deux autres n'étaient jamais d'accord et chacun montrait du doigt un rayon, totalement à l'opposé des deux autres. C'était vraiment n'importe quoi.

Au fond, voilà ce qui m'effrayait les plus chez eux; ils n'avaient pas d'expression et ne communiquaient pas, ils restaient tous silencieux mais étaient en fait de redoutables tueurs. Tous capables de vous étrangler, et par la suite de vous traîner jusqu'à la chambre froide, sans que vous ne puissiez rien faire pour vous défendre.

Mais pourquoi est-ce que les vendeurs, les caissiers ou bien même le directeur du centre commercial lui-même ne disaient-ils rien? Sûrement pour ne pas perdre leur clientèle. Malgré tout, de quel droit s'autorisaient-ils à laisser Mathias se faire maltraiter à longueur de journée, dans un recoin sombre du magasin, loin des yeux des clients? Ou alors personne ne le savait? Est-ce que Mathias se cachait?

Je n'en savais absolument rien. Et même si je le savais, les mannequins ont de toute façon eu ce qu'ils voulaient; ils ont pris la vie à ce pauvre petit sans défense, à qui il ne restait déjà plus rien.

Au lieu de le pleurer, je me ressaisis d'un coup; ils ne vont pas tuer mon frère. S'ils osent toucher si ce n'est qu'un seul de ses cheveux, ils vont devoir avoir affaire à moi. Je vais devoir faire preuve de bravoure, de ruse, de rapidité, de force, et j'en passe. Je vais me transformer en une véritable guerrière carnassière, qui n'hésitera pas à aller chercher une tronçonneuse pour pouvoir réduire en pièces tous ces maudits mannequins!

Je regardai mes mains; je tremblais comme une feuille. Tu parles d'une guerrière! Ces mannequins me faisaient tellement peur! Tant pis, la vie d'Alex était peut-être en jeu, je n'avais pas le choix.

Sans plus attendre, je fis demi-tour et commençai à longer plusieurs rayons avant d'entrer dans celui des bonbons. Maintenant que je situais approximativement où se trouvait Alex, j'allais devoir contourner les modèles et courir sans bruit pour sauver mon frère. Mais j'allais surtout devoir prier pour que celui-ci ne crie plus, car les mannequins seront plus rapides que moi pour le trouver.

Je progressais lentement dans le rayon, contrôlant ma respiration et le bruit de mes pas. Était-ce une simple impression, ou je ne faisais vraiment pas de bruit? Oui, il me semblait bien que j'étais totalement silencieuse. Je souris, fière, car c'était déjà un bon début. Mais je ne pouvais pas courir, je serais beaucoup trop bruyante. Alors je continuai à marcher sans bruit.

Lorsque tout à coup; "Skroutchh". Merde... Je venais de mettre le pied sur un paquet de bonbons.

Je me crispai. M'avaient-ils entendue? Je ne remarquai pourtant aucun bruit ou mouvement venant de leur direction. Devrais-je continuer? Oui, il le fallait. Tout doucement, je relevai mon pied pour l'enlever de ce paquet.

Non, non, non! Les bonbons étaient collés à ma chaussure, avec le plastic en plus de cela! Je tentai de secouer légèrement le pied, mais rien à faire, ils semblaient avoir fusionnés avec ma semelle. Alors que j'allais me baisser pour pouvoir m'en débarrasser, j'entendis soudain du bruit derrière moi. Le bruit que je pouvais maintenant reconnaître entre mille; les pas des mannequins.

Je soupirai. Pourquoi fallait-il toujours que tout ne se passe pas comme prévu?

Mais ils ne m'auront pas! Je commençai à courir, toujours avec le paquet de bonbon accroché à mes pieds. Ce bruit était insupportable et extrêmement bruyant, mais je n'avais pas le choix, je ne pouvais pas décoller le sachet maintenant.

J'allais sortir du rayon, pour pouvoir traverser l'allée principale et ensuite rentrer à nouveau dans un rayon, mais je fus brutalement stoppée dans ma course par le bras d'un mannequin qui surgit de je ne sais où. Je me baissai et réussis à l'éviter de justesse. Mais sûrement trop paniquée, mes jambes me lâchèrent et je m'étalai lamentablement par terre, au pied de mon agresseur.

Je m'étais bien faite avoir; deux mannequins m'avaient fait peur en m'obligeant à avancer dans le rayon, alors que le dernier m'attendait simplement au bout, prêt à m'assommer.

-Rah! Vous êtes fourbes vous! m'écriai-je, en me relevant. Mais dommage...il vous faudra être plus rusés, si vous voulez m'attraper! leur lançai-je, alors que j'entamais un véritable sprint à travers le magasin.

Mais qu'est-ce qu'il m'avait pris de les provoquer ainsi? Tout ce qu'ils veulent est ma mort, et moi, je les provoque.

Malgré tout, ils mirent un moment à réagir. Juste assez pour que j'aille suffisamment d'avance. Je traversai le rayon des chips à toute vitesse et arrivai au bout du magasin, en face d'un mur blanc. Je tournai la tête à droite; personne. Puis à gauche.

Alex!

Deux mannequins se tenaient en face de lui. Un le tenait à bout de bras, le plaquant au mur comme il l'avait fait avec moi et semblait l'étrangler de toutes ses forces. L'autre lui donnait des coups de poings dans le ventre, avec une abominable puissance.

Sans prendre le temps de réfléchir, je courus dans leur direction, ouvris grands les bras, et me jetai littéralement sur les deux mannequins en même temps. Ils tombèrent au sol, et je les écrasai dans mon élan. J'étais approximativement assise sur eux et je commençai à les ruer de coups, malgré que leurs corps soient durs et que cela me faisait atrocement mal aux mains.

-Bandes d'assassins! Dégagez d'ici! Ne touchez plus jamais à mon frère, est-ce que c'est clair?! criai-je.

Je me relevai et leur envoyai à chacun un violent coup de pied dans la tête. Elles heurtèrent le carrelage et cela sembla les assommer, momentanément du moins.

En une fraction de secondes, je me précipitai vers mon frère.

-Alex, je vais m'occuper de toi, tout va bien, d'accord? Ne t'inquiète pas, c'est fini, lui chuchotai-je, en lui prenant la tête dans mes bras.

-Drfght, me fit-il, faiblement.

-Quoi?

-Derfghrt.

-Je comprends rien, Alex!

Je lui lâchai la tête et compris enfin ce qu'il voulait me dire;

-Derrière toi!

Fashion VictimOù les histoires vivent. Découvrez maintenant