14. À la rencontre de mon destin

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Mathias?! Non, je délirais totalement! Ce n’était absolument pas possible qu’il soit là. Oui, je le savais bien, ce gosse était mort entre mes propres mains. Ou devrais-je plutôt dire «de mes propres mains»? J’avais secoué si fort ce gamin, qu’il en était mort, je m’en rappelais parfaitement, malheureusement.

Mais ce hurlement ne pouvait venir que de lui, j’en étais persuadée. Mais alors, que se passait-il? Comme si les mannequins animés ne suffisaient pas, il fallait en plus de cela rajouter un gamin qui ressuscite miraculeusement. C’était l’incompréhension la plus totale.

J’étais encore un peu sonnée, toujours au sol, mais j’arrivais à respirer à peu près normalement. Je n’avais pas la moindre idée du temps qui s’était écoulé depuis que les mannequins nous avaient relâchés. Cela semblait faire une éternité.

Je m’adossai au mur, et, en espérant trouver une quelconque aide, je me tournai vers mon frère. J’avais l’espoir qu’il me dise qu’est-ce qu’il se passait, que je puisse comprendre dans quelle situation invraisemblable on se trouvait maintenant. Mais rien qu’à voir sa tête, je compris qu’il était aussi perdu que moi. Et, comme s’il avait lu dans mes pensées, il confirma ce que je supposais;

-Je comprends absolument rien. Mais alors rien-du-tout. C’est pas Mathias qui vient de crier, pas vrai? chuchota-t-il d’une voix mal assurée.

-Je préfère pas le savoir, je crois que il vaudrait mieux, lui répondis-je sur le même ton. Mais si c’est bel et bien lui, je m’en voudrais tellement de le laisser se faire tuer…encore une fois.

Mon frère ouvrit grand les yeux.  

-Ah non! C’est hors de question que je risque ma vie pour ce sale rejeton! Je veux bien le nourrir, le loger, tout ce qu’il veut, mais quand même pas aller le sauver, en échange de ma propre vie! Non, franchement c’est une extrêmement mauvaise idée. Aller, viens Clara, faut en profiter! On rentre à la maison maintenant!

-Non Alex! Tu arrêtes deux secondes de penser à toi, et tu viens avec moi chercher Mathias. Et si ce n’est pas lui, tant pis, on ramène un inconnu avec nous! fis-je en haussant la voix.

-Mais je…

Il n’eut pas le temps de finir sa phrase, qu’un énorme bruit résonna dans tout le magasin. Puis le même cri que le précédent, mais il semblait plus étouffé.

-C’est Mathias. J’en suis sûre.

-Je crois que tu as malheureusement raison. Mais ce bruit, c’était quoi ? me demanda mon frère, inquiet.

-Ils viennent de l’enfermer dans la chambre froide, lui répondis-je, catégorique. On n’a pas une seconde à perdre.

Je me levai, un peu chancelante, décrochai sauvagement le paquet de bonbon qui était toujours accroché à ma chaussure, puis je pris Alex par la main. Et, sans qu’il puisse répliquer quoi que soit, je le tirai violemment, l’obligeant à se mettre debout lui aussi.

Et on commença à courir, main dans la main, comme des enfants qui jouent. Sauf qu’on n’était plus des enfants, mais surtout qu’on ne jouait pas. On était en train de se jeter droit dans la gueule du loup, tel deux inconscients. Mais si on ne le faisait pas, je ne me serais jamais pardonnée d’avoir laissé ce pauvre Mathias entre les mains de ces assassins encore une fois.

Après environ une minute de zigzag à travers les rayons, on put apercevoir la lourde porte de métal. Elle devait être à une vingtaine de mètres, mais il était hors de question d’y aller maintenant ; trois mannequins étaient postés devant celle-ci, tandis que les deux autres la retenaient avec force, pour empêcher Mathias de sortir. Mais c’était déjà un bon point, car cela prouvait qu’il n’avait pas étranglé à mort le garçon, pas pour le moment en tout cas.

Je fis signe à mon frère de ne plus faire aucun bruit et je tentai grossièrement de lui expliquer mon plan grâce à des gestes. Il le comprit tout de suite, on n’était vraiment pas jumeaux pour rien! Mon idée était simple ; j’allai aller dans un autre rayon pour faire le plus de bruit possible, histoire d’attirer l’attention de tous les mannequins. Ensuite, mon frère ira chercher Mathias, le prendra avec lui et on se rejoindrait vers la porte de sortie, en espérant que cette fois-ci, on puisse sortir. Et le tour serait joué, on retournerait chez nous.

Un seul problème persistait ; qu’allions-nous faire de Mathias? Mais je n’avais pas le temps d’y réfléchir de toute façon, et il faudrait déjà s’estimer heureux si on arrivait à sortir de ce magasin sain et sauf.

Alex me toucha l’épaule, ce qui me fit brusquement sortir de mes pensées. Je le regardai d’un air interrogateur, avant qu’il me prenne dans ses bras et me serre jusqu’à m’étouffer. Puis, il me prit une main, mit son autre main sur mon épaule et me fit un large sourire, que je lui rendis bien évidement.

Je soupirai le plus discrètement possible en lui faisant comprendre que j’allais devoir y aller. Il s’éloigna donc de moi et serra les poings, pour m’encourager. Je hochai la tête, puis partis à la rencontre de mon destin.

Fashion VictimOù les histoires vivent. Découvrez maintenant