Prologue

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Un éclair déchire le ciel.

Le cri d'un nouveau né se fait entendre ainsi que les hurlements d'une mère à qui l'on arrache son enfant. Puis, un second cri, un second nourrisson et enfin, un second hurlement.

Une ombre se faufile hors de la cabane, les deux enfants emmitouflés dans des couvertures.

La pluie fait rage et le tonnerre gronde, la jeune mère ne cesse de pleurer et finit par s'endormir vaincue par la fatigue. Lorsqu'elle se réveille, tout est flou, les sensations qu'elle peut avoir sont brouillées : fatigue, tristesse, douleur. La sage-femme entre, comme si elle savait que la jeune femme venait de se réveiller. Elle s'assoit près d'elle, le regard grave, son visage reflète l'expérience mais rien ne transparaît. Aucun sentiment, aucune compassion. La jeune alitée l'interroge du regard, elle semble ne se souvenir de rien, uniquement de l'atroce douleur de la mise au monde d'un enfant. Incapable de prononcer un mot, comme traumatisée par les récents événements, sans pour autant être capable de s'en rappeler. Enfin les mots tombent, redoutés depuis toujours, « morts nés »

Nouveau hurlement de douleur, la sage-femme lui pose la main sur le front et elle s'endort, le visage ravagé par les larmes et la tristesse. Lorsque le mari rentre, il trouve la vieille guérisseuse au chevet de son épouse. Inquiet, il pose la question qu'il redoute tant également. Une fois les paroles de malheur prononcées à nouveau, elle s'en retourne dans sa cabane, soucieuse. L'homme, terrassé par le chagrin, se terre dans la seconde pièce de la maison. C'est un homme aux traits endurcis, habitué aux travaux des champs et à la dure besogne. Seulement, la perte d'un enfant ferait perdre ses moyens au plus rude des hommes.

Le lendemain, le tonnerre s'est enfin calmé, il a grondé toute la nuit comme si le ciel avait également perdu un être cher. Le mari doit retourner aux champs, il passe voir sa femme qui ne dort plus depuis plusieurs heures. Elle reste prostrée dans son lit, sans un mot, le regard vide, dirigé vers le pauvre plafond en paille de la maisonnette. Il lui dépose un peu de lait et du pain sur le lit puis ils sort un soupir traversant ses lèvres.

Un mois passe, les parents ne s'en remettent pas. Elle, ne parle plus. Lui, passe son temps aux champs. De nombreuses rumeurs circulent dans le village, plaignant le pauvre homme. Perdre un enfant et voir sa femme devenir hérétique. La vieille femme n'a pas reparu depuis la maudite journée. Les gens se posent des questions, parlent, et les rumeurs s'accumulent. Certains disent que les dieux les ont punis pour les actes de leurs vies précédentes, d'autres que la femme a mit au monde un monstre et qu'ils s'en sont débarrassé. Enfin, les derniers pensent que la malédiction a eu lieu, qu'il faut les chasser avant que tout le village ne soit complètement maudit. Ils ont pour preuve la brusque disparition de la sage-femme. Mais le mari refuse de partir, il a travaillé toute sa vie pour avoir sa petite parcelle de terre. Les villageois ne le regardent plus, s'éloignent à son passage. La mère, inconsolable, ne sort plus de la maison, dorénavant déconnectée de la réalité, se laissant mourir. Elle rend son dernier souffle après six mois, la folie et le chagrin l'ont emporté de manière fulgurante. Un an plus tard, tout est oublié et l'homme se remarie, sa nouvelle femme ne tarde pas à porter un nouvel enfant. Tout le monde a oublié la tragédie. La sage-femme est également effacée des mémoires.

Personne ne peut se douter que ce jour là, à l'autre bout du monde, dans un village perdu et presque identique, cette tragédie s'est produite au même moment. Deux nouveaux nés, des jumeaux également, un garçon et une fille ont été enlevés à leur mère morte en couche et effacés des mémoires. Les rumeurs se sont pourtant propagées au-delà du village. Au-delà des frontières et des mers.

Les gouvernements ont finit par avoir vent des deux histoires. Chacun envoyant les milices des naissances vérifier l'histoire sans pour autant trouver une quelconque trace des jumeaux maudits. La résistance est aussi à la recherche des deux garçons et des deux filles. Ils sont les sauveurs. Ils sont le seul espoir de leur nouveau monde en péril.

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