Traqué

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Alexis tapota sa lampe torche avec insistance. Rien à faire, elle rendit l'âme ne laissant plus que deux sources de lumière au milieu de l'obscurité.
Il en profita pour jetter un coup d'œil sur sa montre pour la énième fois.
Il était minuit et quart.

La brume commençait sérieusement à amoindrir le champ de vision des campeurs. Sans mot dire, ils cédaient peu à peu à l'angoisse.

Laurent, dont le taux d'alcoolémie semblait avoir drastiquement baissé, ouvrait la marche et continuait à lancer des appels retentissants depuis déjà une demie-heure. Il finit par convaincre les autres de s'assoir un peu pour réfléchir.

"- Ok...je pense qu'il va falloir abandonner là, on ne peut pas aller plus loin. Dit-il d'un air résigné.

- Si tu n'avais pas lancé ce défit ridicule, on en serait pas là !"

Marlène était dès lors autant en proie à la colère qu'à la frayeur. Elle saisit sa tête entre ses mains comme pour contenir les émotions qui l'envahissaient.

Alexis intervint.

"- calmez-vous! Ce n'est pas en commençant les reproches qu'on va se sortir de ce merdier."
Tempéra-t-il .

Soudain, il se souvint qu'il était en possession de son portable, sagement rangé dans la poche de son jean.
Dans une joie non dissimulée, il tenta un appel vers l'extérieur. Il fallait absolument prévenir les autorités compétentes maintenant que la situation leur échappait totalement.

En vain. Le réseau ne passait tout simplement pas.

Excédé, Laurent se leva et fit marche arrière, en direction du campement. Il n'allait pas rester planté là, à attendre comme un piquet!
Ses pas décidés s'éloignèrent sous le regard stupéfait de ses camarades.

"- Qu'est-ce que tu fais? On doit rester ensemble! Cria Marlène, affichant une expression de désarroi.

Alexis la retint par le bras.

                         ~~~

Le souffle haletant, Laurent pressa son allure sans décolérer. Il éclairait tant bien que mal le sentier devant lui, noyé dans l'épais brouillard.
Décidément, rien ne se passait comme prévu, à son grand agacement. Sans compter le caractère insupportable de cette femme qui de toute évidence ne savait pas se taire. Et que dire d'Alexis? Égal à lui-même sous ses airs de sagesse incarnée.
Toutes ces pensées négatives tournaient en rond dans son esprit tandis qu'il prenait de la distance.

Subitement, un doute le saisit. Il s'arrêta net, laissant le silence s'installer afin d'évaluer son environnement.
Persuadé d'avoir entendu des craquements non loin de l'endroit où il se trouvait, il dirigea sa lampe dans tous les sens, le cœur battant à tout rompre.

"- Alexis?!.... Marlène ?!" Se hasarda-t-il, peu confiant.

Il n'eut comme seule réponse que le bruit de battements d'ailes des oiseaux survolant la forêt.

Il fallait vite reprendre la marche, le campement n'étant plus si loin.

Un sifflement strident s'éleva tout à coup à sa gauche. Une douleur vive et insupportable s'en suivit à la hanche, arrachant un hurlement.

Laurent se mit à courir droit devant, la frayeur au ventre.

Le sang se déversait abondamment de l'entaille faite par arme blanche. Il mit sa main sur sa blessure, cherchant désespérément un lieu où se cacher.

Il n'y avait plus de visibilité, uniquement des ombres de part et d'autre lui indiquant quelques buissons.
Les craquements derrière lui s'estompèrent, comme pour lui laisser volontairement de l'avance.

Une branche vint se coincer entre ses jambes, le laissant lourdement tomber sur le sol.
L'instinct de survie lui procura l'énergie de se relever et de poursuivre sa course dans une grimace trahissant ses efforts.

Il s'engouffra avec peine dans une petite grotte rocheuse parsemée de feuillages, immédiatement sur sa droite.

Le jeune homme traqué étouffa des gémissements de panique à la vue de l'atteinte sanglante, ne cessant de guetter fébrilement l'entrée de sa cachette.

Plus un bruit.

Cinq minutes passèrent ainsi, dans l'horreur de l'attente et de la souffrance physique.

Il arracha l'extrémité d'une de ses manches de chemise et noua le tissu autour de sa taille en faisant un nœud.
Le liquide écarlate s'était déversé partout sur ses mains.

Il mordit son bras pour ne pas crier. Le garrot était en place.

Plongé dans le noir et dans la peur de mourir, Laurent ne fit plus un seul geste.
















COUPABLES [Nouvelle/TERMINÉE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant