une princesse aimée, Maria

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Au sud, bien plus au sud était un magnifique pays de danse et de joie. Le royaume d'Espagne étaiet un grand royaume où reignait la princesse Maria. Ses parents qui venaient de mourir et son frère partit on ne sait où, elle se retrouvait seule à tenir les rennes de cet immense pays. Mais elle avait bon espoir que son petit frère revienne rapidement. Elle regardait souvent la route depuis sa tour d'ivoire. Parce que le princesse Maria, en plus d'être immensément riche, était immensément belle. Ses cheveux noirs aux magnifiques reflets violacés et ses yeux du plus profond des yeux faisaient bien des envieuses et bien des prétendants qu'elle refusait gentillement. Elle n'avait pas réellement envie de se marier. Et puis elle avait entendu parler de lettres distribuées à certains dirigeants de royaumes pour les inviter à ce pays si mystérieux qu'est le pays de Fanellon.

Elle scrutait le chemin, espérant qu'un cavalier allait arriver, apportant une invitation au merveilleux royaume, ou des nouvelles de son frère cadet. Mais aucune nouvelle de Carlos n'arrivait. Et encore moins d'invitation. Elle n'était pas jalouse. Elle se disait qu'elle n'allait pas servir à grand-chose. Il est vrai qu'elle ne savait pas vraiment se battre et n'était pas la plus discrète. Alors allait-elle avoir son utilité dans un pays tel que celui-ci ? Elle aperçut enfin un nuage de poussières au loin. Un cavalier arrivait. Elle descendit en vitesse de sa tour, sous l'air affligé de sa gouvernante qui détestait la voir courir ainsi. Essouflée, elle regarda le cavalier arriver dans la cour principale. L'homme descendit de son cheval et s'inclina devant la princesse. Il chercha une seconde dans sa besace et en sortit une petite enveloppe scellée d'un sceau de cire rouge décorée d'un dragon. Elle sourit. Si elle n'attendait pas une lettre de sa cousine, elle était tout de même heureuse d'avoir de ses nouvelles. Elle remercia l'homme d'un sourire et se dirigea vers sa tour pendant qu'il remontait sur son cheval.

Elle s'en retourna vers sa chambre, richement décorée d'or et d'argent. Elle s'approcha de son bureau en ébène sculpté et s'assit sur sa chaise de velour rouge. Lentement, elle défit le sceau, délicatement afin de ne pas l'abimer. C'était une habitude chez elle de garder les cachets de lettre. Elle sortit la lettre et la déplia soigneusement. Elle commença à lire

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Ma très chère Maria

J'espère que tu vas bien. Pour moi, tout est parfait.

Je t'écris pour te demander si tu as toi aussi reçu l'invitation à Fanellon. Pour ma part, je l'ai eue et mais je ne suis pas sûre d'y aller... J'ai tout de même beaucoup à faire aux royaumes. Si tu y vas je t'y rejoindrais certainement. Mais si tu n'y vas pas ou si tu n'as pas été invitée, je ne pense pas venir. Ça serait tout de même un joli pretexte pour nous revoir. Et puis ça nous permettras de nous amuser un peu ensemble. Nous sommes si loin que nous n'avons que de rares occasions.

Je voulais savoir aussi si tu avais eu des nouvelles de ton frère. Personnellement, je n'en ai aucune. J'espère qu'il te reviendra bien vite. Et puis il va devoir gouverner. Depuis la disparition en mer de tes parents, il n'a pas fait surface. Mais j'ai bon espoir que tu le revoies rapidement. Ne t'inquiète pas trop pour lui, il sait se débrouiller.

Tu m'excuseras pour cette très courte lettre, j'attends ta réponse.

Je pense à toi

Nephraelle

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Elle sourit aux derniers mots de sa cousine. Quoique les gens disaient d'elle, elle était solidaire. Cherchant parmi ses plumes, elle attrapa la plus fine et sortit une feuille de parchemin blanchit. Elle trempa la pointe dans l'encrier de verre et réfléchit une seconde avant de poser la plume sur le support. Elle forma les lettres d'une écriture parfaite, légèrement penchée. La même que sa cousine en fait...

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Ma très chère Neph

Je vais très bien, merci

Carlos est n'est toujours pas rentré. C'est la seule chose qui m'attriste. Et je n'ai pas non plus de nouvelles de lui. Mais tu as raison. Il va revenir.

Je n'ai toujours pas reçu ma lettre, mais elle ne devrait pas tarder à arriver. Je t'en informerais. Tu as raison, ça fait longtemps qu'on ne s'est pas vues. Et oui, ça nous fera un beau prétexte. J'espère que le nouveau roi, Octave a aussi pensé à moi. Remarque, j'en rigole mais s'il le faut, il n'a pensé qu'à la grande Nephraelle et pas à la petite Maria. Dans tous les cas ça ne serait pas non plus la fin du monde. Je ne suis ni du genre jalouse, ni du genre rancunière.

Je te tiendrais informée de tout

Je pense à toi aussi

Maria

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L'encre finissait de sécher tandis qu'elle cherchait sa cire et le tampon pour y graver le cheval ailé qui faisait sa marque. Après quelques minutes à chercher dans ses tiroirs, -la princesse Maria n'était pas vraiment organisée en ce qui concernait le rangement de ces outils d'écriture- elle parvint enfin à mettre la main sur la cire et sur le cachet. Elle ferma l'enveloppe soigneusement et appliqua son sceau. Elle attendit que cela refroidisse et redescendit, plus lentement cette fois, de la tour d'ivoire. Elle avait l'œil fixé sur la lettre et descendait les marches une par une, faisant bien attention à ne pas en rater. C'était ainsi que son premier frère était mort, à l'âge de huit ans. Elle n'en avait que cinq quand le drame était arrivé. Elle se souvenait que leur chambre était en haut de la grande tour blanche. Qu'ils devaient descendre. Qu'ils faisait la course. Qu'elle était partie la première. Qu'elle étais arrivée en bas. Que son frère ne la suivait pas. Qu'elle était alors remontée. Qu'elle l'avait découvert, sur un palier, gisant, la nuque brisée par une marche. Elle était descendue, en larmes, voir ses parents. Et pendant les mois qui suivirent, elle se sentit seule. Excessivement seule.

        Même si son deuxième frère était née, il était trop petit pour parler et même pour marcher. Alors, enfermée dans sa chambre, elle lisait. Elle lu ainsi tous les livres et s'inventa ses propres histoires. Ses propres personnages. Et c'est à ce moment là, également, qu'elle avait rencontré Nephraelle. Et son autre cousine, Maud. Quand ses parents moururent, quand elle avait seize ans, elles devinrent plus présentes. Jusqu'à ce que Maud ne meure, elle aussi... 

La cour du roi : Les cousines de l'eauOù les histoires vivent. Découvrez maintenant