Chapitre 4: Hayley

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Me revoilà dans cette satanée pièce que je déteste par dessus tout. Le tic tac incessant de cette horloge m'insupporte, et ce silence dénué de paroles est assourdissant. Je vais craquer, je le sens. Plus je vais à ces séances grotesques et plus la colère prend le dessus sur la situation. Je souhaite simplement que l'on me laisse tranquille, je ne demande pas la lune. Ces consultations ne servent à rien car je n'ai aucunement l'intention de dévoiler quoique ce soit à cette étrangère mal lunée. Elle me regarde comme si j'étais une bête de foire, elle m'analyse sous toutes les coutures de ses yeux gris glacial à travers ses lunettes de vue. J'ai horreur de ça. J'essaie d'échapper tant bien que mal à son regard insistant, et je résiste du mieux que je peux pour ne pas l'envoyer chier méchamment. Elle tape frénétiquement le bout de son stylo sur son calepin, attendant que je daigne ouvrir la bouche. Ce qu'elle veut : épier une réaction quelconque de ma part et je ne lui ferais pas ce plaisir.

- Écoutez Hayley, je sais bien que vous ne souhaitez pas me parler mais je suis là pour vous aidez...

- Je n'ai pas besoin d'aide ! répliqué-je aussitôt, le ton dur.

- Très bien, alors de quoi avez-vous besoin ? me demande la psychiatre.

De LUI. Mais il est parti me laissant seule avec mes incertitudes. Il m'a laissé une trace indélébile, marquée au fer rouge, dans mon cœur. Je ne supporte plus rien, ni personne. Moi-même, je ne peux plus me regarder dans un miroir sans que je vois cette fille pitoyable, bernée par ses propres illusions. Je suis prisonnière mais surtout faible, d'être tombée amoureuse d'un garçon qui ne veut plus de moi après avoir eu ce qu'il voulait, non ? C'est ce que je ressens en tout cas. Si j'avais su que la chute serait terrible, je ne me serais pas laissée manipulée de la sorte. Pourtant, il me manque à en crever.

Les larmes me montent aux yeux mais j'essaie de les contenir.

- Si nous parlions d'Ayden ?

Je relève subitement ma tête et la fixe durement. Qui lui a parlé de lui ? Cela fait deux fois qu'elle me sort ce prénom devenu fantôme à mes yeux.

- Que ressentez-vous pour lui ? m'interroge-t-elle.

C'en est trop. Je craque. Je me recroqueville sur le divan ramenant mes jambes sous mon menton, et pleure entre mes bras. Je pensais que toutes mes larmes s'étaient écoulées il y a deux mois mais apparemment, j'en ai encore à évacuer. Ce trou béant dans ma poitrine me fait mal. Je suffoque. Je veux qu'il comble à nouveau ce manque douloureux, je veux me blottir dans ses bras et respirer son odeur rassurante, je veux qu'il caresse ma peau comme il savait si bien le faire, me provocant des milliers de frissons dans tout le corps. Je veux qu'il me susurre des mots doux à l'oreille afin d'apaiser tous mes tourments, qu'il m'embrasse à ne plus savoir où je suis. J'ai besoin de lui dans ma vie, j'ai besoin de cet homme protecteur, gentil et généreux à mes côtés. J'ai besoin de l'homme de ma vie, de mon tout, pour toujours. Je l'aime d'un amour puissant et profond, d'un amour effrayant à en perdre la raison. Malheureusement, mes sentiments ne sont pas réciproques et cela me tue.

Je l'ai perdu. Il n'a peut-être pas su ou supporter ce lien puissant et indéniable qui nous reliait.

Mes larmes redoublent d'intensité face à cette fâcheuse constatation. Tous les mots que je souhaite exprimer sont coincés dans ma gorge. Aucun son ne sort de ma bouche. Seul mon visage est baigné par les larmes silencieuses et ma respiration se coupe par l'émotion.

La doctoresse me laisse me calmer petit à petit, jusqu'à ce que mon souffle redevienne régulier. Elle me tend un mouchoir en papier, que je ne refuse pas.

- Voulez-vous en parler, Hayley ? me questionne-t-elle, gentiment.

Au fond, elle n'est pas si détestable que cela. Je le savais mais j'étais tellement sur la défensive. Je préférais être ignoble pour me protéger, afin que l'on ne me détruise pas plus que je ne le suis déjà. Au bout du compte, c'est moi qui fait du mal aux autres en réagissant ainsi. Elle a eu raison de crever l'abcès. Il le fallait. Personne autour de moi ne me parle de lui, sûrement pour ne pas me brusquer, me blesser. Il était temps que quelqu'un prenne le taureau par les cornes et me mettre devant le fait accompli. L'expression : « Traiter le mal par le mal » est véridique. Cela fait presque deux mois que je suis dans ce mutisme étouffant avec la sensation d'être terriblement seule. J'aimerai me sortir de ce trou noir dans lequel je suis par sa faute, mais aussi par la mienne. J'aurais dû me battre et poursuivre ma vie comme avant. Avant qu'IL n'arrive dans celle-ci. Je dois me ressaisir et ne pas lui montrer qu'il a réussi à m'atteindre. Je vais lui prouver que je peux vivre sans lui et j'espère que ma mutation aux USA sera acceptée dans les meilleurs délais, afin de prendre un nouveau départ.

Lui, mon encre Tome 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant