Chapitre 214 : Réveil difficile à l'aveugle

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 Avec beaucoup de difficulté, Syara émergea de son sommeil. Étrangement, elle avait l'impression d'avoir plongé dans une cuve d'alcool fort la veille et avait dû boire tout le contenu pour s'en sortir. Elle s'était peut-être faite renverser par une charrette, réfléchit-elle... Ou un convoi si elle se référait à tout son corps endolori.

Ce qui l'étonnait le plus était qu'elle se souvenait avoir passé une soirée tranquille dans son appartement et s'être couchée assez tôt. Alors pourquoi se sentait-elle si mal ? Et pourquoi elle ne voyait absolument rien ?

Plus elle émergeait et plus ses sens revenaient. S'ils étaient aussi obstrués, c'était à cause d'un tissu qui lui recouvrait le visage et lui plaquait les oreilles sur le crâne. Ses mains étaient aussi entravées derrière son dos et surtout attachés à quelque chose qui devait être un pilier. À cela s'ajoutait l'impossibilité de bouger les jambes à cause de liens au niveau des chevilles.

Mais qu'est-ce qui se passait à la fin ! Des liens de telle sorte qu'elle ne puisse pas bouger, une cagoule placée opaque qui lui cachait la vue... Elle avait été enlevée ?

— Détachez-moi ou je vous explose la tronche ! hurla quelqu'un proche d'elle.

Cette voix... Elle n'était pas seule dans cette étrange situation. Elyazra était avec elle et, vu comment elle criait, elle devait être attachée elle aussi.

— Non... Mauvaise formulation, réfléchit la demi-dragonne. Détachez-moi que je vous explose la tronche !

— Ely ? appela la beast.

— Syara ? Je ne sais pas ce qui me vaut un tel traitement, mais ça n'est pas drôle ! Détache-moi tout de suite !

— Laisse-moi deviner. Tu as un sac sur la tête, les mains attachées dans le dos et les jambes liées aussi ?

— Bravo ! Si je n'étais pas attachée, j'applaudirai ta perspicacité. Maintenant détache-moi ! s'énerva Elyazra.

— Je ne peux pas. Je suis dans le même état que toi.

— Ho... Et tu sais ce qui nous arrive ?

— Je viens de me réveiller. Dans mon dernier souvenir, nous allions nous coucher, comme d'habitude. Et toi ?

— Pareil. D'après ce que j'ai réussi à percevoir, nous sommes sur un bateau en pleine mer. Dans une cale sans doute. J'entends des personnes parler et crier, mais c'est assez étouffé. Je pense qu'ils sont sur le pont.

Avec ces nouvelles informations, Syara tenta de confirmer la théorie de son amie. En effet, elle sentait que le sol tanguait sous elle et entendait le roulis des vagues qui se brisaient sur la coque. En tendant un peu plus l'oreille, elle entendit des voix étouffées, comme l'avait indiqué Elyazra. Même pour elle, il était difficile de savoir ce qu'ils disaient, mais le peu qu'elle arrivait à percevoir clairement concernait la navigation.

— Bon... Je ne sais pas ce qui se passe, mais ça ne sent vraiment pas bon. Même si je me doute de la réponse, je vais quand même poser la question. Tu as essayé de te détacher ?

— Bien sûr que j'ai essayé ! Mais je ne sais pas pourquoi, j'ai perdu toute ma force et tous mes pouvoirs.

— Comment ça perdu tes pouvoirs ?

— Je ne vois pas ce qui n'est pas clair. Je ne peux pas faire apparaître mes flammes ou utiliser les autres facultés de mon père, voilà !

Étonnée, Syara tenta elle aussi de faire appelle à ses pouvoirs, mais malgré tous ses efforts, le violon refusait d'apparaître dans ses mains. D'un autre côté, vu comment elle était attachée, il aurait été difficile pour elle de jouer quoi que ce soit.

— Qu'est-ce qu'on fait du coup ? demanda Elyazra.

— On se trouve en pleine mer et il est impossible de se libérer pour le moment. Attendons d'avoir une occasion d'en apprendre plus sur ce qu'ils nous veulent... Ou une occasion de nous évader.

— Tu veux attendre ? s'exclama la demi-dragonne, visiblement peu enclin à suivre ce plan.

— S'il n'y avait que nous, j'aurais cherché un plan pour nous évader au plus tôt, mais je ne veux rien tenter s'ils tiennent quelqu'un d'autre.

— Tu t'inquiètes pour Phi, c'est ça ? devina Elyazra.

— Je ne veux pas partir sans m'être assurée qu'ils ne l'on pas enlevée. J'ai promis que je prendrais soin d'elle. S'il lui est arrivé quelque chose, je ne réponds plus de rien.

— Je ne sais pas qui est cette Phi dont vous parlez, mais le satyre qui dormait sur le canapé n'a rien, intervint soudainement quelqu'un près d'eux.

— Ha ! Enfin quelqu'un ! Ça fait une demi-heure que je me pète les cordes vocales à vous appeler !

— Difficile de ne pas l'avoir remarqué, souffla l'homme qui n'en pouvait visiblement plus.

— Donc, maintenant que je sais que quelqu'un m'écoute, je vais pouvoir reformuler ma proposition. Libérez-moi que je vous explose la tronche !

Malgré la situation, Syara ne put s'empêcher de pouffer de rire. On ne pouvait pas dire qu'elles étaient dans la meilleure position qui soit et pourtant, Elyazra avait su garder son naturel et n'hésitait pas à entrer dans une personne qu'elle ne voyait même pas.

— Sinon, qu'est-ce que vous nous voulez ? demanda la beast après avoir repris de son sérieux.

— Nous, rien. Nous avons juste été engagés pour vous amener à notre commanditaire.

— Vous savez, il y a d'autres moyens pour arriver à vos fins. Je ne sais pas moi, des choses comme... Venir demander poliment !

— C'était une demande spécifique de notre employeur. Nous vous enlèverons ces sacs que lorsque vous serez devant lui.

— Parfait ! Comme ça, je n'aurai même pas besoin de chercher qui tuer en premier.

Contrairement à cet homme qu'elles n'avaient pas entendu approcher, les deux jeunes femmes entendirent distinctement les bruits de pas d'une autre personne qui alla se poster juste à côté de l'endroit où provenait la voix de leur ravisseur.

Il chuchota quelque chose en espérant se faire entendre uniquement par son acolyte, puis repartit aussitôt en faisant autant de bruit qu'à l'aller.

— Nous allons...

— Bientôt accoster, le coupa Elyazra. Merci, nous ne sommes pas sourdes. Vous savez quoi ? J'ai hâte !

Malgré la cagoule, Syara put facilement deviner la tête de son amie. Elle arborait un grand sourire à l'idée de se venger de la personne qui avait osé les enlever.

Le violon de cristal : les partitions perdues (suite)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant