Chapitre 218 : Echec

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 Assise dans un confortable fauteuil installé devant sa cheminée, la mère de Syara savourait, avec un verre de vin, la fin de cette très bonne journée. Après tant d'années, elle avait à la fois remis la main sur ses filles et sur les partitions d'Athéa. Elle n'avait rien à redire sur cette journée qui avait été parfaite.

Même si ses filles avaient refusé de partager son repas, elle ne s'en était pas offusqué et n'avait pas insisté. Cela lui avait permis de manger tranquillement sans se faire insulter à chaque bouchée. Vivre loin d'elle avait décidément nui à leur savoir vivre. Pour l'une, cela n'avait que peu d'importance, mais pour l'autre, elle allait se faire un devoir de la recadrer pour qu'elle rentre dans le rang, arrête d'être offensante et lui obéisse sans discuter.

Rien que de penser à cette insolence l'énervait au plus haut point, si bien qu'elle s'était crispée sur son verre et faillit le briser. Elle retrouva cependant son calme avant que cela n'arrive et le posa sur la table basse.

Soudain, les poils de sa nuque se hérissèrent et un étrange pressentiment l'envahit. Ne cherchant même pas à réfléchir, elle se saisit du coupe papier à sa portée et poignarda le fauteuil à côté d'elle. Son instinct ne l'avait pas trompée. Il y avait bien quelqu'un assis à côté d'elle, mais la petite lame qu'elle avait plantée dans sa gorge ne semblait pas le déranger outre mesure.

— Bonsoir Anela, sourit Fos. Ça faisait longtemps.

— Encore là ? s'étonna-t-elle. Depuis le temps, tu devrais savoir que ta place n'est plus dans ce monde.

— Que veux-tu, je l'aime bien trop pour le quitter... Et j'aime bien trop voir tous tes plans échouer et contribuer à ce qu'ils n'aillent pas au bout.

— Cette fois-ci, c'est différent, sourit Anela en reprenant son verre de vin. Tu n'es plus qu'un esprit, un simple spectateur qui ne peux rien faire.

— Il est vrai qu'à chaque fois, c'était moi qui t'arrêtais. J'ai uni les humains et les autres races alors que tu avais passé tant de temps à faire en sorte qu'ils se détestent, et ce, bien avant l'ouverture du portail. J'ai vaincu ton roi Cyber et arrêté ton armée de pantin qui a alors retrouvé son libre-arbitre. D'ailleurs, pourquoi avoir lancé ce plan alors que ton camp gagnait la guerre ?

— Tu n'es pas le premier à avoir eu l'idée d'une paix durable. Plus la guerre avançait et plus certains se mettaient à faire la chose pour laquelle les humains sont les moins doués. Réfléchir, cracha-t-elle avec dédain. Si je n'étais pas intervenue, ils auraient fini par comprendre que ça n'était pas une invasion militaire, mais une invasion de réfugié.

— Alors tu as créé le roi Cyber pour finir le travail, quitte à ce que l'humanité y passe aussi.

— Je ne les aurais pas tous tués, mais les survivants auraient régressé à un stade plus... Obéissants.

— Tu voulais une deuxième période moyenâgeuse.

— Tout était plus simple en ce temps. Je donnais un ordre et il n'était pas discuté. Je n'ai pas su sentir qu'ils se détachaient peu à peu de moi et, lorsque je m'en suis aperçue...

— Ils ne t'obéissaient déjà plus, déduisit Fos. Pire ! Ils te contredisaient sans cesse. Est-ce pour cela que tu as rendu ce monde technophobe ? Pour ne pas revivre cet échec ?

— Je pensais qu'en revenant en arrière, les hommes en feraient de même, mais la magie a remplacé la technologie et ça n'a rien changé. Mais comme je l'ai dit, tu n'es plus là pour me mettre des bâtons dans les roues cette fois-ci. Malgré toutes tes précautions, j'ai fini par réunir les partitions. Ça n'est qu'une question de temps avant que ma victoire ne soit proclamée.

Le violon de cristal : les partitions perdues (suite)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant