comme Lapin

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À l'intérieur, seule une petite lucarne permettait à la lune d'introduire ses quelques rayons.
L'enfant, légèrement déboussolée, mit quelques temps à s'y retrouver et longtemps, elle chercha de quoi s'essuyer.

L'idée lui vint d'appeler sa mère. Idée qui disparut aussitôt. Elle avait passé l'âge d'appeler pour ça. A-t-on déjà vu Fred appeler Daphné pour lui nettoyer les fesses ? Un rire enfantin lui échappa. Elle riait de bon cur tandis que, le pantalon aux chevilles, elle tournait sur elle même cherchant son Graal.
Elle trouva enfin le papier toilette et, quelques secondes après, sortit de la cabane. Victorieuse et dans un grand sourire, elle s'écria : « J'AI FINI, ON PEUT Y ALLER ! ».

La mère ébouriffa la tignasse de la petite. « J'y vais aussi, tu restes là ? » . Et elle aussi, sans attendre de réponse, s'engouffra dans l'arène.

Agathe montait la garde. Piétinant la pelouse, elle sentait la rosée pénétrer la fine toile de ses chaussons : ses pieds étaient mouillés. Elle soupira et, comme pour échapper à cette humidité, entreprit de faire un petit tour.

Elle avançait, curieuse, gardant toujours le cabanon dans le coin de son il. Au dessus, une chouette passa. Ou alors c'était peut-être un hibou. Erika lui avait appris à distinguer les deux espèces. La chouette avait des oreilles externes mais pas le hibou.
Ou bien était-ce l'inverse ? Un doute la saisit un instant, elle s'arrêta. « De toute façon, laissa-t-elle échapper, j'ai pas vu s'il avait des oreilles donc je peux pas savoir. » Et, comme sa réponse lui convenait, elle s'enfonça un peu plus entre les arbres avant de s'arrêter tout aussi sec quelques pas plus loin.

Un grincement, s'étant frayé un chemin dans la nuit, lui était parvenu. Un appel suivit.

Le grincement, c'était la porte des toilettes et l'appel, celui de sa mère.

Elle s'élança au triple galop la rejoindre. Une chose pourtant, encore une fois, l'arrêta.

Non... elle n'avait pas rêvé. Elle l'avait bien vu...

Elle poussa un cri et, cavalant de plus belle, revint sur ses pas.

Oui, il était là!

Alors, s'approchant doucement de lui et l'encerclant de ses étroites menottes, Agathe le souleva à bout de bras et hurla :

« MAMAN, REGARDE LE GENTIL LAPIN QUE J'AI ATTRAPÉ ! JE VAIS L'APPELER CAROTTE ! ».

La bête pesait bien son poids alors, la ramenant contre elle, elle la prit dans ses bras.

L'animal ne bougeait plus. Seul son museau s'agitait encore dans tous les sens. La petite le maintenait fermement contre elle. Elle avait déjà vu faire à la ferme où elle allait avec l'école mais là, c'était elle qui tenait le lapin. Comme une grande.

Elle le caressait gentiment, comme il faut : dans le sens du poil. Il était tout chaud et cette présence lui fit du bien. Et comme elle continuait de le caresser, elle regretta ce prénom qui lui était venu. Non, Carotte c'était trop nul. Alors, approchant ses lèvres de la fière oreille qui se dressait sur la tête de l'animal, elle lui chuchota sur le ton de la confidence :

« Carotte c'est un prénom pour un lapin comme les autres mais toi je vais t'appeler Ananas parce que t'es gros. »

C'était vrai, Ananas était gros.

bleue aux yeux blondesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant