Chapitre 4

102 11 83
                                    

C'est dans un sursaut de terreur et de douleur qu'Astal se réveille complètement déboussolée. Cet fois-ci, il ne s'agit pas de cauchemars, bien au contraire. Le bateau ne fait que chavirer depuis plusieurs heures et elle a finit par heurter violemment le sol. En se redressant, elle masse doucement sa tête et jure intérieurement. Une tempête s'est levée durant la nuit, mais rien ne semblait affolant aux premiers grondements du ciel. Astal à l'impression d'être en pleine mer alors qu'ils sont seulement au port. Qu'est-ce qu'il en serra lorsqu'ils relèveront l'ancre ?

Elle se lève, la tête qui tourne, ne sachant point l'heure qui l'est. Mais à la position de la lune dans le ciel, le soleil ne devrait pas tarder à pointer le bout de son nez d'ici une ou deux heures. Se rappelant que l'échange à lieu à l'aube, elle se rend à la cuisine pour prendre des forces. Maintenant qu'ils ont fait le pleins de vivres, elle ne sait plus où donner de la tête. Beaucoup de recettes circulent devant ses yeux, mais elle ne parvient pas à en choisir une.

Finalement, elle opte pour la préparation de morue accompagnée de poireaux, navets et oignons. Elle n'est pas une grande cuisinière, mais elle prend toujours un réel plaisir à préparer le repas. À l'église, elle se rendait régulièrement en cuisine pour aider à la préparation et au service. Les cuisiners l'accueillaient toujours les bras grands ouverts.

Elle commence par vider les poissons pour pouvoir les découper par la suite. Elle n'est pas vraiment aimante de morue, mais le thon, saumon sont des poissons nobles. Il est très rare que de simples paysans puissent s'en procurer. Encore des idées qu'elle trouve aberrantes. De toute manière, la noblesse a accès à tout ce qui a de meilleur : le blé, la vache, le taureau, le porc, le saumon... Tout ce qui est extrêmement coûteux. Tandis que les paysans font avec les restes : l'avoine, le poulet, la morue, même les œufs c'est trop noble pour qu'il est les moyens de s'en acheter. Astal soupire à ses pensées sachant que cela ne changera probablement jamais.
— Besoin d'aide ? La jeune femme sursaute avant de reconnaître la silhouette de Daeron dans l'encadrement de la porte.
— Mordiable, j'ai cru y rester...
— Navré, je ne voulais pas t'effrayer...
— Ce n'est rien. Elle lui sourit. Tu es bien matinale dis-moi.
— Je n'ai pas l'habitude de dormir bien longtemps, il s'approche du plan de travail et la regarde, Que prépares-tu ?
— Hé bien, la journée va être dur et longue pour tout le monde alors je voulais préparer un repas consistant : morue avec des légumes.
— Tu acceptes un peu d'aide ?
— Toujours ! Tu peux couper les légumes si tu veux.
— Très bien.

Astal reprend le vidage du poisson sans entendre Daeron parler, rien de surprenant. Il semble très concentré. Il coupe de manière très précise les légumes. Elle apprécie sa compagnie malgré son silence. Après tout, elle préfère cela plutôt que les remarques de mauvais goûts de Nòmin.

Après quelques minutes, elle entend des petits sanglots et se tourne vers Daeron intriguée.
— Daeron ? Tout va bien ?
— Oui, oui... Répond-il en essuyant ses yeux de sa manche, Ce sont juste les oignons. Astal ne peut s'empêcher de glousser en voyant la tête de ce dernier. Je rêve où tu te moques de moi ?
— Je suis désolée, mais ta tête quand tu pleures c'est... C'est hilarant ! Elle continue de rigoler sous les soupire de Daeron.

Astal ne parvient plus à s'arrêter, elle rigole tellement que Daeron finit également par craquer et glousser.
— T'es pas croyable, plus jamais je te proposerai de l'aide pour cuisiner. Affirme-t-il en tentant de se calmer.
— Oh mais si ! On rigole tellement bien !

Ils finissent par se calmer après plusieurs minutes. Astal apprécie grandement ces petits moments de complicité. Elle se sent un peu plus incluse dans l'équipage. Ses doutes se dissipent et elle se conforte dans son choix qui lui semble être le bon.

À présent, ils s'assoient tous deux à la table ronde en attendant que le repas finissent de cuire. Astal n'a point pu s'empêcher de constater que, malgré son œil manquant, des larmes en coulaient encore. Elle aimerait lui demander comment cela se fait, mais cette question lui semble bien trop personnelle.
— Tu as quelque chose à me demander ? Demande Daeron remarquant que quelque chose la turlupine.
— En effet, mais j'ai peur de me montrer indiscrète...
— Pose ta question et j'en jugerais par moi-même. Elle hésite un instant, puis se lance.
— Comment se fait-il que lorsque tu pleures, ton œil absent coule toujours ?
— Je ne m'attendais pas à cette question... À vrai dire je ne sais pas, je pense que c'est parce que mon œil est toujours là, mais inutilisable.
— Je vois... Mais il ne te fait pas mal ? Je trouve cela très dangereux que tu es toujours ton œil.
— Il me lance à des moments et il m'est impossible de dormir dans ces moments là. Astal réfléchit et examine sa cicatrice du coin de l'œil.
— Ta cicatrice est plutôt récente n'est-ce pas ?
— Comment tu...?
— Elle est encore rosée, le coupe-t-elle, Si elle était plus lointaine, elle aurait pris la couleur de ta peau.
— Tu connais énormément de choses. Dit-il impressionné.
— L'église m'a tout appris concernant les soins, les blessures et les maladies. Après cette quête, si j'en sors vivante bien évidemment, accepteras-tu que je m'occupe de ton œil ?
— Comment ça ?
— Il ne peut pas rester à l'intérieur, t'es douleurs sont des signes qu'il s'infecte. Si cela continu, ça finira par atteindre ton autre œil puis ton cerveau...
— Mordiable... Si j'avais su...
— Ne tant fait pas, on ne peut pas tout savoir. Regarde, je ne savais point me battre, mais tu m'as appris. À mon tour de t'apprendre. Astal lui sourit gentiment.
— Merci. Daeron lui offre un petit sourire qui fait roussir ses joues.

Eveild [TERMINÉE] Où les histoires vivent. Découvrez maintenant