Chapitre 3

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Une douce odeur de sel remonte à ses narines et l'extirpe de son assoupissement. En effet, Astal, malgré toutes ses tentatives pour trouver un profond sommeil, ses cauchemars la rattrapent sans arrêt. C'est bredouille qu'elle s'assoit au bord de son lit. Elle rêve toujours de la même chose : la perte de ses parents. Pourquoi ? Pourquoi est-elle obligée de revivre cette horreur a chaque fois que ses yeux sont clos ? De plus, plus les années, les jours passent, plus cet événement regorge de détails sanglants. Aucune enfant de six ans ne devrait vivre cela, et elle ne le souhaite à personne. Seulement revoir les yeux vides et le front ouvert de sa mère la tétanise et l'écœure.

Le carrosse se déplaçait à vive allure avec l'aide des équidés. Astal ne comprenait pas pourquoi ses parents étaient pris d'une puissante agitation. Ils se hurlaient dessus, tandis qu'elle pleurait ne comprenant pas ce qui se passait. L'angoisse, la peur et la terreur animaient le cœur de ses parents, puis le sien.

Soudain, le carrosse s'était arrêté brusquement manquant de se retourner. Astal se serrait contre sa mère, prise de pleur inarrêtables. Des hurlements, bien trop proches, commençaient à se faire entendre. La porte s'était envolée dans un bruit sourd laissant apparaître les fauteurs de troubles. Astal ne distinguait que des grandes ombres noirs qui lui paraissaient terrifiantes. Ces dernières ordonnaient à sa famille de sortir du carrosse, alors que sa mère les suppliait de la laisser partir. Du haut de ses six ans, elle ne comprenait pas ce qui se passait. La seule chose dont elle était certaine, c'est que ces personnes n'étaient pas là pour les aider.

Son père, fou de constater qu'ils feraient du mal à sa fille, s'était jeté sur ces ombres en lui hurlant de fuir. Seulement, Astal ne voulait pas fuir, elle voulait rester avec eux, hors de question de les abandonner.

Son père continuait de lui hurler dessus, mais c'est en le voyant se faire poignarder en plein dans l'œil qu'elle finit par l'écouter. Elle prit ses jambes à son coup et courue, courue le plus vite et le plus loin possible sous les pleurs et les cris de sa mère. Mais en se retournant une dernière fois, espérant la voir vainqueur, elle la découvrait allongée dans son sang la tête ouverte.

Son cœur se serrait dans sa poitrine. Elle souhaitait plus que tout aller auprès d'eux, mais elle ne pouvait pas.

Elle avait continué de courir, courir pendant des minutes, peut-être même des heures. Elle ne savait point, mais elle avait finit par sombrer bien trop fatiguée pour faire un pas de plus.

Astal se pince comme pour sortir de sa propre tête. Un jour, elle sait qu'elle n'y pensera plus et que tout cela sera loin derrière elle. Du moins, c'est ce qu'elle espère.

Elle se lève et sort de sa nouvelle chambre. Le bateau est silencieux, bien trop silencieux. Malgré ce silence de mort, elle décide de s'aventurer dans le couloir pour rejoindre l'escalier central. Elle s'apprête à monter, mais une voix grave et plutôt familière l'interpelle.
— Astal ?
— Qui a-t-il ? Demande-t-elle en se retournant pour découvrir Daeron.
— Je me rendais justement à ta chambre, le Capitaine veut que tu te joignes à nous pour une réunion.
— Bien entendu, je te suis.

En étant juste derrière lui, elle se rend compte qu'il en impose beaucoup plus que lorsqu'il est recroquevillé sur lui-même. Il boite toujours, mais il a l'air de se porter mieux que lors de leur rencontre.
— Je ne veux point être indiscrète, mais comment se porte ta blessure ?
— Bien.
— D'accord...
— On y est. Il ouvre le bureau du Capitaine et l'invité à entrer.

Astal s'immisce dans la pièce suivi de Daeron qui referme la porte à sa suite. Elle ne peut s'empêcher de remarquer qu'il aborde un ton froid et indifférent, est-ce de sa faute ?

Eveild [TERMINÉE] Où les histoires vivent. Découvrez maintenant