Liste

1.3K 174 29
                                    

12 décembre

Depuis que son filleul était venu lui parler de Potter, un peu perdu, et qu'il avait lui même confronté le Sauveur pour s'assurer que Drago ne soit pas la cible d'une farce cruelle, Severus devait avouer qu'il avait observé Harry Potter attentivement.

C'était étrange quand il y pensait, puisqu'il l'avait surveillé toute sa scolarité. Autant pour le protéger que pour le punir encore et encore, pour lui faire regretter d'être né Potter. Mais il ne l'avait jamais regardé réellement.

Il pouvait dire qu'il ne haïssait plus le garçon. Harry Potter avait fait ses preuves, de bien des façons. Il s'était réellement démené pour tous les sauver, pour faire face à Voldemort. Il s'était précipité au devant du danger comme un bon Gryffondor stupide, mais il n'avait pas manqué de courage, loin de là.

Il l'avait sauvé, lui son professeur amer et aigri. Il avait accompli l'impossible.

Severus avait écouté Harry quand celui-ci avait parlé de Drago, qui se noyait littéralement dans sa culpabilité pour les erreurs qu'il avait commises. Et il n'avait rien eu à objecter. Drago se débattrait et refuserait toute aide. Il n'aimerait pas que qui que ce soit - même lui, son propre parrain - ne pointe ses faiblesses du doigt.

La méthode Potter semblait la plus adaptée. Mais... C'était Potter. Ils avaient été rivaux depuis leur première rencontre après tout.

Severus sursauta alors que quelqu'un frappait à sa porte. Avec un grognement agacé, il se redressa sur son siège et indiqua à son visiteur d'entrer d'une voix polaire.

Il leva un sourcil surpris en voyant Minerva entrer.

- Minerva ?

- Severus ! Prendriez vous une tasse de thé avec moi ?

Avec un soupir, Severus fit apparaître un service à thé et le servit, avec soin. Minerva avait la fâcheuse tendance à prendre un peu trop d'habitudes appartenant à Dumbledore. Elle ne semblait pas entendre les refus. De manière générale, il pouvait dire qu'elle ne comprenait que ce qui l'arrangeait.

- De quoi vouliez-vous me parler ?

La Directrice but une gorgée de thé et reposa avec précautions sa tasse. Si elle avait été sous forme féline, elle se serait probablement léché les babines.

Elle eut un léger sourire amusé.

- Je suis venu parler de nos assistants, bien évidemment.

- Nos... ?

Minerva gloussa.

- Oh voyons Severus ! Ne refusez pas à une vieille femme le petit plaisir de jouer le jeu d'Albus ! Je dois avouer que même si c'était particulièrement agaçant, je commence à comprendre l'intérêt en me trouvant à sa place.

- Venez en au fait. Je suis un peu trop fatigué ce soir pour jouer aux devinettes...

La Directrice haussa les épaules.

- Je ne devrais pas avoir besoin de vous parler de l'état de Monsieur Potter à son retour ici ? J'ai bien noté que vous le surveilliez comme le lait sur le feu...

Piégé par sa collègue, Severus haussa les épaules, en grognant une vague réponse. Avec un rictus amusé, Minerva se pencha légèrement et continua.

- Je disais donc, Monsieur Potter était dans un état lamentable. Je suppose que... ses démons quels qu'ils soient avaient fini par le rattraper.

Avec une parfaite mauvaise foi, Severus renifla d'un air méprisant.

- Il a l'air en parfaite forme, votre petit protégé.

Minerva connaissait trop bien le maître des potions pour se laisser avoir par ses paroles pleines de fiel. Elle sourit donc et continua, ignorant l'intervention.

- Cependant, en plus de Harry, un autre jeune garçon est revenu ici... brisé. Monsieur Malefoy n'est pas au mieux de sa forme n'est-ce-pas ?

- Son travail me donne toute satisfaction, Minerva.

- Bien sûr Severus. Je suppose que vous ne parlerez pas de sa probable culpabilité. C'est quelque chose que vous avez vous même expérimenté, lorsque vous êtes revenu vers Albus.

- Je vais bien.

- Je le sais. Et j'en suis heureuse. Vous le méritez, et vous savez que je ne dis pas ça pour vous agréer. Vous êtes revenu ici brisé, Severus. Albus... Seigneur, quand Lily est morte, il a cru que vous alliez commettre un geste désespéré. Aujourd'hui, quand je croise le regard de Monsieur Malefoy... j'ai l'impression de voir vos yeux.

- Minerva...

La Directrice but un peu de thé, laissant le temps à ses paroles de faire leur effet. Puis elle sourit.

- Ne me fusillez pas du regard ainsi, Severus. J'énonce des faits.

- Et ensuite quoi ? Vous allez me fournir une liste pour réparer ces deux gosses ?

Elle gloussa.

- Rien d'aussi simple mon cher... Cependant, ils sont apparemment ce qu'il faut à l'autre pour reprendre pied. Ce que nous avons à faire est simple : juste faire en sorte qu'ils passent un maximum de temps ensemble.

- Êtes-vous sérieuse ?

- Osez-dire que vous n'avez pas remarqué les changements en quelques jours ?

- J'ai surtout noté que Drago a failli être grièvement blessé parce qu'une petite dinde rousse a piqué une crise de jalousie.

Minerva écarta l'objection d'un geste de la main.

- Je me charge de Miss Weasley. Mais dites moi, Severus... Qui Harry Potter a t'il défendu ?

Severus ne put que répondre.

- Drago.

- Exactement. Et je suis certaine que vous avez noté qu'ils passaient du temps ensemble quand votre cher filleul était à l'infirmerie n'est-ce-pas ?

Le Maître des potions se leva et fit quelques allées et venues. Visiblement à contrecœur, il répondit à sa collègue.

- Il est possible que j'ai moi-même constaté que Potter ait changé. Qu'il soit devenu un peu moins... bref. Quelles que soient ses qualités, je ne vois pas ce qu'il pourra faire de plus pour Drago. Potter malgré toute sa bonne volonté ne pourra pas remonter le temps ou effacer la marque sur son bras. Il ne pourra pas effacer d'un coup de baguette les regrets de Drago. Ni lui faire oublier ses cauchemars.

- Attendriez-vous un autre miracle ? Bien sûr que Harry ne peut pas remonter le temps. Mais il pourrait faire oublier la marque ou les regrets de Monsieur Malefoy, en lui rappelant que la vie continue. Harry est un jeune homme très doué pour survivre, je n'ai pas besoin de vous le rappeler.

Severus renifla.

- La mort elle-même ne veut pas de ce fichu gosse, et vous voulez me le coller dans les pattes ?

Minerva gloussa une fois encore et secoua la tête, faisant dangereusement osciller son chapeau pointu sur sa tête.

- Ne jouez pas les grands méchants potionnistes, ça ne prend pas avec moi. Pas après tout ce temps. Que perdez-vous à tenter l'expérience ? S'ils se battent... et bien ma foi, il suffira de les séparer. Nous avons survécu à six longues années de disputes, je pense que le château peut endurer quelques semaines de plus dans le pire des cas ?

Bien entendu, il n'y avait rien à répondre. Severus soupira et but sa tasse sans dire un mot. Avec un large sourire victorieux, Minerva fit disparaître le service à thé et sortit du bureau du Maître des potions.

Les douze jours de NoëlOù les histoires vivent. Découvrez maintenant