Pandémie

Chapitre 30

Pdv Jungkook
Jour 40

- J'aimerais récompenser tout spécialement le seul soldat survivant, et sans qui cette mission aurait été un échec. Soldat V.

Mon souffle se coupe. J'observe en silence, agenouillé derrière des buissons épais, situé en hauteur par rapport à l'assemblée. J'ai une vue imprenable sur ce qu'il se passe en contrebas. Mon coeur bat fort à mes tempes. J'ai chaud, mes doigts me picotent. Il est là, il est juste là. Il entre sur la scène, le pas assuré, Soonshim à ses côtés. La caméra le filme et son image est retranscrite sur grand écran. Il porte un uniforme officiel, son visage est impassible, ses yeux, inexpressifs. V?
Je fronce les sourcils. Ce n'est pas Taehyung. Enfin si mais il semble... Vide. Creux. Un mur de marbre entoure ses émotions, il agit comme un robot. Alors que Taehyung était impulsif, imprévisible et parfois arrogant, il débordait de vitalité, ce Taehung-là est programmé, paramétré pour obéir à la lettre. Mon coeur se serre. Et si... Et si finalement ce ne serait pas mieux, de mourir là? Est-ce que Taehyung existe vraiment derrière V? Ou alors Taehyung n'était qu'un rôle endossé pour la mission, et V serait la véritable facette? Si j'exécute le plan prévu avec Yoongi, qui retrouverai-je ensuite, Taehyung ou V? Mes tempes m'envoient une décharge de douleur, par reflexe je ferme les yeux un instant. Mais au lieu du noir profond et apaisant, je vois un blanc glacial. Mon corps entier se tend. Tout est blanc, un sifflement aigu résonne. Il s'évanouit progressivement, et mon cœur retrouve un battement régulier à mesure que le blanc se dissout et que ma vue revient. Je prends une inspiration profonde. Je veux en avoir le cœur net. Je veux savoir qui est vraiment V, et même si mon espoir est mince, je veux retrouver Taehyung. Tous les autres sont morts. Taehyung est mon dernier ami vivant. Ami...

Je regarde devant moi une boîte qui enferme des moustiques par dizaines. Après avoir obtenu le vaccin, l'idée était de répandre le virus le plus rapidement possible pour créer une diversion. Or le virus contamine par le sang... Les moustiques sont donc vecteurs. Avec du sucre et de la levure trouvé au réfectoire, j'ai fait un piège à CO2 pour attirer les moustiques et les enfermer dans une boîte. Les scientifiques qui travaillaient sur le vaccin avaient quelques cobbayes animaux. J'ai pris une souris contaminée et elle a permis de nourrir les moustiques. La boîte qui est devant moi contient donc près d'une cinquantaine de moustiques porteurs du virus qui a le potentiel pour détruire l'humanité.
Délicatement, j'ouvre la boîte et libère les moustiques. Je m'en vais aussitôt me mettre à l'abri.

- Soldat. Tu as su démontrer ta bravoure, ton courage et ta persévérance...

Le porte-parole poursuit son discours, mais mes yeux sont rivés sur l'assemblée. Tant d'hommes réunis attirent les moustiques comme des aimants. Ce n'est plus qu'une question de temps.
La caméra fait un gros plan sur Taehyung afin de capturer en images sa promesse d'allégeance au dictateur. Mon cœur loupe un battement. Mais de l'agitation dans l'assemblée attire mon attention et je me reconcentre aussitôt. C'est parti...

Des hommes se bousculent, des voix s'élèvent, ordonnant le calme. Mais rien n'y fait. Les hommes regardent autour d'eux, confus, des murmures parcourent l'audience. La tension monte. Les caméras continuent de filmer mais plus personne n'écoute ce qu'il se passe sur scène. La pression dans l'air devient palpable, les soldats piétinent sur place, désarmés face à la situation qui prend de l'ampleur.
Je n'ai pas vu le premier coup partir. J'ai simplement vu comme les hommes se sont soudainement écartés, poussant les autres. Les premiers infectés ont commencé à présenter les symptômes. Les soldats n'ont pas réagi immédiatement, n'ayant probablement jamais été mis en contact avec le virus avant. Mais dès l'apparition des signes d'agressivité, ils ont perdu tout ordre dans les rangs et le mouvement de foule a déclenché le reste. Tiraillés entre le comportement agressif et la confiance entre frères d'armes, les soldats n'ont pas fait feu immédiatement. Les combats ont commencé au corps-à-corps.