Zodiaque - Tome 2 : l'Ordre de l'Ombre.

Chapitre Treize : traumatismes internes.

Lorsque je reprends mes esprits, je ne sais pas où je me trouve. Les souvenirs sont encore flous dans ma mémoire et mon cerveau refuse d'enregistrer quoi que ce soit qui puisse être trop difficile à supporter... et je ne cherche pas à me forcer. Ça ne servirait à rien.

Le plafond est fait de caissons d'or, avec des poutres brunes apparentes. De petites étoiles viennent scintiller devant mes yeux. Je comprends vite qu'il s'agit d'un effet dû à mon évanouissement. Un sifflement ne cesse d'aller et venir dans mes oreilles, ce qui est désagréable. Je porte une main à ma tête, en voulant faire partir cette intrusion. Mon geste attire l'attention.

-Tu es réveillée ?

Je n'ai pas besoin de répondre à cette question. Je ne comprends pas tout de suite de qui elle vient, jusqu'à-ce qu'un visage blanc, des yeux opales et des cheveux roux se placent dans mon champ de vision. La princesse de Scoltide me regarde d'un air profondément inquiet, visiblement à mon chevet depuis pas mal de temps. Ses cheveux habituellement impeccables sont désordonnés et de légers cernes soulignent ses yeux en amande. Elle me sourit, faisant disparaître l'air préoccupant qu'a pris son visage, puis porte une main à mon front.

-Tu es encore brûlante. Tu as failli nous échapper, tu sais ?

-Je ne pense pas que le lui dire soit opportun, réplique une voix caverneuse.

Mes yeux papillonnent vers le fond de la pièce pour découvrir Yahim, un livre entre les mains, le regard émeraude tourné dans notre direction. Sa peau striée de cicatrice est éclairée à contre-jour par la baie-vitrée juste derrière lui. Ses cheveux très fins, longs et bruns se balancent dans un geste gracieux lorsqu'il relève le regard. Je ne m'étais jamais aperçus qu'il avait à ce point une apparence aussi dure, et pourtant fluide. Même dans la simple posture assise, une jambe posée sur l'autre, la dureté de sa carrure est nuancée par la finesse de ses traits et de son attitude. L'allure guerrière et forestière qu'il arrive à concilier est déconcertante, mais elle a du charme. Wana se tourne vers lui pour lui lancer un air las.

-Suffit, les secrets, s'agace-t-elle. Je ne veux plus qu'on se cache des choses entre nous, et elle va rapidement remarquer que tout le monde s'inquiète excessivement de son état de santé. Je ne crois pas que taire les faits soit une bonne chose !

-Ça ne l'est pas, avoue Yahim, mais chaque chose en son temps. Laisse-là se réveiller.

-Je suis réveillée, protesté-je la voix pâteuse.

Je grimace. J'aurais peut-être mieux fait de me taire. Ma gorge est affreusement sèche et elle me fait mal. Ma langue est engourdie dans ma bouche, mon cerveau a du mal à se réveiller. Je ne comprends pas pourquoi. Ne devrais-je pas être au mieux de ma forme, après avoir dormis ? Et pendant combien de temps ?

Je baisse les yeux sur mon corps pour savoir dans quel état je suis. Je grimace à nouveau. Mes jambes sont couvertes par une couverture, mais je sens sans aucune difficulté les veines noires qui doivent les marquer. Elles ne sont pas encore parties, même si leurs effets s'est graduellement diminués. Les veines de mes bras et mes mains sont également touchées. Forcément, j'ai été exposée pendant trop de temps face au sombre. Je ne sens pas la régénération typique des chevaliers courir dans mes veines. Je ne suis même pas en capacité de me lever, trop épuisée.

-Tu devrais te rendormir, me demande Wana en posant une serviette mouillée sur mon front. Tu as été énormément touché par le sombre... je n'avais jamais vu ça. Je me demande pourquoi Zircon...

-Zircon nous parlera en temps voulu, rétorque Yahim dans le fond de la pièce. Il n'a pas décroché un mot depuis et je ne pense pas qu'il le fera de sitôt.