Zodiaque - Tome 2 : l'Ordre de l'Ombre.

Chapitre Vingt-Quatre : déchirure dévastatrice.

Impossible. Je me répète ce mot dans ma tête en découvrant soudainement qu'il n'a plus aucun sens. Impossible. Mes jambes tremblent si forts qu'elles peinent à me porter. Impossible ! Le choc m'assaille si violemment que j'en tombe par terre, les fesses les premières sur le sol, le visage ruisselant de larmes braqué vers... vers cette fichue porte. Ou plutôt, vers ce que cache de cette porte. Ce qu'elle dévoile. Et je... je...

Ce n'est pas possible.

Mes jambes et mes mains tremblent. Je hoquette silencieusement, seule, dans ce couloir sombre, éclairée par le rectangle de lumière que dégage cette pièce. Je n'aurais jamais dû ouvrir. Je n'aurais jamais dû écouter Axel. Je n'aurais jamais dû faire ça. Les phrases qui se bousculent dans ma tête n'ont pas la moindre cohérence. La panique que provoque ce coup de folie paralyse complètement mon cerveau. Je ne peux pas accepter de devenir folle. Je ne veux pas devenir folle. Je dois oublier, oublier, oublier ce que j'ai devant les yeux. Impossible !

L'impossible n'est pas irréalisable. J'ai l'impression d'exploser en deux. D'un côté, une part de moi refuse en hurlant ce qu'elle vient de voir, s'accrochant de toutes ses forces au rationnel, clouée sur place par la peur. Et une partie froide, la tête redressée, les poings serrés de colère le long du corps qui observe ce qu'elle a devant elle sans avoir aucun mal à y faire face. Cette partie de moi est aussi puissante que la peur qui me paralyse les veines. Elle est terriblement en colère. Elle a envie de détruire tout ce qu'elle touche. Le vide autour de moi répond avec virulence à cet appel. Pris en étau entre ces deux états contradictoires, je me contente de rester au milieu. Sur le sol, figée, les larmes dégoulinant sur mes joues, les mains crispées sur le sol, les nerfs tendu à l'extrême, et le vide vibrant autour de moi propageant ma confusion.

J'aimerais avoir la vue assez brouillée pour me protéger de ce que j'ai devant les yeux. J'aimerais ne plus voir ce que j'ai devant les yeux. Devenir aveugle. Je voudrais fuir et qu'on me laisse tranquille. Mais je n'ai pas le droit au répit. Parce que mes dons de chevaliers font que je peux voir se refléter, dans chaque goutte lugubre qui tombe, la pièce devant moi. Je la vois des milliers de fois à travers mes larmes. Ce jeu de miroir ancre avec brutalité dans ma mémoire cette image désastreuse que je veux effacer.

L'énergie qui parcourt mes veines menace d'exploser. Elle me permet de me redresser, lentement, sans quitter la pièce des yeux. Je me rends compte que plusieurs sentiments destructeurs se mêlent en moi. Colère, tristesse, trahison, incompréhension, et de la peur. De la confusion. De la panique. De la puissance. Je ne sais plus à quoi me fier.

Impossible ! La voix de la raison et de la rationalité hurle dans mon esprit. Ce que je vois n'est sans doute que le fruit de mon imagination. Je suis en train de délirer, les sous-entendus d'Axel me montent à la tête. J'ai envie de pleurer de sarcasme et de rire de désespoir. Je n'ai pas assez d'imagination pour un truc pareil. J'ai l'impression de me briser en deux. Impossible n'est pas irréalisable. Mon cœur s'emballe. Il me fait mal. C'est une douleur différente des autres. Elle est plus forte, plus à cran... plus vivante. J'ai envie de me laisser aller à la colère virulente qui gronde et au tourment dévastateur qui s'écroule en moi.

Désormais debout, toujours en fixant cette pièce insupportable, je reprends mon souffle. Je me force à respirer calmement, pour essayer de me calmer. Pour que mes jambes arrêtent de trembler. Pour que mon cœur arrête de s'affoler. Pour que mon esprit cesse de me tirailler dans deux directions différentes. Mais c'est impossible. Impossible n'est pas irréalisable. Cette phrase insupportable résonne encore dans ma tête. Je voudrais qu'elle apparaisse sur les murs pour pouvoir la frapper. Fracasser le mur. Détruire le mur. Détruire la pièce. Détruire l'irrationnel, me préserver de la peur, et bordel détruire cette putain de pièce derrière cette putain de porte !