Catalina
Les yeux bouffis, les cheveux en pétards, le corps endolori, voilà le résultat d'une journée catastrophique et d'une nuit qui l'a été tout autant. Je me retiens de donner un coup de poing à ce miroir qui me nargue ce matin.
J'enfile un vieux jogging usé ainsi qu'une veste en peau de pêche plus du tout à la mode. Je me brosse les cheveux et les attache à la va-vite. J'applique un peu de fond de teint couleur naturelle pour cacher les cernes noirs sous mes yeux. Je ne ressemble à pas grand-chose mis à part à un zombie sortie tout droit d'un film d'horreur. Je n'ai envie de rien en ce lundi matin, hormis de retrouver mon lit. Mais je n'ai pas vraiment le choix, je dois rejoindre le lycée, j'ai surtout hâte de revoir mon amie pour la réconforter. J'ai tout de même une petite appréhension qu'elle me rejette, ce que je comprendrais puisque tout est de ma faute. Encore une fois, je culpabilise de l'avoir mise, malgré moi, dans cette situation.
Je sors de la salle de bain après seulement quelques minutes, comme chaque jour, je suis la première levée ce qui m'arrange aujourd'hui vu l'état de mon visage. Peut-être que d'ici une demi-heure mes cousins et cousines ne s'apercevront de rien. J'aurais dû me passer de l'eau glacée pour désenfler mon visage boursoufflé mais je n'y ai pas pensé.
Je prépare le petit déjeuner pour toute la fratrie. Je dépose un pain en forme de boule que nous devrons partager tous les six. Je préfère me priver d'un repas plutôt de savoir que les plus jeunes n'auront rien dans le ventre. Surtout que Veronica et Arturo, tous deux en pleine croissance, mangent comme des ogres. Alors à la place, je me verse un chocolat chaud, avec beaucoup d'eau à la place du lait. Mon esprit s'éloigne vers des pensées mélancoliques. J'ai passé une partie de la nuit à imaginer ce qu'aurait pu être ma vie si mes parents étaient encore vivants. Serais-je la même personne ? J'en doute... je ressemblerais certainement à Andréa, une adolescente croquant la vie à pleine dent, faisant la fête chaque week-end. Je passerais mon temps à me rebeller contre mes parents et tout ce qui me préoccuperais serait d'être à la pointe de la mode. J'ai ce fardeau depuis des années, celui d'avoir survécu à ce massacre alors que mes parents ont perdu la vie. Je devrais m'estimer chanceuse que l'ont m'ait épargné, pourtant j'ai un trou dans la poitrine qui ne se refermera sans doute jamais. Qu'ais-je fait pour mériter tout ces drames autour de moi ?
Arturo se lève le premier. Il a l'air aussi usé que moi. Ses cheveux châtain mi-longs se dressent sur sa tête. On dirait qu'il n'a pas beaucoup dormi. Il me dit à peine bonjour et part se vautrer sur le canapé. Il vaut mieux que je le laisse tranquille, il n'est pas d'humeur à discuter, nous sommes tous les deux de mauvaise compagnie.
Je patiente le temps que tout ce petit monde se lève, en faisant la vaisselle, je débarrasse une maison déjà bien rangée et fais un peu les poussières. Veronica se lève à son tour. Je me sens déjà mieux en sa présence, l'air est moins électrique d'un coup. Quant à Arturo, il n'a toujours pas lâché un mot, je me demande ce qui lui prend. Je décide d'aller lui parler quitte à me faire jeter, je prends le risque.
Je me dirige vers le salon, me place devant le petit écran et le vois déjà souffler. C'est clair qu'il n'a pas envie de me voir, mais tant pis, j'ai besoin de savoir ce qui lui prend.
- Est-ce que ça va ?
Il me lance un regard noir, ce n'est pas dans ses habitudes d'avoir ce genre de comportement. C'est un garçon toujours aimable, voilà pourquoi je me permets d'insister. Il finit par me répondre au bout d'un laps de temps qui me paraît très long. C'est évident qu'il me cache quelque chose.
- Oui ça va.
Point, c'est tout ce que je peux lui soutirer en cet instant.
Au moment de partir, je vois qu'il traîne également des pieds. Il râle, attend le dernier moment pour sortir et surtout il ne veut parler à personne. Peut-être qu'il a eu une mauvaise journée comme moi hier. Ou alors il a lui aussi des problèmes et préfère les garder pour lui. Nous ne sommes pas cousins pour rien. Dans la famille on a tous plus ou moins des difficultés pour communiquer. Il n'y a que Rosa qui exprime tout ce qui lui passe par la tête, normal d'être aussi spontanée à son âge.
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Catalina
RomanceElle Enfermée dans la solitude depuis la disparition de mes parents, je tente d'effacer les souvenirs atroces de ce macabre assassinat. J'ai grandi dans la foi. J'ai trouvé un certain apaisement dans la religion chrétienne. Pratiquante assidue, je m...