Aurore - 1

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- Hum, bonjour ?
- Oh, Aurore, te voilà. Je te présente Julianna, une amie d'enfance. Nous nous sommes rencontrés au collège et nous sommes perdus de vue quelques années après vos naissances.
- « Vos naissances » ? je demande, perdue.
- Mon fils a ton âge.
- Ils viennent d'emménager dans l'immeuble, ajoute mon père.
- Sympa. Hmm, je vais chercher la petite ?
- Si tu veux.
- J'y vais. See you soon.

Arrivée à l'école, je me pose sous un grand arbre proche de la primaire. Je remarque un garçon, il n'est jamais venu, je ne l'ai jamais vu. Il fixe ses pieds pendant qu'un petit garçon trépigne d'impatience à ses côtés. Je détourne les yeux lorsque je vois Ambre arriver avec un petit garçon brun. Elle vient vers moi tandis qu'il rejoint le jeune homme de tout à l'heure, et qu'un second petit bonhomme qui ressemble au premier comme deux gouttes d'eau se joint à eux. Ma petite soeur m'explique qu'ils sont nouveaux et qu'ils sont jumeaux. Ceci explique cela.
- Ro', t'peux prendre mon cartable ?
- Donnes.
On rentre tranquillement, tant que mes parents ne sont pas dans les parages, elle est plutôt mignonne.

Durant le repas, les discussions vont bon train, sur les jumeaux rencontrés par Ambre, sur ses nouvelles amies et nouveaux travaux. Une fois la petite couchée, j'entends traîner les prénoms de Julianna, Nicolas, Noan, Naïl, Nino et Noé. La famille de Julianna ? Sûrement. Mais si ils se sont perdus de vus après nos naissances, je connais son fils, forcément. Lequel de ces cinq noms porte-t-il ? Je me souviens vaguement d'un Noah, Noan peut-être, mais est-ce lui ? Un autre ? Je le saurais probablement demain au lycée.

Mes rêves sont hantés de souvenirs heureux puis de larmes lors de la disparition d'yeux verts profonds. Ils deviennent cauchemardesques. Ou peut-être pas puisque c'est ma vie. Du moins, les couleurs noires et rouges y abondent bien souvent.

Comme tous les matins, je pars en direction du lycée, les notes se jouant dans ma tête. J'ai toujours de la musique à porter de main et souvent un écouteur qui traîne à mon oreille. Après un quart d'heure de marche, je commence à croiser quelques connaissances que je salue poliment. Devant ma classe, je discute avec mes "amies" de banalités, comme toujours. Les cours se succèdent un par un, ponctués de quelques rires et d'une gueulante de la prof de sciences. Jusqu'à ce que le directeur entre en plein cours de français pour nous annoncer l'arrivée d'un nouvel élève. Quelle surprise de voir apparaître le garçon d'hier, qui s'avère être bel et bien Noan. Il a la tête fière, le visage rieur pendant qu'il traverse la classe pour venir s'asseoir à l'arrière, pas très loin de moi finalement. Ses yeux s'attardent quelques secondes sur moi avant de discuter avec le pitre de la classe. J'aurais dû m'en douter.

- Silence !

Noan sursaute en une moue boudeuse et Aaron rigole à gorge déployée. Je n'ai jamais compris pourquoi est-ce qu'il fait toujours ça. On peut être heureux de vivre, tout ce que l'on veut, mais sans compromettre son avenir, non ? Je ne suis pas du genre hyper sérieuse, presqu'au contraire, mais il faut l'être un minimum, non ? Ou tout du moins essayer. M'enfin ce n'est pas mon souci.
- Hey, psst, j'entends sur ma gauche.
Je tourne la tête. Il me parle, à moi ?
- Tu t'appelles co-
La sonnerie le coupe en plein dans sa phrase. Tant mieux. Je n'aime pas à avoir à parler aux gens, je n'aime pas parler et encore moins à des amis du personnage clownesque. Je quitte l'établissement pour rapidement rejoindre le studio de danse. Personne n'est au courant. C'est mon jardin secret et lorsque je finis tôt, j'y vais m'y réfugier. J'enfile des vêtements plus amples, plus élastiques, dans lesquels mes mouvements ne seront plus limités. Les notes de musique classique embaument la pièce, mes bras se lancent dans une valse solitaire, mes pieds suivent la danse, mes cheveux volent autour de moi, ma tête se vide. Ce lâché-prise libère mes émotions pour mieux les museler ensuite, elles ne doivent pas prendre le pas sur moi, même si c'est souvent le cas. Mes zébrures écarlates en sont la preuve. Mes gestes se font moins fluides et plus brutaux sous le rythme de la musique, me permettant de me défouler. Au bout d'une heure, je m'étire sur une mélodie bien plus douce, calmante. Puis, un peu de rap dans les oreilles pour me motiver à rentrer. Ce que je peux aimer le rap, je peux en trouver pour tout moment, pour rire, pour déprimer, pour réfléchir, pour me balader, pour m'énerver, voire même pour pleurer.

Nyx & ErèbeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant