chapitre treize journal

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Bonjour Stiff. Je pense que je vais arrêter de t'écrire mais d'abord, écoute-moi. Cela fait maintenant deux jours que je suis confiné à la maison, chez grand-mère. Nous sommes mercredi. Je ne veux plus aller à l'école. C'est fini. Je n'en peux plus. J'éclate en sanglots toutes les cinq minutes. Je pense que ce que je déteste le plus, c'est l'incertitude. J'aimerais savoir ce qu'est devenue Ange. Qu'elle soit morte ou non, j'aimerais le savoir et arrêter de me faire des films. Ma grand-mère m'a confisqué mon téléphone. Elle a vu que je recevais des messages haineux et elle ne veut pas que je les lise vu mon instabilité émotionnelle. C'est vrai que si quelqu'un me disait de sauter sous un train, je serais probablement capable de le faire. Elle s'inquiète pour moi. Je fais tout mon possible pour la rassurer mais je me mens à moi-même. J'essaie de me convaincre que tout va bien, que j'ai beaucoup d'amis, une gentille famille. Je passe ma journée à me mentir. À certains moments, je suis totalement insensible puis à d'autres, je pleure, me frappe contre les murs. Je rigole pour rien puis je pleure. Je ne tiens plus debout, je ne dors plus la nuit. J'ai des migraines horribles au moment d'aller me coucher. Dès que je ferme les yeux, mon cerveau me repasse en boucle les différentes possibilités de la mort d'Ange. Même lorsque je suis fatigué, je me force à ne pas dormir. J'ai beau être fatigué, ne pas dormir m'apporte un certain réconfort. Les rares fois où j'arrive à m'endormir, je fais des cauchemars. Je n'arrive plus à savoir si t'écrire me fait du bien. Je confonds la réalité avec mon imagination. Je suis complètement perdu. J'ai l'impression d'être malade. J'ai toujours envie de vomir, je suis pâle comme un linge et j'ai des cernes gigantesques. Je ne supporte pas mon plâtre. Je voudrais à tout prix le retirer mais je ne peux pas. Je suis impuissant. Inutile. Je suis sûr qu'un être en moins sur cette planète ne changerait pas grand-chose. Mais je ne veux pas mourir tant que je ne suis pas sûr de la mort d'Ange. Je tremble tout le temps. Ma grand-mère doit me forcer à manger. Il m'arrive souvent d'être à deux doigts de l'évanouissement. Pourtant, je me réveille chaque jour pour revivre cette torture. Je ne supporte pas de rester au lit sans bouger. J'ai l'impression de devenir fou. Pourtant, je déteste me lever. Je ne sais plus. Je n'ai aucune envie. Je suis incapable de choisir lorsque l'on me demande quelque chose. C'est comme si j'étais déjà mort.


Journal d'un harceléOù les histoires vivent. Découvrez maintenant